Je suis bien souvent gêné par l'usage que nous faisons du concept de spiritualité, et du terme "spirituel". On met, de ce fait à part, cette notion, en la marginalisant du reste de la culture. Est-ce notre approche laïque qui nous fait enfermer ce concept dans l'ordre du personnel, de l'intime, du discret, ou des croyances ? C'est possible. Néanmoins, l'activité spirituelle n'est pas la croyance religieuse : elle ne recouvre ni un choix de vérité, ni une option d'appartenance, mais une activité pleine et entière qui appartient à tout un chacun.
En réalité, ce concept se distingue plutôt de la notion de matérialisme, quand elle ne s’oppose pas à lui. Il me semble qu'il appartient bien au champ culturel dans la mesure où il traite de la "connaissance" du réel. Nous ne sommes bien en capacité d'aborder et de traiter du réel, à partir de nos représentations. Tout le reste nous est donc inaccessible. Le culturel appartient totalement à ce champ représentationnel. C'est lui qui fonde toutes nos certitudes, lesquelles appartiennent, par définition et par essence, au champ spirituel.
Ainsi, pour comprendre et expliquer le monde, la science invoque souvent le hasard, la matière et sa mécanique. C'est bien là une option culturelle, en effet. Par ailleurs, nous baignons aussi dans le réel par l'étude de la conscience, de la puissance de l'esprit et des émotions. C'est ce que nous faisons par les dimensions "croire" et "aimer". Il me semble que nous nous situons là encore dans le champ du spirituel. Nous voyons donc bien que ces concepts se discutent facilement sur le même plan, et donc celui de la réalité du monde. Il en ressort que culturellement, le champ de la rationalité prévaut dans notre culture. Il efface et occulte celui de l'intuition et de la contemplation, que nous savons pourtant être des capacités d'accès direct au réel.
Ce monde veut aller vite et consomme des solutions toutes faites, comme par des raccourcis confortables, sinon faciles. Nous nous y adonnons régulièrement, et la plupart du temps, jamais personne ne cherche à comprendre ce que ce monde puisse être considéré, dans le fond, dans le seul domaine de “l'essentiel”. Nous nous trouvons dans la situation où seules ces "pensées courtes" que nous proposent les cultures, deviennent autant de "prêts à penser". Pourtant, les réponses sont à trouver là, dans l'observation, la contemplation et la réflexion, dans un champ à la frontière de l'intuition et de la réflexion. Peut-être peut-on d'ailleurs, les retrouver intimement mêlées dans les deux champs.
Si la jeunesse est belle et vive, la vieillesse est forte de connaissances et de sagesses. Face à l'adversité, il importe de rester lumineux à l'intérieur, secrets, flexibles et accommodants à l'extérieur. C'est ici l'art pour tout vaincre. Raison et intuition sont, en la matière, les deux faces de la même pièce, celle de la représentation du réel, ou plutôt, de sa “reconnaissance”.
Il existe toute une littérature que vous connaissez certainement, et qui relate des événements de mort imminente, depuis les publications de Raymond Moody, comme "La vie après la vie". On peut compléter ces parutions par des publications plus modestes mais tout aussi efficientes et je pense à celles, en France, du docteur Christophe Fauré ("Cette vie... et au delà") ou de Christian Combaz ("Tous les hommes naissent et meurent le même jour"), et bien d'autres encore, comme ces publications sur les travaux du Docteur Charbonnier, etc. Les bibliothèques, en l'espèce, sont bien fournies...
Dans ces retours d'expériences, la conscience d'être mort est clairement exprimée. Il va être, de surcroît, compliqué de demander aux mathématiques de nous décrire la continuité de la vie. Il existe donc bien deux conceptions de la connaissance entremêlées. Einstein, Poincaré, et même Descartes, les indiquent : l'intuition donne la réponse et la raison l'explique. Bien des cultures, de l'hindouisme et du bouddhisme jusqu'au chamanisme et à l'animisme, ont privilégié l'intuition. Toute une littérature relate leurs constats. Il serait probablement bien utile de la consulter.
On peut donc très logiquement faire cette démarche informative en commençant peut être par "le livre tibétain de la vie et de la mort" de Sogyal Rimpoché (Editions de la Table Ronde, 1993). Il vient nous conter le monde depuis une approche spirituelle, ce qui le fait rejeter des matérialistes radicaux, ou fondamentaux. Pourtant, il me semble bien que c'est dans la complémentarité des deux approches que se trouve la voie du milieu : celle d'une connaissance complète.
Alors, pour que la science matérialiste puisse accueillir les réponses que nous confie cette approche spirituelle, intuitive et méditative, nous nous proposons de l'accueillir comme la démarche culturelle qu'elle est. À partir de ces prémices, nous confierons à l'anthropologie la possibilité et la charge, de nous en décrire les apports et les "raisons" de ces conclusions. Nous aurions grand tort d'en faire l'économie… Les recherches et l'analyse se poursuivent…
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