"Ce n'est ni le monde ni ce que nous y sommes ou y faisons qui nous font peur, mais l'idée que l'on s'en fait, car la vision guide nos pas. Et sur cela, nous avons la main. C'est là toute la puissance de notre pensée ! " Après avoir durant des années posté ici réflexions et conseils sur le management des organisations, je livre aujourd'hui une vision de la réalité, au plus profond de soi même sur l'être et l'univers. Profitez ! Si vous êtes désireux d'accomplissement personnel, ce blog est pour vous. Fouillez dans ces plus de 500 articles ! Commentez ! Partagez ! Si ces contenus vous intéressent, le droit de copie, même partiel, est sous Licence Creative Commons : chacun est donc libre de les reproduire, de les citer comme il le souhaite, à l'expresse condition d'en indiquer chaque fois la source et de ne pas en faire commerce.

Ce réel où et que nous sommes (25 03)

L'univers dans lequel nous sommes (nous même compris) apparaît en physique quantique comme un ensemble de résonances, de fréquences, d'ondes, qui, quand elles se ralentissent suffisamment, finissent par devenir matière. Et c'est celle-ci que nos sens perçoivent. Cela se manifeste un peu à l'instar de l'eau qui, selon la température, se révèle vapeur, liquide ou glace. Nous savons aussi que nos sens ne perçoivent pas plus de trois pour cent des fréquences ondulatoires que sont les sons et les lumières, les couleurs et les images, les sensations tactiles, olfactives et autres. De ces trop faibles éléments nous déduisons le réel et en faisons notre réalité. Le matérialisme, dans la physique newtonienne, propose que n'existe que ce que nous percevons et pouvons mesurer. Il affirme aussi par voie de conséquence, que ce que nous ne percevons pas, par essence, n'existerait pas, un peu à l'instar de la foi de Saint Thomas qui affirmait ne croire que ce qu'il voyait. Pourtant nous savons que c'est le processus inverse qui nous dirige.

La physique quantique nous a révélé que tout bouge, que tout vibre, que tout est fréquence et que ces fréquences sont ondulatoires, telles nos pensées, nos croyances, nos émotions, mais aussi la matière qui en est issue quand la fréquence s'abaisse suffisamment. Il en va ainsi de toutes les choses et du vivant. La matière n'est qu'une forme du réel, l'expression la plus basse de la conscience universelle, laquelle est l'univers.

"Tout ce qui est" est précédé d'une conscience, d'une pensée, d'une imagination mentale. Notre futur, notre présent, notre passé sont là dans l'immédiat présent de la conscience universelle. Il n'y a que l'immédiat, que d'aucun nomment l'instant présent. Tout le reste est construction mentale. Comme "tout ce qui est" est d'abord une pensée dont la fréquence est suffisamment ralentie pour devenir matière, ce que dès lors nos sens peuvent capter. Toute pensée est susceptible de devenir matière et d'être attrapé par une conscience, comme un récepteur radio capte la fréquence d'une émission.

Réciproquement, notre conscience est susceptible de capter toute vibration, toute oscillation, toute fréquence. C'est à dire que nous sommes susceptibles de capter tout ce qui précède, est ou succède à la matière de nos réalités. Tout ce qui est en matière ou en pensée, voire en intention ou en trace du réel, est susceptible d'être capté par nous-même, via notre conscience. A partir de là, nous comprenons l'idée de la prémonition, de l'intuition, de la médiumnité, etc. Il s'agit en l'espèce d'une captation du réel dans un large spectre de fréquence, plus large que ce que nous avons l'habitude de capter, de saisir de la matière.

Ainsi le temps n'existe pas. Il est la perception que nous avons du changement construit sur l'idée d'un avant et d'un après chaque situation, entité, posture, état, etc. Le temps n'est qu'une perception du réel, issu d'une logique linéaire, d'une mathématique qui nous est chère. Il ne s'agit en fait que d'une déduction projetée. Il n'y a qu'un immédiat bousculé de pensées du moment. Il n'y a de flèche du temps que dans la logique de notre perception. Elle reste une projection mentale. 

Pourtant, au quotidien, il nous faut psychologiquement un "avant" et un "après" autour d'un maintenant. Ainsi, l'idée du temps s'impose à notre mental comme une "intelligence" du réel. Dès lors le jour succède à la nuit laquelle succède au jour et ainsi de suite. L'été remplace le printemps qui suit l'hiver et l'hiver succède à l'automne, et cetera. C'est ainsi que tout peut être considéré cycliquement. Mais ce n'est là qu'une idée. Aussi la vitesse du temps dépend plus du nombre de succession d'états ou d'objets que d'une improbable physique du temps.

Toute réalité est une question de perception, d'intelligence, soit d'imagination de ce qu'est le réel. La meilleure perception du monde ne se fait donc pas via nos sens si limités mais par la connexion directe avec le réel, les vibrations et oscillations de l'univers entre pensées et matières, c'est à dire depuis la pensée jusqu'à la matière. Et cette pratique est la contemplation, la méditation, la non-pensée ou la captation directe du réel, etc.

Nikola Tesla avait bien dit que si nous voulions comprendre l'univers, il nous fallait penser en matière d'ondes, de fréquences et d'ondulations. Toute la réalité du réel est là, parce que toute matérialité est précédé de son idée, d'une pensée, d'un intention qui la constitue. Alors nous captons la totalité du réel, de la pensée, de l'intention qui la fait jusqu'à sa matérialité, sa manifestation.

Ainsi, nous sommes chacune et chacun de ce grand tout, parcelle de réalité dans un univers total, tous connectés, reliés à toutes choses dont nous sommes aussi. De là surgit l'idée vivante que nous sommes dieu, qu'importe le nom que nous lui donnons (univers, conscience, divin, totalité, etc.). Ainsi née l'idée de ce grand tout qui constitue l'univers, dont chaque parcelle n'est que la morsure du mot dans l'unité globale. "Le langage est la symbolique du réel" comme le supposait Lacan. 

Ce que nous pensons du monde n'est pas qu'une représentation mais l'outil de ses transformations. Tout est lié : nos pensées imaginaires et leurs manifestations matérielles. Ainsi va la boucle du réel : pensée, manifestations, matière, représentation et pensée qui modifie la manifestation et change la matière. 

De cela, nous comprenons la "mécanique" des miracles, des guérisons spontanées et de l'action des guérisseurs. Ce ne sont donc pas les gens qui guérissent, ni même aucun produit magique, mais la dynamique du réel animé de pensées, d'intentions et de croyances. L'ensemble de ces éléments constituent autant de visions du réel. Aujourd'hui la science s'intéresse très particulièrement aux guérisons spontanées et aux manifestations de la pensée, à son influence sur le réel. Je repense à l'excellent ouvrage de la journaliste scientifique américaine Lynne McTaggart dans son excellent ouvrage "La science de l'intention" (The Intention Expériment, Simon & Shuster Inc. , New York, 2007. Edition française : Ariane Ed. Inc. Canada, 2008)

Ainsi les communications interpersonnelles, avec d'autres entités du monde, comme les animaux, n'est qu'un bain dans l'univers, dans la conscience universelle. Rien de magique ni de miraculeux. C'est juste une question élémentaire de ce que sont le réel et ses usages.

Ainsi toutes les philosophies convergentes prennent sens dans notre mental. C'est la la signification de "Soyez le monde que vous espérez" de Gandhi, de "Croyez et vous serez exaucés" de Joshua, de "La foi déplace les montagnes" de Saul de Tarce, de "Tout est esprit" de l'hermétisme du Kybalion, de "L'observation affecte la réalité observée" en physique quantique, etc... Effectivement, si je pense la matière figée et définitive, elle le sera. Si je la pense dépendante de la pensée, elle le sera aussi. On peut revenir ici à Paul Watzlawick et à sa construction de la réalité : "Ce que vous pensez des autres tend à les faire le devenir". Cette évidence n'est pas que psychologique comme la pensée matérialiste peut le considérer.

Les divergence de vécus et de conceptions du monde ne sont pas que des phénomènes psychologiques non plus et nous en comprenons maintenant l'intensité et la portée. l n'en reste pas moins que la construction que chacun fait de son monde existe selon ses croyances, les comment et les pourquoi, que chacun produit la vie qu'il mène à ses conditions.

Mais alors que faire de l'amour et des émotions dont je n'ai pas encore parlé ici ? Ce sont le ciment de tout ce réel. La pensée a besoin d'être ressentie, profondément vécue, pour devenir créatrice. Si une petite clé peut ouvrir de lourdes portes, l'amour et autres émotions les ouvrent toutes. Comme l'écrivait saint Paul, "sans amour je ne suis rien". Nous préciserons que sans amour, je ne fais rien non plus. Je suis alors le plus impuissant de l'univers. Comme le disait Aristote et la sagesse grecque ancienne, c'est au fond de soi que se trouvent l'univers et les dieux. Ce qui est en haut est comme ce qui est en bas, nous disent les alchimistes. Tout est dans tout et toutes les sagesses convergent et se répètent.

Maintenant je pense que j'ai dit le principal, que j'ai évoqué l'essentiel sur le réel. A chacun de faire son chemin, dans et pour le monde qu'il souhaite à partir de ses intentions, de ses croyances et volontés, et par sa si puissante pensée imaginaire. Ce ne sont ni les chamanes ni les animistes qui me contrediront. Les portes du futur s'entrouvrent, le chemin se dessine, il ne nous reste plus qu'à avancer, lucides…

Jean-Marc SAURET
le mardi 25 mars 2025

Sagesse ? (18 03)

Le célèbre auteur Paulo Coelho nous invitait à ne permettre jamais à nos blessures de nous transformer en quelqu'un que nous ne sommes pas. Notre sagesse est bien de rester centrés sur ce que nous sommes au plus profond de nous même. Parfois, une intuition vient nous retenir, nous permettant ainsi de ne pas aller sur ce chemin, à ne pas fréquenter tel groupe de personnes, tel lieu ou à ne pas faire ce que nous étions sur le point de faire. Cette petite voix intérieure nous indique que nous ne serions plus en adéquation avec notre moi profond, si nous continuions à faire ces pas ci.

Parfois, nous en appelons à notre intelligence, à notre raison, pour savoir ce qui est bon, ou pas, pour nous. Mais dans notre culture néolibérale, l'idée que l'on se fait de l'intelligence est souvent bien trompeuse. L'intelligence ne s'évalue pas sur la base de collections ou de compilations de connaissances, mais sur la capacité d'en faire quelque chose quand on ne sait pas, quand l'habitude ne fournit rien. En d'autres termes, on retrouve ici cette aptitude que nous avons à reconnaître, à évaluer, élaborer et choisir entre des éléments, des objets, ou des liens symboliques, fonctionnels et structurels. Ce sont ces mêmes éléments qui nous portent à penser ou concevoir de nouvelles réalités.

La sagesse n'est donc pas l'intelligence. Elle est, comme l'on dit, dans la hauteur de l'âme, et des bons sentiments qui conduisent à l'amour, à la paix, à la joie. Il me revient ce paragraphe que j'avais porté dans mon bloc-notes : "Si vous souhaitez devenir spirituels, surnaturels, si vous souhaitez vivre pour la vérité et non plus mourir pour elle, vous allez devoir aimer quand tout le monde a peur, juge et rejette. Vous allez devoir pardonner quand tout le monde haït, juge et condamne. Vous allez devoir lâcher prise quand tout le monde propose la concurrence, le combat et la compétition. Vous allez devoir donner et partager quand tout le monde prend. Vous allez devoir aimer et lâcher prise sur vos représentations de vous même et du monde quand tout le monde croit détenir la vérité. Vous allez devoir comprendre que vous êtes participants d'une énergie collective qui fait que tout le monde dirige sans leader, sans hiérarchie, sans organisation, que le socle social et humain est directeur et que cette énergie s'appelle l'amour. Vos freins sont peut être la culpabilité, la honte, la peur, la souffrance et tout ceci est totalement de votre ressort. Soyez heureux et en paix et tout ira de soi !".

Cette sagesse est un devoir, sinon une méthode, mais elle ne constitue pas une finalité. Elle est notre moyen créatif, dépendant de notre regard sur nous même. Ce même regard intérieur s'avère si puissant que la suite, inéluctable, adviendra, tout simplement, tout naturellement. Nous ne sommes pas loin, ici, de l'immanence. Alors, quand nous n'arrivons pas à comprendre ce qui se passe ou ce qui nous arrive, c'est que nous sommes en présence de “plus grand que soi”. 

C'est à ce moment qu'il va falloir sortir de la nuit noire de l'âme. Cette situation, de fait, n'est ni soi, ni le réel. A partir de là, il va nous falloir croire en l'inconnu, cet inconnu qui s'apparente à soi-même. Ainsi, nous allons devoir admettre que nos émotions sont celles de notre joie, de notre beauté, de notre bonheur. Tout ce que nous avons à apprendre, en effet, est en nous. Comme le disait Socrate : "Quand j'apprends, je me souviens". Il n'y a rien au delà, et toute l'information est disponible pour tous. Chacun décide de la façon dont il va percevoir ces notions : ce peut être par le rêve, l'intuition, la contemplation, la méditation, la réflexion libre, etc... Chacun, ici, n'a que l'embarras du choix.

Mais regardons plus loin. L'égrégore est le domaine de la conscience de tout, par nous tous. Ce que nous sommes à l'extérieur est ce que nous sommes à l'intérieur. "Celui qui a fait l'extérieur de la coupe a aussi fait l'intérieur" nous rappelle l'alchimiste. Nous sommes faits de deux extrêmes, le domaine du matériel et le domaine du spirituel. Ce sont nos deux jambes, ces deux aspects que nous avons à considérer simultanément, et conjointement. Parce que chacun est le chemin, la vie, les moyens et la finalité. Chacun comprendra ainsi, son propre chemin à accomplir. Le partenaire de chaque personne est l'univers lui-même.

C'est à ce moment que je me replonge à méditer quelques aphorismes notés ici et là, dans la mesure où ils m'ont touché à un moment ou à un autre :

- Je suis la puissante sagesse et l'intelligence créatrice partagée. Je suis ce que je suis !

- Je suis l'univers de puissance, de création et de connaissance. J'accueille fécondité, providence et abondance, matérielles, intellectuelles et spirituelles, en toute gratitude, générosité et reconnaissance ! Merci, je t'aime, je partage et redistribue.

- Nos pensées et nos mots sont les architectes de notre réalité, tissant le tapis sur lequel nous marchons chaque jour. (Neville Goddard)

- La spiritualité n'est pas la religion. Elle est la science qui permet de comprendre l'esprit des êtres et des choses. La physique quantique nous en ouvre les portes de sens et d'études. (Dr Thierry Janssen)

- Nous vivons dans une culture de l'emballage qui méprise le contenu. (Antony Hopkins)

- Un ami est celui qui te défend dans ton dos, le reste n'est que du bavardage... (Mark Twain)

- Vous n'êtes pas une goutte dans l'océan mais tout l'océan dans une même goutte. (Dalaï Lama)

- La puce sur le chien croyait que le chien lui appartenait et qu'elle était le maître des lieux... Ainsi sont les hommes sur la terre. (Réponse chamaniques à l'occident)

- Ceux qui se fient à leur richesse tomberont, mais les justes s'élèveront et prospéreront comme une feuille verte. (Livre des Proverbes 11.28)

Nous pouvons terminer cet article par une conclusion plutôt optimiste ! En effet, nous pouvons nous "guérir" et nous révéler à travers une autothérapie particulièrement simple : tout passe, et transite en effet, aussi bien par le corps, le cœur que par l'imaginaire. Je reviens encore une fois sur la façon de rêver une situation pour la résoudre. J'avais traité de l'exemple du jeu de rugby dans la cour de l'école pour résoudre une situation que je ne savait pas gérer : passer mon copain René et éviter qu'il ne m'attrape. De la même façon, le bonheur est une mise en "flow" de notre mental lors d'une activité particulièrement prenante, où le temps disparaît, en même temps que la sensibilité aux besoins essentiels. C'est dans cet état second que le monde change avec nous.

Alors pratiquez mentalement cette activité qui vous passionne même si les bras et les jambes vous ont abandonné. C'est bien l'alliance de l'imaginaire (hypothèses rêvées "sensorialisées ou émotionnalisées”), et du corps (sensations concrètes) qui donne toute la puissance de la transformation. Je renvoie ici au principe de l'autothérapie de révélation de soi, une kinesthésie universelle dont j'ai déjà parlé lors d'un précédent article.

"C'est bien parce qu'on ne peut pas changer les autres et que l'on ne peut que se changer soi-même que c'est dans le lâcher prise en situation que la vie nous offre ses plus beaux cadeaux." nous dit Julia Rautenberg. Ailleurs, le polytechnicien François De Witt nous indiquait que "L'intuition est le murmure de l'âme." Encore faut-il l'entendre, y prêter attention et l'écouter entièrement…

Mais retournons aux sagesses anciennes qui nous disent que, si la douceur est invincible, pourquoi user de la violence en cas de crise ou de conflits ? C'est là une pensée très proche de celles de Marc Aurèle, l'empereur stoïcien. Comme Socrate, Platon et Aristote nous ont invités à retrouver au fond de soi l'univers et les dieux, l'auteur Laurent Gounelle nous invite à "chercher le divin en soi plutôt que le diable chez les autres". c'est là un premier pas reliant la sagesse des anciens et celles contemporaines. Ainsi, nous nous souvenons de cet aphorisme que nous proposait Carl G. Jung : "Ce à quoi je fais face s'efface. Ce à quoi je résiste persiste".

Il est un fait : la croyance n'a rien d'exclusivement religieux. Elle n'est qu'une pensée structurante de nos comportements, de nos rapports sociaux et au monde. Qu'importe que nous croyions en une puissance, une personne, une représentation ou autre. C'est le fait de croire pleinement et sereinement qui est efficient, et tout humain est inscrit dans le langage, lequel donne existence et sens aux objets, aux phénomènes et aux autres choses nommées. C'est un système de croyance qui rend présent ce qui n'est pas là, l'inscrit dans l'espace et le temps, lesquels n'existent que dans et par le langage.

Ce ne sont pas les choses qui nous arrivent, ni les choses que l'on consomme qui nous font du bien ou du mal, mais le fait que la relation que nous avons à ces choses est inscrite dans notre système de croyance. C'est cette relation qui dicte le sens que nous en avons. L'intelligence c'est de voir et savoir faire des liens. Il y a là quelque chose d'organique. L'intuition, quant à elle, est de l'ordre du psychique. C'est juste une question de sens...

Notre pensée est un “construit de sens”, une construction dans un système de croyance qui organise les rapports des choses entre elles, dont nous-même, et ainsi impacte le réel. Tout ce qui rentre dans nos représentations s'ancre sur ce qui est déjà là. Notre intelligence n'est que l'ouverture à ce phénomène. C'est là quelque chose de la théorie des représentations sociales donnée par Serge Moscovici et Denise Jodelet. Tout ce qui est nouvellement apparu, s'ancre sur ce qui appartient déjà à notre pensée. Tout ce que nous abordons et rencontrons ainsi, à travers cette vitre, peut être alors perçu. Il devient "objet pour nous". On appelle ce phénomène l' "objectisation" du réel.

Nous n'avons pas naturellement conscience de ce large phénomène de réalité, car nous sommes aussi un objet du système. Nous sommes dans et de la "matrice". Deux voix conjointes nous permettent de prendre du recul et de nous en rendre compte. Disons le une fois de plus, ce sont l'intuition et la déduction. Il s'agit bien là des voies essentielles de la spiritualité et de la rationalité. Ce sont ces deux mêmes voies qu'Einstein ou Poincaré disaient convoquer dans l'exercice de leurs travaux, recherches et découvertes. C'est ce que l'historien des sciences, Michael Shermer nomme "la prière scientifique". Ce sont, redisons le, nos deux jambes dans la marche vers la connaissance.

Dans les pratiques de guérison, nous retrouvons les deux mêmes champs combinés : la prière scientifique (ou dimension spirituelle) et la pratique méthodologique (ou dimension rationnelle). Dans la prière scientifique le sujet visualise ce qu'il souhaite voir advenir comme si c'était déjà là. Il s'agit d'une prise de conscience mentale. La pratique scientifique, ou méthodologique, consiste à nommer les choses et à les situer dans notre cosmogonie, afin qu'elles existent, s'y installent et se trouvent "calées" dans notre environnement, dans notre contexte. 

Cette "prière scientifique" consiste aussi à abandonner les objets inutiles ou contrintuitifs. De fait, par le langage nous nous ouvrons deux champs : celui de donner à la chose la possibilité d'exister dans notre cosmogonie et celui de nourrir notre champ intuitif. Nous pouvons ainsi concilier le fait d’être soi-même, "dieu créateur", mais aussi celui d'être humain (ce qui dans quelques cultures revient au même). Cette combinaison nous permet de jouer avec les choses, de les comprendre, et partir de là, d’en faire autre chose. C'est très certainement l'harmonisation de l'intuitif et du raisonnement qui conduit à l'efficacité de la pratique, comme elle conduit à l'efficience scientifique selon les descriptions des mêmes Einstein et Poincaré.

A partir de ces prémices, l'exercice de raison permet de justifier l'intuition scientifique, tout comme la raison permet la pratique normative de l'intuition spirituelle, dans la guérison. Ce n'est pas le praticien qui efface le mal, mais la croyance du patient dans le processus. Si celui-ci pense que le médicament le guérit, alors il guérit. S'il pense que le processus "magique" le guérit, alors il guérit aussi. Mais s'il commence à penser que le médicament ou le processus magique n'y sont pour rien, alors le patient rechute. Nombre d'approches indiquent que c'est la conviction du patient qui le soigne, c'est à dire sa croyance, sa foi, quel que soit l'objet de sa croyance.

Des recherches dans ce domaine nous indiquent que le patient à besoin de cet environnement favorable, voire magique, pour qu'il active sa propre guérisons. Des chercheurs, des thérapeutes, des psychologues et autres praticiens parlent d'influencer ou de programmer le subconscient du patient. Serait-ce là une façon de s'accorder avec la culture du moment ? Certainement... Certains autres tentent d'apporter des preuves au fait que leur modèle est bien réel ou efficace. C'est alors "rationaliser" la croyance. Et ça marche aussi.

Si aujourd'hui, nombre de patients sont soignés par hypnose et suggestion, c'est que rationnellement ils ont "compris" la démarche et l'ont accueillie comme "vraie". Ainsi, la sagesse n'est pas d'avoir raison mais de croire. Elle n'est ni rationnelle ni spirituelle mais dans l'harmonie des consciences. "Rien n'est plus vrai que ce que l'on croit", dit le sage. La sagesse réside donc dans la prise en compte des consciences rationnelles et spirituelles des personnes inscrites dans une culture articulée dans un langage. C'est la prise en compte de la symbolique culturelle qui rendra la démarche efficiente. Et si la culture change, les croyances évoluent aussi. C'est à ce moment que les pratiques de soin et de connaissance se transforment aussi.

Il y a encore quelques années, il était impensable que des médecins et des personnels de santé utilisent la sophrologie, l'hypnose et le "reboutage" pour aider les malades à guérir ou, au moins, à ne pas souffrir. Il était impensable que les professeurs adressent leurs malades traités en radiothérapie, à des coupeurs de feu ou faiseurs de secrets. Effectivement les sagesses suivent l'évolution culturelle des certitudes ou croyances et des représentations sociales.

Etre sage, avoir la sagesse, réside donc dans l'humilité, l'abandon de ses dogmes et pensées toutes faites, fussent-elles venue d'en haut. Elle est dans l'ouverture à toutes les possibilités, à l'aune tant de son cœur que de sa raison. “La” sagesse est à ce prix.

Jean-Marc SAURET

Le mardi 18 mars 2025

L'être occidental est-il vide (11 03)

La conception néolibérale de l'être humain n'a rien de profond. Elle repose essentiellement sur l'intérêt et l'apparence. Elle semble se réduire donc à l'enveloppe, à l'emballage, à la matière qui la tient debout. Le culte du paraître recouvre toute la personnalité, du maquillage à la gestuelle jusqu'à d'autres charmants comportements à vocation séductrice. Cette culture évite totalement le fondamental : c'est à dire ce que nous sommes vraiment. En l'espèce, personne ne sait répondre à cette question apparemment incongrue : Qui suis-je réellement... voire qui es tu ?

"Nous vivons dans un monde où les funérailles sont plus importantes que les défunts. Le mariage s'avère alors plus important que l'amour, et l'apparence est plus importante que l'âme. Nous vivons dans une culture de l'emballage qui méprise le contenu" écrivait Antony Hopkins. Ce à quoi il ajoutait de surcroît : "Ma philosophie est : ce que les gens disent de moi ne me regarde pas. Je suis qui je suis et je fais ce que je fais. Je n'attends rien et j'accepte tout. Et cela rend la vie plus facile."

Je partage ce propos,  et je dis moi même que "Ce que l'on dit de moi ne me concerne pas. Cela ne concerne que ceux qui le disent. Occupons nous seulement d'être à chaque instant en accord avec nous-mêmes.". Ceci nous renvoie à la profondeur de notre être réel, tellement absent de cette culture néolibérale.

Mais puisque notre culture néolibérale est matérialiste, elle n'entend que ce qui se prouve, se compte et se mesure matériellement, rationnellement et intellectuellement. Cependant parlons un peu des travaux du géologue et anthropologue américain Greg Braden. Intéressé par la relation entre la science et les priorités culturelles de peuples premiers, il a découvert que le cœur était non seulement couvert de neurones mais que celui-ci conversait avec le cerveau, l'enjoignant à des décisions, des actes et des postures. 

Dans l'antiquité égyptienne, le cœur était l'organe premier de l'être humain. Il était l'organe où se prenaient les décisions,, mais aussi le siège des impulsions à l'action. C'était aussi le cas dans bien d'autres culture anciennes. C'est encore le cas dans les cultures animistes actuelles. Culturellement, le cœur est le centre affectif du corps humain. De fait il est aussi le siège des émotions et donc de l'intuition. Nombre d'études sur l'intuition rejoignent cette représentation et la confortent.

Mais l'être occidental néolibéral a privilégié la rationalisation. Il a abandonné la force de l'intuition et de l'imaginaire, lâché le cœur pour le cerveau, perdu l'intuition et l'émotion au profit de la logique déductive de l'égo. Bien sûr, comme le présentait Aristote, la mathématique permet de comprendre des relations entre des parties et leur rapport au tout, mais ce n'est pas là toute la réalité. Elle la représente et pour partie seulement.

Ainsi, les liens entre le cerveau, le cœur et le langage sont d'une efficience remarquable et remarquée puisque étudiée. Depuis des générations, dans des temps anciens, ceux qui nous ont précédé ont compris et développé intuitivement cette relation. Ils ont reconnu dans la parole et les mots des compétences à procurer confort, guérison, force et puissance intérieure. Le mots est, selon ces anciens et quelques contemporains, la porte, voire l'outil, magique sur le réel. Ces habitudes et usages sont parvenues jusqu'à nous dans les pratiques ordinaires de soins et de guérisons utilisées par ceux que l'on nomme rebouteux, guérisseurs, faiseurs de secret ou coupeurs de feu. Ce sont des prières, des mantras, des incantations, des récitations, voire des textes sacrés qu'ils nous ont transmis avec une capacité d'adaptation à notre actuel culturel. Ils sont la magie par les mots car ils permettent aux praticiens d'atteindre la conviction requise pour que le cœur donne et que la magie opère.

L'être ancestral véhiculé dans ces cultures paysannes et populaires est très vivant parmi nous, dans l'incrédulité même de ceux qui en profitent. Pourquoi ? Parce que l'être occidental, celui qui demeure le fils du siècle des lumières, est vide. Imprégné de la logique de rationalité, il a aussi perdu la raison car il a perdu la conscience de son centre de pouvoir et d'intelligence, de réception des connaissances. Seule la logique vient jusqu'à balayer le pas de sa porte. Il a effacé son cœur, là où siège son âme, son être profond.

Jean-Marc SAURET

le mardi 11 mars 2025


Du religieux (04 03)

Après l'approche sur la construction de l'identité sociale, il paraît utile d'approfondir le champ du religieux. Sociologiquement, me semble-t-il, il y a encore beaucoup à dire. Ce dont on parle, sous le vocable de religieux, relève de caractéristiques philosophiques, morales, structurelles et organisationnelles. Derrière cette appellation, on retrouve la présence de convictions d'éléments dogmatiques et de croyances en rapport avec le "réel" qui les sous-tend. Le religieux ne relèverait donc pas d'un "réel absolu" mais d'une conviction de réalité partagée. On retrouve ici des représentations communes du monde : elles sont de l'ordre de la croyance, de récits et de la conviction, hors de toutes rationalités (du moins que la rationalité n'explique pas et dont elle est écartée). Il existe deux origines étymologiques et latines à ce mot "religion" : elles me semblent tout à fait légitimes l'une et l'autre tout en témoignant de postures distinctes qu'il me semble voir se succéder dans le fait religieux.

Les termes sont ceux de "religerer", la relecture du réel, et "relegarer", la reliance des personnes sous une même "vérité" relue communautairement comme vu précédemment. Effectivement, comme le dit très justement Carl G. Jung, il y a dans le fait religieux quelque chose de l'expérience numineuse, et donc d'un rapport à une existence divine qui sidère et ravive à la fois. Ainsi il faudra des mots pour le dire afin que le message soit partagé, échangé, considéré et assimilé. Le "religerer" est donc bien ici une relecture du numineux qui "dit" le monde sous un regard singulier.

Je repense à la naissance du christianisme, par exemple, qui se retrouve autour du fait que le "royaume des cieux" est en chacune des personnes. C'est donc une "loi" qui régit leur réalité. Elle est celle de l'amour universel. Je ne crois pas trop me tromper si l'on relit les textes des évangiles comme le sermon sur la montagne, par exemple. Le soucis politique que pose cette nouvelle religion, cette nouvelle relecture du réel, est que cette vision du réel exonère le praticien de toute obéissance et soumission à tout pouvoir temporel, extérieur à soi-même et au groupe des fidèles. Pour cela cette petite religion fut fortement combattue et ses adeptes persécutés dans la mesure où elle représentait une menace pour les ordres temporels établis.

Cela dura jusqu'à ce que - nécessité oblige - l'empereur Constantin voulut trouver une religion suffisamment  porteuse de sens pour refaire une cohésion de l'empire romain décadent. Il se tourna alors vers cette petite religion, à laquelle il ne se convertira d'ailleurs que sur son lit de mort. Il s'appuya sur la conception d'un certain Saul de Tarse - dit Saint Paul par la suite -lequel n'a d'ailleurs jamais rencontré Joshua, dit Jésus. On suppose aussi que Saul de Tarse était maladif, impuissant et complexé. C'est cet état réputé morbide qui aurait été à l'origine (voire le fondement) de la substitution de l'amour et du partage, centraux dans les propos du fameux Jésus, par la glorification de la souffrance et la rédemption par celle-ci. L'être n'est plus un fils de dieu porteur actif du temple intérieur mais un pécheur à "sauver", en besoin de rédemption pour qu'il puisse connaître une éternité heureuse. Je n'irai pas plus loin dans l'analyse de cette mutation, respectant les croyances de chacune et de chacun. D'autres recherches ont déjà analysé et développé ce point de vue.

Qu'avons nous donc perdu de l'essentiel du propos de Joshua ? Nous savons de cette doctrine à son origine, comme dans les sagesses orientales et anciennes, que "la gratitude est la richesse et la plainte est la pauvreté". Nous comprenons aussi que la finalité de l'univers qui est aussi son outil de réalisation, est l'amour sincère, profond et inconditionnel de soi-même et de tous (puisque chacun est relié à tous et à tout). Le pardon y est un cadeau que l'on se fait à soi-même pour que continue l'amour. Compassion et altruisme sont les valeurs sociales du monde meilleur à venir. La bonté sera notre premier pas. Voilà qui est bien loin de la religion paulienne de Constantin...

Dès lors, à la constitution de cette religion de la croix, la finalité fut de rassembler les peuples obéissants autour de Rome. Lors du concile de Nicée, les docteurs et prélats retenus et convoqués posèrent les dogmes et les textes sacrés de la nouvelle religion. Ici, c'est l'étymologie du "relegarer", du relier et rassembler sous l'effigie de la croix, de la primeur à la souffrance et d'une morale d'obéissance et de soumission qui émerge. Il s'agit de l'encadrement de fidèles autour de dogmes et textes sacrés qui fondent dès lors la religion. L'objectif de Constantin était de "faire peuple". Ainsi, les textes fondateurs sont triés et ne sont conservés que ceux compatibles avec la doctrine de Saul de Tarse, celle de l'obéissance et de la soumission aux dogmes de croyance, bien plus adaptés au projet politique de Constantin. Ces prélats eurent l'intention de détruire tous les textes désormais dits apocryphes, comme les évangiles de Judas, Thomas, Marie ou Nicodème. Il faudra attendre les découvertes archéologiques récentes de Qumran  et de Nag-Ammadi pour en avoir une connaissance réelle.

Si ce récit historique se révèle réel, voire vrai, alors, cet exemple montrerait que dans un mouvement de création, la religion se construit sur un lecture singulière du réel. Elle apporte du sens et produit les symboles qui le portent. Ensuite, dans un mouvement de conservation, on perçoit que la religion se figerait dans les formes et les pratiques comme les tabous et les totems, les obligations et les interdits. Ils ont vocation à cadrer les comportements sociaux des sujets-disciples autour de représentations dogmatiques communes. "Quand le sel s'affadit", la religion passe du "religere" au "relegare", du montré aux contraintes, du dit à l'interdit, du "donner du sens au réel" à "l'agitation du risque de la perte et de l'exclusion". D'aucun pensent ces processus concomitants. Je ne connais pas réellement leurs raisons.

Mais l'humain a besoin de sens, et donc de croire car c'est le langage qui l'installe dans ce phénomène psychique. C'est là toute la part du symbole. La personne humaine a besoin de "savoir le sens d'elle-même ici, du monde et de leur devenir", afin qu'elle puisse s'émanciper du processus de "l'avoir", celui qui, justement, lui fait perdre jusqu'au sens d'elle-même. Ce processus global "perdre et acquérir" la met à distance d'elle-même, de son moi profond, dès lors en dépendance profonde à son environnement matériel. Il semble que ce soit là qu'un changement de sacré intervienne.

Ainsi les deux étymologies ont chacune leur réalité mais dans des temporalités et des intérêts donnés. Elles ne s'excluent ni ne se complètent. C'est ici une courte remarque sociologique dont on pourra se servir pour comprendre les évolutions sociétales, comme l'état des religions dans leurs orthodoxies, leurs dérives et leurs hérésies. Et pour ouvrir vers d'autres horizons, Albert Einstein précisait que "un peu de science éloigne de dieu. Beaucoup y ramène" car l'essentiel au cœur de tout reste l'amour ! A méditer ? Certainement... Ainsi le spirituel n'est pas le religieux, et ceci est un autre questionnement.

Jean-Marc SAURET
Mardi 4 mars 2025




La part identitaire de la structure sociale (25 02)

Lors d'un repas de retrouvailles en famille, l'un de mes frères, pour lequel j'ai une grande considération pour la qualité de ses connaissances et la profondeur de la réflexion, expliquait que l'origine des juifs ashkénazes tenait d'une conversion par contacts interpersonnels de populations est-européennes avec des juifs venue du sud. Je tentais de l'informer que si les juifs ashkénazes étaient des caucasiens, ils étaient les Khazars, peuple semi nomade du nord du Caucase. Leur conversion n'avait rien de "laïcarde", c'est à dire relevant de processus individuels, de choix personnels dans des conversions de grés à grés, soit par "contamination", mais d'une stratégie politique de leurs chefs vers 860. Ceux-ci souhaitaient se soustraire aux influences des musulmans au sud et des chrétiens orthodoxe au nord et donc ils choisirent pour leur peuple le judaïsme comme la religion de leur ethnie. 

Mon frère n'en convenait pas et insistait sur l'hypothèse d'une conversion par "contamination sociale". Je tentais d'évoquer la fonction politique du religieux dans la vie sociétale, et que le principe laïcard de croyance religieuses personnelle, de conversions individuelles, était une notion très contemporaine, loin des fonctions identitaires et structurelles qu'avaient les religions à cette époque ancienne. Son étymologie, justement, vient du concept latin de "relegare", soit de réunions identitaires autour de partage de croyances, voire de "vérités" (j'y reviendrai dans un prochain article). Je n'ai pas su, ou pu, dire tout cela et j'ai donc lâché prise. Parfois, je préfère la paix à avoir raison, raison qui alors ne sert à rien...

Il me souvient bien que l'empire romain s'est construit sur cette capacité culturelle singulière à phagocyter dans leur panthéon les dieux des vaincus. Ils ont commencé la démarche avec les grecs et elle a parfaitement fonctionné. En effet, avant que les religions ne soient considérées comme dimensions personnelle dans notre occident républicain, les dieux étaient d'un peuple et leur fonction était de le protéger, de le rendre fort et dominant. Une guerre était avant tout un affrontement de divinités protectrices. Nous retrouvons cette notion aujourd'hui avec le développement de ce que nous nommons "l'Islam politique". 

Si le christianisme (protestant et catholique) et l'islam soufi se sont développés facilement en Afrique de l'ouest, c'est d'abord parce qu'ils étaient portés par des civilisations prospères. Ainsi, à leur habitude, les vainqueurs détruisaient les symboles de la religion des peuples vaincus (ce qui s'est produit en Afrique) de manière à "relier" ces dits vaincus au système de croyance et de protections spirituelles des conquérants dominants. Il s'agissait donc d'assimiler (voire de phagocyter) les vaincus à leur propre identité avec un statut d'accueil. Nous devons donc bien dissocier nos représentations religieuses de notre conception individuelle et "laïcarde" occidentale, voire même plutôt bien française. C'est là notre propre choix politique mais la sociologie nous rappelle que ce ne sont là que nos représentations constituant notre propre doxa.

Alors bien des conséquences structurelles découlent de cette réalité sociologique. La notion de leader vient de ce besoin d'incarnation de la "vérité". Quelqu'un doit la porter et la représenter pour que tout un peuple s'en nourrisse. Voilà pourquoi César était dieu. Je repense aux ouvrages de l'ethnologue Claude Rivière qui a nourri mon enseignement et ma réflexion en Sorbonne : "Les liturgies politiques" (1988) et "Les rites sociaux" (1995) notamment. La religion n'est donc pas une affaire individuelle, ni ne relève de croyances personnelles, mais est l'expression structurelle et politique d'une identité sociale partagée dont les rites témoignent et en perpétuent la doxa.

Dans ces conditions, la fonction de leadership relève de cette logique de croyance et d'appartenance. Conjointement, le followership, développé à la Carnegie Mellon (Pittsburg, PA) par le professeur Derek Wordley, est cette démarche de productions contributives à une démarche portée et développée par d'autres avant qu'ils ne deviennent eux-mêmes leader de quoi que ce soit. Ainsi Mandela était un follower de Martin Luther King, lequel était un follower de Gandhi avant de devenir l'un et l'autre leaders de leurs communautés, et ce dans un habillage identitaire et légendaire. Ainsi, il est nécessaire à n'importe quel leader d'avoir d'abord été un "militant", comme on dit ici, avant de porter un projet quel qu'il soit. Pour être crédible il faut tenir de quelqu'un, d'une légende (voire d'une œuvre), d'une vision de la réalité et d'une doxa portée dans un discours dont il se doit que le repreneur soit légitime... (je renvoie à mes articles dans ce blog sur le leadership).

Ainsi, les structures religieuses, avec leurs rites et leurs liturgies, sont particulièrement présentes dans toutes sociétés, fussent-elles républicaines et laïques. Elles ont chacune leurs récits génériques, fussent ils écrits ou transmis oralement. Ils sont le socle de la représentation sociale de la réalité, celle qui fait vérité et en organise et structure la doxa. (c'est peut être pour ce type d'identité que les juifs d'Israël considèrent les Ashkénazes comme descendant de juifs d'Israël)

Ainsi, il est normal de voir apparaître le principe d'exclusion, d'anathématisation et de disqualification de toutes personnes ne reproduisant pas la doxa officielle. Il existe aussi des réflexes rétroactifs irrationnels comme celui-ci entendu lors d'une conversation : "Cet auteur n'est pas clair. Il a même été exclu de l'université et ce n'est certainement pas pour rien qu'il l'a été !". On ne débat donc plus des raisons et arguments posés mais de la légitimité de l'auteur des propos. On peut retenir encore ce propos des plus ordinaire actuellement "C'est un complotiste antivax ! " ou encore "S'il s'est fait éjecter de son milieu professionnel, c'est bien qu'il a du en faire pas mal...". Le fait qu'il interroge la doxa n'est pas évoqué. C'est là un sacrilège, preuve de sa marginalité ou de sa "sortie de route"...

Nous assistons, lors de cet effondrement de l'occident, à la réémergence de ces structures "doxales" avec les discours de vérité qui les sous-tendent, fussent-ils in-historiques ou non-scientifiques, voire illogiques, imaginaires ou même mensongers. Plutôt dénigrer le porteur du message que de mettre ses arguments au débat. En l'accusant d'être déviant ou par d'autres "maux" disqualifiants. Nous sommes passés de l'effacement de la contradiction à la négation du contradicteur.  Alors le débat est clos...  Nous apprécions là le poids de la structure sociale dans la fonction identitaire.

Jean-Marc SAURET
Le mardi 25 février 2025

Lire aussi " Ce que l'on pense des gens les détermine "


Ni gauche ni droite mais libertaire (18 02)

Nous assistons dans ce monde politique à un affrontement calomnieux entre gauche et droite. Cela ne date pas d'hier, mais le procédé se renforce. La droite accuse sempiternellement la gauche d'idéologisme sectaire et d'irréalisme. De son côté, la gauche accuse la droite d'in-humanisme avec sa cohorte d’homophobie, d’antisémitisme, de dirigisme et de totalitarisme. Les uns comme les autres accusent leurs adversaires de mensonges, et de tromper les gens à des fins de guerres politiciennes. Donc, on ne débat plus sur les sujets à force d'arguments. On disqualifie l'autre à force d'insultes, d'imprécations et de jugements de valeurs, tout en jetant ainsi l'opprobre. Cette posture catégorique se retrouve à l'origine d'accusations littéralementhors sol. Il est loisible alors d'y associer, tant les anathèmes préalables, que la construction de défenses préventives où chacun protège le confortde sa vérité. Nous voilà revenus aux jeux du cirque, où les vraies victimes sont les gens eux-mêmes, destinataires des propos.

Comme je n'ai pas d'enjeux, la seule chose qui dirige mon jugement est effectivement la recherche de la vérité et donc je scrute ces comportements avant de prononcer, ou pas, mes choix. Il est donc fréquent que mes réactions et opinions soient jugées parfois de gauche et parfois de droite. Je ne suis pourtant ni de gauche ni de droite. Je le redis ici, je suis un libertaire proudhonien, cette démarche libertaire qui repose sur le fait que chacun définit sa place et son rôle en humanité selon ses valeurs. C'est de fait ça l'humanisme. 

Aussi, j'ai du mal à comprendre qu'on ne fasse pas confiance aux gens du peuple pour comprendre ce qu'il se passe et leur permettre d'en décider. Je ne comprends pas que des dirigeants, sensés défendre et représenter le peuple, le trahissent constamment, l'empêchent même de s'exprimer, ne reconnaissent pas l'expression de ses choix et aussi, de plus, le combattent même. Ceux-là se rendent de ce fait illégitimes et devraient donc partir...

Il me semble que ce reproche fait aux gens "d'en bas" de ne pas être adultes ou de ne pas comprendre la réalité, et donc de faire de mauvais choix, est une insulte anti démocratique. "Vous avez mal voté, on fera ce qui qui est bon !". Comme s'il y avait un camp du bien et un autre démoniaque et stupide. Pour ma part, j'ai tendance à prendre pour démoniaque tout comportement qui ne respecte pas les gens.

Si la démocratie est le gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple, alors il convient d'une part de le laisser s'exprimer librement selon ses propres modes et agendas et d'autre part de faire en fonction de ce qu'il exprime. Il est en effet absurde d'imaginer qu'un peuple doive forcément être gouverné. Il me revient cette phrase d'Yvon Gattaz à propos de management : "Mettez plus de contraintes et vous aurez plus de tricheurs." Dont acte ! L'histoire montre que ce sont des minorités avides qui imposent leur pouvoir sur d'autres, que personne n'en a besoin ni ne le demande... sinon parfois seulement pour d'autres. Je repense à toutes ces expressions de la même chose : colonialisme, totalitarisme, esclavagisme, escroquerie, absolutisme, exploitation et néolibéralisme...

Tout se passe dans ce bas monde comme si le pouvoir "indispensable" revenait de fait et de raison à une élite laquelle serait en droit de diriger seule et donc de décider. Tout se passe comme s'il y avait un camp du bien et les autres considérés comme quotités négligeables, et qui n'auraient donc pas à être consultés ni entendus. Tout se passe comme si le peuple était stupide, idiot, inéduqué, voire abruti. C'est là le peuple dont rêve le néolibéralisme et qu'il tente de mettre en conformité pour mieux s'en servir et l'exploiter contre lui-même.

Alors oui, mes choix ne sont ni de droite ni de gauche, d'aucun courants idéologiques auxquels je n'accorde ni confiance ni pertinence. Le libertaire que je suis depuis mon adolescence pense librement en toute réflexion et analyse. La seule question qui me vient devant l'expression d'une opinion que je ne comprends pas est : "Qu'est-ce qui vous le fait dire ?" L'absence de réponse consistante, ou quelque peu construite, m'indique une opinion irréfléchie, relevant peut-être d'adhésions émotionnelles à des prêts à penser ou autres pensées courtes. Si le débat nourrit, la juxtaposition d'anathèmes rend idiot et agressif. D'où ma préférence à avoir la paix plutôt que raison...

Gardons toujours clairement à l'esprit que l'autre est un autre soi-même avec des représentations issues de son vécu, de son frottement avec les milieux où il vit, et a vécu, avec les événements qui l'ont pétri et où il s'est fabriqué et a nourrit des représentations à l'aune d'intérêts, d'enjeux et de désirs. Seule la raison de débats ouverts peut faire bouger et déraciner ces opinions bien ancrées. Mais, la plupart du temps ledit débat est remplacé par un affrontement d'opinions, un combat de protection de sa propre raison et de ses certitudes, sans recherche aucune ni aucun goût pour la réalité et la vérité profonde... Pourtant, la démocratie passe par cette acceptation de ces postures, opinions et positions diverses dans le débat, à condition qu'il y ait débat, bien sûr, une condition "sine qua non" assurément.

Jean-Marc SAURET
le mardi 18 février 2025

Lire aussi : "Aime et fais ce que voudras"



Vers une autothérapie et la révélation de soi (11 02)

Avant toutes réflexions sur le développement personnel, rappelons qu'en matière d'identité nous sommes pour une large part une construction sociale. Nous allons donc retrouver ici, d'une part le fruit d'interactions avec les autres et notre environnement et d'autre part, comme nous l'avons vu, une conviction plus personnelle d'ordre culturel ou imaginaire. Me reviennent aussi ces mots de sagesse que l'on retrouve dans le bouddhisme, dans l'hindouisme, dans l'animisme comme dans la psychanalyse lacanienne : sans les autres, je ne suis pas. Nous ne sommes que de l'autre qui me nomme, me caractérise, me reconnait ou pas, d'une forme ou d'une autre. Ceci me rappelle la phrase du philosophe Alexandre Jollien "Sans l'autreje ne suis rien, je n'existe pas, autrui me constitue comme il peut me détruire." 

Certes, mais à la condition que je fasse miennes ces appréciations extérieures. Il en va de même de l'environnement tant culturel que matériel. Nous ne sommes que la conséquence d'un environnement économique et social, porteur de valeurs et de récits de vérité que nous avons accueillis et même incorporés.. Cet environnement nous façonne comme il conditionne nos représentations de soi, de l'autre, du monde et de soi dans le monde, dès lors que nous l'avons accueilli. Cela étant, nous gardons en conscience que le soi est révélé par cette construction duale et interactive, tout en restant au creux de notre âme.

A force de pratiques méditatives, intellectuelles et morales, nous comprenons qu'en matière de soins de soi et de développement personnel, tout passe par le corps depuis l'imaginaire. Ce sont deux voies parallèles, coopérantes, contributives et concomitantes. Je repense encore une fois à la façon de rêver une situation pour la résoudre. J'ai déjà traité de l'exemple du jeu de rugby dans la cour de l'école.  Je voulais résoudre une situation que je ne savait pas traiter : en l'espèce, “passer mon copain René et éviter qu'il ne m'attrape. Imaginer ce moment et le revivre en situation dans ma tête, fut très apprenant et le résultat très efficient. La réinvention du "raffut", ou cette stratégie du "chassant vers le bas" se sont avérées déterminantes. C'est bien là le processus de création que nous pouvons utiliser à souhait.

Il en va de même pour ma santé et la visualisation de "ce qui m'attend" tant dans le désir que dans la soumission. C'est aussi ce qui construit ma santé dans son évolution. De même, le bonheur, selon la longue étude du psychologue hongrois Mihály Csíkszentmihályi, est une mise en "flow" mental dans une activité particulièrement prenante. Dans ce phénomène le temps disparaît, tout comme la sensibilité aux besoins essentiels (boire, manger, dormir...). Dans une pratique savoureuse, le candidat au bonheur entre dans un état second (qui ressemble à la méditation du moment présent) où le praticien est tout à sa pratique, absorbé en elle, loin des sensations des contraintes physiologiques ordinaires.

C'est dans cet état quasi second que le monde change avec nous. Dans ces conditions, nous pouvons pratiquer mentalement cette activité qui nous passionne, même si les bras et les jambes nous ont abandonnés. En effet, mentalement tout devient possible et plus que "réel". Le cerveau qui nous commande ne fait pas de différence entre une expérience vécue et une rêvée. Pour cela, j'utilise la formule consacrée : ''Je suis déjà là'', comme si cet état que j'espère m'était déjà acquis, et spirituellement, il l'est.

Ceci me rappelle aussi la découverte et l'apprentissage du pouvoir de l'hypnose par Milton Erickson alors paralysé. C'est bien l'alliance de l'imaginaire et du corps ressenti qui donne toute la puissance de transformation. C'est justement ce sur quoi s'appuient les pratiques de yogas, de Chi cong, d'arts martiaux et de bien d'autres disciplines. Elles ont en commun de se situer encore dans le lâcher prise et la concentration. 

J'ai le souvenir de ces entraînements quotidiens et solitaires dans le cadre de la pratique de la savate ou boxe française : mes sensations corporelles étaient associées à une certaine vision de l'art. La gestuelle, pratiquée à vitesse réelle ou décomposée, était faite de mouvements précis, chacun porteur de sens et d'efficience, où tout le corps "uni" balance en équilibre, pare et frappe virtuellement, dans un affrontement onirique.

C'est bien cela qui a tant modifié ma boxe, tout comme mon comportement social et personnel face au réel. Aujourd'hui, je comprends mieux cette phrase jungienne :"Ce à quoi je fais face, s'efface. Ce à quoi je résiste, persiste." L'art martial s'épouse comme un chemin de vie, ou une pratique méditative. Elle s'installe comme une démarche vers la sagesse et la connaissance.  Cela a pu se vérifier pour moi, et ne constitue plus une incongruité aujourd'hui. Il s'agit aussi d'un retour à l'intérieur de soi, d'un regard sur son être profond. Quand je refais les gestes aujourd'hui, je retrouve la méditation apprenante où la sensation et l'imagination s'interpellent en interaction créatrice.

Bien sûr, pour ce faire, nous avons recours à la fois à l'audace et à la prudence, nos meilleures amies jamais antinomiques, jamais antagonistes, jamais bloquantes ni handicapantes, bien au contraire. Il s'agit bien là d'une thérapie universelle qui pourrait trouver sa définition dans ces quelques mots : "une kinesthésie onirique illimitée, d'audace et de prudence, génératrice de connaissances profondes". Osons donc l'équilibre, en accueillant ce qui est, puis vivons et rêvons, à partir de là, le meilleur de la situation, celle-ci ou une autre, plusieurs autres, réelles ou imaginées.

Pendant que le geste s'accompli, l'image de la situation se précise. Je n'ai pas d'adversaire, seulement des situations d'oppositions (que d'aucuns appellent "combats"). A partir de ces prémices, la vision globale se nourrit des raisons de mes gestes, des conséquences entrevues ou perçues. On y retrouve des enchainements logiques, en pleine présence et en pleine conscience. C'est bien là l'enrichissement personnel, la révélation de son être profond. Effectivement, il se trouve bien loin de la notion de "développement personnel" (car la seule chose à développer est le geste), mais tient et relève plutôt de l'appropriation par son moi profond. 

Tout le reste arrive et se révèle de surcroit. Ici, l'onirique et le kinesthésique s'entremêlent en une seule dimension non encore nommée. Elle revient à une posture fondée sur l'accueil, le lâcher prise et l'immédiat. Le monde dont je rêve est le nouveau contexte de ma réalité avec lequel j'interagie. On pourrait créer le mot "kinesnirique" à la frontière des deux dimensions. Certes, chacun trouvera dans son cœur le champ où il exercera sa présence sensitive en conscience attentive. Ceci me renvoie à ma devise d'aimer les gens et le travail bien fait.

La psychologue et thérapeute Julia Rautenberg nous fait remarquer dans son ouvrage "Thérapie LIBRE" qu' "On ne peut pas changer les autres. On ne peut que se changer soi-même. C'est dans le lâcher prise que la vie nous offre ses plus beaux cadeaux." J'oserais proposer que cette posture détachée sensitive et onirique constitue, à elle seule, une bonne voie vers son moi profond, vers son être intérieur et toute sa puissance, vers l'univers et les dieux dont nous parlait Aristote. c'est peut être là une belle piste à emprunter pour de nouvelles perspectives, comme celle d'un monde meilleur déjà en soi, déjà là ! ...

Jean-Marc SAURET
Le mardi 11 février 2025

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