"Ce n'est ni le monde ni ce que nous y sommes ou y faisons qui nous font peur, mais l'idée que l'on s'en fait, car la vision guide nos pas. Et sur cela, nous avons la main. C'est là toute la puissance de notre pensée ! " Après avoir durant des années posté ici réflexions et conseils sur le management des organisations, je livre aujourd'hui une vision de la réalité, au plus profond de soi même sur l'être et l'univers. Profitez ! Si vous êtes désireux d'accomplissement personnel, ce blog est pour vous. Fouillez dans ces plus de 500 articles ! Commentez ! Partagez ! Si ces contenus vous intéressent, le droit de copie, même partiel, est sous Licence Creative Commons : chacun est donc libre de les reproduire, de les citer comme il le souhaite, à l'expresse condition d'en indiquer chaque fois la source et de ne pas en faire commerce.
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Contre la dictature de la conformité (07 07 20)

"Le chaos est mon ami !" clamait le chanteur folk Bob Dylan. "L'imprévu n'est pas ce à quoi je m'attends, mais ce qui m'attend !" proclamait à son tour le psychologue jungien québécois Jean-François Vésina. "Le hasard est cette aspiration dans notre présent d'un futur déjà là !" expliquait le physicien quantique Philippe Guillemant. Toutes ces expressions sont en rupture avec cette pensée convenue, socialement partagée et historiquement élaborée que le hasard est une conjonction de deux causalités indépendantes. C'est exactement ce qui s'exprime en économie depuis plus de cent cinquante ans. Ici, la réalité s'épuise dans le chiffre. Ce qui se compte et se mesure existe, le reste non... 

Ainsi la réalité, depuis Descartes se comprend selon trois variables incontournables : le temps, l'espace et la causalité. Et nous acceptons cette conception confortable. Plus que la dictature du chiffre, le "fainéantisme du convenu" nous entraîne dans la perte de nous même... et annonce la fin de l'adaptation de l'humain aux contraintes contextuelles et environnementales. Ce sont pourtant ces éléments, en l'espèce déterminants, qui nous ont fait traverser les siècles et les circonstances contraires...

Tous ceux qui ont fait avancer la science, ou qui se sont fait progresser eux-mêmes, étaient dans une rupture, dans un inconfort et un "inconformisme" salutaire. Il est connu que la disponibilité d'esprit de circonstance a fait découvrir la gravitation universelle à Newton, la relativité à Einstein, ou la "médicinalité" de quelques plantes à nos aïeux. Le même argument vaut pour Rimbaud et la poésie...

La perfection est un concept propre à la vision mécaniste du monde, et à la dictature du chiffre. Pour tous, elle est au mieux une ligne qui recule chaque fois que "je" progresse. De fait, ce qui est figé est mort. Mais il est loisible d'affirmer aussi que ce qui vit bouge en permanence. La perfection reste une notion impossible à appliquer dans un monde alternatif. Elle n'a, de fait,... pas de sens.

Michel Foucault écrivait que "Solidarnosc ne s'est pas battu pour la liberté, pour le droit et la démocratie, mais avec la liberté, avec le droit et avec la démocratie". Il est sûr que changer son propre regard, avec les variables de notre vérité, permet de mieux comprendre notre monde et bien d'autres d'ailleurs. C'est ce qu'exprimait Edward de Bono avec son concept de pensée latérale : changer l'angle de son regard sur les choses, rester disponible à d'autres réalités pour trouver les solutions aux problématiques que l'on rencontre. D'ailleurs, Einstein prévenait que "la solution ne se trouve pas avec les moyens qui ont amené le problème".

Alors, dans ces conditions, comment sortir du fonctionnement catastrophique, erratique, de cette société matérialiste néolibérale ? Eh bien, en sortant de ses dogmes et de son paradigme. Il faudra donc, comme l'ont fait nos ancêtres, accepter de voir le monde autrement, de lâcher les solutions convenues, les outils et les méthodes qui nous ont conduits dans le mur.

Non, la société des humains n'est pas concurrentielle. Elle ne s'affirme pas comme un combat entre proies et prédateurs. Ce n'est pas une jungle d'affrontement au seul profit des plus forts. Les lois de la nature sont peut être tout autre. "Les lois de la nature sont celles que la culture lui trouve", disait le psychosociologue Serge Moscovici. Nous y voyons, une fois de plus ce à quoi, et ce en quoi nous croyons, nos certitudes et nos persuasions. La nature est bien plus coopératrice, aidante, "collaborante" qu'on ne veut le voir.

Alors, face à ladite crise révélée par les gilets jaunes, face à celle "prétendue" du coronavirus (j'y reviendrai), face à l'effondrement du néolibéralisme, face à la déliquescence des théories du progrès et de la croissance continue, nous voilà en présence d'alternatives locales. Nombre de personnes les vivent au quotidien et ce sont les mêmes que corrélativement d'autres ne veulent pas voir. Je ne reviens pas sur les coopératives de production, les bars associatifs, les productions en circuits courts, la permaculture et la culture paysanne, les ressourceries, les monnaies locales, les économies circulaires, les coworking, les organisations sociocratiques, etc. ce serait prétérition inutile...

Toutes ces pratiques reposent sur l'ici et le maintenant, par les gens pour les gens, et reposent sur un fond d'humanisme intelligent. En fait, j'ai découvert ici que ce à quoi j'aspirais était déjà là. Ce courant convivialiste partageait les idées et les moyens de vivre bien mieux "autrement", bien loin de la postmodernité, consumériste et addictive.

Le convivialisme* n'est pas un programme, il est une posture. En ce sens il s'avère comme étant totalement alternant culturel. L'art, la philosophie humaniste et les sciences humaines invitent à habiter ce modèle, avec "son corps et les corps ensembles". Ce sont les disciplines fondamentales du vivre ensemble, de la société alternante. Il s'agit bien là de changer de culture. Pour le sociologue clinicien Vincent de Gaulejac, le convivialisme est une nouvelle manière de penser le monde, de se penser au monde.

Sortir de la culture mécaniste et monolithe postmoderne, permet de s'ouvrir à la pluralité, à l'accueil de la différence de fait constructive. Elle autorise de surcroît à se repenser dans le monde, justement parce que nous le regardons autrement. Dans une pensée latérale, nous remettons l'humain au centre du village parce que la religion du profit individualiste ne marche pas, et n'apporte que frustration, désolation et mort. Le déviant, l'anormal deviennent des singularités avec qui nous pouvons œuvrer. "L'anomique d'aujourd'hui est le canonique de demain", constatait le sociologue Michel Maffesoli.

De la même façon, ou d'une autre manière, il nous faudra sortir de cette société de prédateurs que constitue le système occidental, aujourd'hui néolibéral, afin de laisser place à un système coopératif. Il existe beaucoup d'exemples dans le temps et dans le monde...

J'ai, personnellement, été torturé pour que cesse ma dyslexie... Jusqu'au moment ou j'ai compris qu'il s'agissait, comme pour le convivialisme, non pas d'un manque ou d'une tare, mais d'une posture apportant même savoir et compétence. Elle consiste à déconstruire et reconstruire tout en permanence. Les anglo-saxons raffolent des dyslexiques, que l'on retrouve dans leurs laboratoires de recherche. 

Ainsi, Vincent de Gaulejac a-t-il construit son parcours dans l'intelligence de la recherche et la compréhension de phénomènes sociaux. Ce sont ceux-là même qui nous permettent de faire évoluer le système, de sortir de la "lutte des places" destructrice pour tous les acteurs. L'argument vaut même pour les prétendus "gagnants". Voilà aussi, peut-être, pourquoi je suis devenu sociologue et troubadour...

La problématique n'est pas de comprendre comment faire fonctionner ce monde délabré, mais de réaliser pourquoi et comment une poignée d'individus s'est approprié le monde et le domine. En fait, tout ceci est vieux comme le monde. La situation relève d'une quadruple logique d'avidité, d'orgueil, de territoire et de puissance. C'est elle qui nous a conduit aveuglément dans le chaos du néolibéralisme.

Cela ne remet pas en cause le fait qu'il y a toujours eu des coopérations et des affrontements. Certains, dans le même ordre d'idée (j'y reviens), prennent pour exemple la nature et montrent la logique de prédateurs et de proies, les chasseurs et les chassés.

Mais, la nature n'est pas forcément agressive. Elle ne l'est d'ailleurs pas systématiquement, bien au contraire. On la retrouve même comme plutôt coopérative, associative et complémentaire. C'est ce que nous venons de voir.

Cependant, entre les sédentaires qui possèdent leur territoire, et les nomades pour qui le territoire n'appartient à personne, il y a eu bien souvent des conflits. La cause réside dans leurs différentes visions du monde et d'eux-mêmes dans le monde. Quand le nomade voit le monde comme un jardin naturel, le sédentaire voit le territoire comme sa propriété, celle justement qu'il travaille et cultive. Quand le nomade passe sur les espaces, le sédentaire défend le territoire qu'il considère comme le sien et en interdit l'accès. Ces deux là ont donc du mal à se comprendre.

Quand les "natives americans" vivaient de passage sur une terre à laquelle ils appartenaient, ils ont accueillis des "blancs" venus d'on ne sait où, comme d'autres eux-mêmes. Si les trappeurs français se sont mélangés à la population autochtone, ce ne fut pas le cas des anglais et des saxons. Ceux-ci se considéraient propriétaires de territoires qu'ils avaient confisqués à la nature. Alors il y eut conflit à mort.

En revanche, il n'y a pas sur toute la terre toujours la même relation conflictuelle. Il existe bien des société intégratives et coopérantes, comme ces amérindiens, notamment les Lakotas ou les Navajos dont les sociétés ont été pas mal étudiées. Il y a les indiens Yaki au mexique qui protègent la terre mère. Les Nénet en Sibérie vivent aussi en osmose avec la nature, tout comme les animistes Bushmen de Namibie. Culturellement, ils disposent d'une approche systémique du monde et de la vie. En fait, l'ensemble des civilisations dites premières, que d'aucun nomment "sauvages", sont des organisations complémentaires, solidaires et libertaires.

Mais aujourd'hui, en occident, nous sommes intégrés dans un système néolibéral, totalitaire et globalisant parce qu'il ne conçoit pas d'alternative. Il se pense comme étant et disposant de "la vérité" et donc comme "LE" système civilisé avancé. Parmi eux (c'est à dire nous), il y a les peuples asservis et méprisés, propriétés-objets de quelques dirigeants-prédateurs. En l'occurrence, ces acteurs-là, véritablement très présents, exigent l'absence de cadre réglementaire, afin que tous leurs actes soient possibles sans contrainte. La philosophie de ce néolibéralisme tient en six postulats proclamés par des gens comme Thatcher et Reagan. nous les avons vus à l'œuvre et traité leurs alternatives dans l'article "Mythe et Processus" du 19 mai.

Pour mémoire, dans cette culture-là, il n’existe pas de sociétés mais des individus ; la soif du profit est une bonne chose. L'enrichissement de quelques-uns profiterait à tous par ruissellement. Le seul mode de coordination est le marché libre. Il ne souffre aucune limites vers un toujours plus. Enfin, il n’y a pas d’alternative au néolibéralisme. Ainsi, la catastrophe est promise.

Quand la majorité des personnes cherche à bien vivre, tranquilles dans l'entre soi (un peu à la sauce des animistes), les plus riches sont en compétition entre eux et contre la masse de tous les autres. Chez eux, comme pour les ultra-consommateurs, l’appât du gain est une addiction, une pathologie névrotique, un toujours plus. Comme l'ultra-consommateur cherche le prochain achat dès l'acquisition du précédent, le possédant cherche le "toujours plus". Ce néolibéralisme fait bien système. Ainsi, c'est bien toute la société qui est malade.

Historiquement, il y existe plusieurs alternatives de sortie, c'est-à-dire la révolution violente ou non-violente. Mais là, tout dépend de l'objectif. Est-ce obtenir plus de richesses, ou est-ce partager plus de bien-être et d'entre soi ?

Pour ma part et dans ce que je crois comprendre, c'est que la porte de sortie est constituée par le détachement, le lâcher prise. La passerelle vers un monde meilleur est de le vivre déjà, de le faire maintenant, de le construire dès à présent dans l'entre soi. C'est la démarche libertaire dont je suis quelque peu adepte. Ce n'est là que ma démarche...

Il y a eu de grands et dramatiques exemples lors de la Commune de Paris, lors de la guerre d'Espagne, lors de la révolution Russe en Ukraine et ailleurs. Tous ces épisodes ont été réprimés dans de violentes répressions et dans le sang.

Ainsi, à ce propos, voici les quatre concepts du convivialisme : "commune humanité""commune socialité""légitime individuation" et "opposition créatrice". En exergue, dans ce nouvel ouvrage le "principe de commune naturalité" et un impératif : la "maîtrise de l'hubris", c'est-à-dire de la démesure orgueilleuse et violente, responsable notamment de la hausse des inégalités. Selon plusieurs sociologues et économistes, elle se trouve aussi à l'origine de la crise écologique. Il s'agit ici de développer un "art de vivre ensemble", voire même une "philosophie de l’art de vivre ensemble en s’opposant sans se massacrer".

Il ne s'agit pas de monter une nouvelle stratégie, un nouveau processus de société mais de changer de posture, laquelle ouvrira nombre de possibles. Il s'agit pour cela de poser des valeurs, et des représentations sociales à partager. Il ne s'agit pas de créer un modèle de plus de société, un modèle alternatif, mais de se montrer attentifs sur des principes et valeurs partagées. La première pourrait être l'art du vivre ensemble tel que décrit précédemment. C'est juste ça le convivialisme : une posture. Les actes personnels qui en découlent sont alors les bienvenus.

Jean-Marc SAURET
Le mardi 7 juillet 2020

Extrait du second manifeste du convivialisme : "Ce sont les contours de cet autre monde possible, d’un monde post-néolibéral, qu’esquisse ce Second manifeste du convivialisme. En 2013 paraissait le premier Manifeste du convivialisme, sous-titré Déclaration d’interdépendance*. Son point de départ était, déjà, la certitude que ce qui manque le plus aux milliers ou aux dizaines de milliers d’associations ou de réseaux, aux dizaines ou aux centaines de millions de personnes à travers le monde qui cherchent à échapper à l’emprise du capitalisme néolibéral, ce qui les empêche de se coordonner et qui les condamne à une forme d’impuissance, c’est l’absence d’un consensus * Le Bord de l’eau, 2013. Ce second manifeste peut être considéré comme une déclaration d’interdépendance renforcée. Second-Manifeste-Convivialiste-INTBAT-2020-02.indd 14 10/01/2020 11:28 15 explicite et clairement partagé sur quelques valeurs ou principes centraux. C’est le manque d’une philosophie politique (largo sensu) alternative au néolibéralisme."

Voir aussi : https://www.marianne.net/politique/qu-est-ce-que-le-convivialisme-cette-ideologie-qui-entend-proposer-une-alternative-au

Mais encore : https://www.actes-sud.fr/sites/default/files/extraits/9782330130923_extrait.pdf

Lire aussi  "Pensée mécanique et pensée organique"