"Ce n'est ni le monde ni ce que nous y sommes ou y faisons qui nous font peur, mais l'idée que l'on s'en fait, car la vision guide nos pas. Et sur cela, nous avons la main. C'est là toute la puissance de notre pensée ! " Après avoir durant des années posté ici réflexions et conseils sur le management des organisations, je livre aujourd'hui une vision de la réalité, au plus profond de soi même sur l'être et l'univers. Profitez ! Si vous êtes désireux d'accomplissement personnel, ce blog est pour vous. Fouillez dans ces plus de 500 articles ! Commentez ! Partagez ! Si ces contenus vous intéressent, le droit de copie, même partiel, est sous Licence Creative Commons : chacun est donc libre de les reproduire, de les citer comme il le souhaite, à l'expresse condition d'en indiquer chaque fois la source et de ne pas en faire commerce.

Le processus de communication Non-violente, un art complexe (20 12)

J'ai été très touché par la façon dont le docteur Louis Fouchet s'entretenait dans les médias, avec une compassion et une attention tout à fait bienveillante et empathique (Il faut dire qu'il n'est plus invité sur aucun plateau télé pour discours non aligné...). Je découvris ensuite qu'il était un adepte praticien de la CNV (la "communication non violent"). Ce procédé communicationnel et relationnel a été élaboré et mis en œuvre par Marshall Rosenberg, psychologue clinicien, disciple de Carl Rogers. Ce dernier est le concepteur du principe de l'écoute active, dite "rogérienne", qui permit à nombre de patients de sortir de leur isolement psychique douloureux.

Je découvris aussi que les trois grands praticiens de la "non-violence" qu'étaient Ghandi, Martin Luther King et Nelson Mandela, étaient tous les trois des lecteurs de la "Bhagavad Gita", ce récit guerrier et sacré des Indous. Un des grands enseignements de ce livre est "l'agir". ''Si l'on cède à l'injustice, c'est tout l'ordre du monde qui est mis à mal. Il faut faire ce que l'on a à faire.'' nous rappelait Shri Aurobindo lors de sa présentation de cette œuvre essentielle. Etre dans la non-violence n'est absolument pas un évitement à agir. Bien au contraire. Mais comment ? C'est ce que nous allons envisager ensemble.

Il y a en effet un jeu où tout le monde perd et auquel tout le monde joue avec le sombre espoir de toujours gagner, c'est le jeu du "qui a raison !" A contrario, nous pourrions plutôt jouer à ce jeu naturel, que nous savons tous réussir, celui qui consiste justement à aimer et être bien. Le premier jeu présente un double effet pervers : il vous punit si vous avez tort et vous récompense si vous gagnez. Dans les deux cas vous êtes victime de la pression qui en résulte. Cette pression nous enferme, soit dans la honte et la culpabilité, soit dans l'opinion exprimée: celle par laquelle nous devenons un "souteneur dépendant"... Triste privilège ! La phase d'après, c'est la violence de "la lutte des places", comme l'a décrite le sociologue clinicien Vincent de Gaulejac. Le second jeu présente en revanche bien des avantages sur lesquels je vais revenir.

J'ai régulièrement l'habitude de citer cette phrase de Marc Aurèle : "Ce ne sont pas les choses qui nous gênent mais le regard que nous leur portons !". En effet, les faits en tant que tels, ne portent aucun jugement, ni aucune évaluation. Mais si, en plus de faits auxquels j'attribue des évaluations et des valeurs, j'entends des valorisations que mon interlocuteur fait sur la chose, ça risque de devenir compliqué, voire parfois même insupportable. Il en va de même pour mon auditeur quand je lui parle et colore les faits que je rapporte de mes jugements et évaluations, et ce à l'aune de mon seul critérium et de mes propres préoccupations.

Cette logique mortifère relève de la pensée courte que nous serions "mauvais par nature" et "en perpétuelle concurrence", et compétition avec tous et chacun. En l'espèce, ce ne serait pas le plaisir qui structure nos actions mais l'effort. Socialement, la prime est à la pénibilité, le mérite à la souffrance. Cela me parait être une grossière erreur !

Si l'on veut entamer une relation joyeuse et sereine avec l'autre et les autres, il convient de retirer, d'effacer de son propos tout jugement, toute évaluation, toute radicalité (et ça ne va pas de soi...). Mon propos va donc devenir simplement factuel, doté de zéro jugement, zéro évaluation, zéro interprétation... C'est ce que l'on nomme "l'assertivité". L'expression vient du mot anglais "To assert", qui signifie "affirmer" et "To assert oneself" "s'affirmer". Il s'agit d'être présent dans ce que l'on dit de manière simplement factuelle, ne sollicitant pas l'imaginaire de l'autre, ses affects, ses émotions. On se polarise juste sur les faits "d'où l'on parle", c'est-à-dire ce que cela remue ou pas chez soi.

En résonnance à cette approche, je repense ici aux accords toltèques. Ils entrent en écho avec bien d'autres sagesses dont le sens est convergent :

1 - Que ta parole soit impeccable (écoute active, bienveillante, "ajugente" et "amoralisatrice")

2 - Quoi qu'il arrive, n'en faites pas une affaire personnelle ( quand on parle, on a tendance à ne parler que de soi et à régler nos comptes, besoin d'importance et de traiter a priori nos préoccupations)

3 - Ne faites pas de supposition, qui sont parfois de simples fantasmes répondant à ce besoin de confirmer ses croyances, à la recherche de symptômes qui e le prouvent. Alors détournés, nous lâchons la partie qui dirait le tout. Cet éclatement de l'attention, à la recherche de détails qui nous serviraient de preuves à nos projections, relève d'un effet puzzle)

4 - Faites toujours de votre mieux ! Chaque personne fait du mieux qu'elle peut avec ce qu'elle a dans ce moment-là. Faire de son mieux n'est pas faire mieux qu'avant ou mieux qu'un autre. On ajoutera à cela de pardonner. C'est à dire de "ne pas faire sien" ce qui est et appartient en toutes responsabilité à l'autre. C'est peut-être seulement ça tendre vers la meilleure version de soi, car savoir n'est pas connaître. Cette approche invite aussi à parfois s'excuser quand on s'est laissé emporter. Ca arrive...

Plus tard, Miguel Ruiz ajoutait un cinquième accord : Soyez sceptiques et apprenez à écouter. Il s'agit alors de savoir douter de ses propres convictions, car la liberté n'arrive pas sans détachement. On peut assimiler cette approche à une certaine "remise en cause", (ou en question).

Je repense aussi à cette sage invitation de Socrate à conduire ses relations selon ses "trois passoires" ou tamis. Quelqu'un voulant dire au philosophe quelques critiques sur l'un de ses amis, Socrate lui demanda s'il avait passé son propos à la vérification des trois passoires : celles du vrai, celle du bon, et celle de l'utile

Il s'agit de savoir, d'une part, si la chose à dire est vérifiée, d'autre part si elle apporte un bénéfice heureux (si elle est dite pour de bonnes intentions), et par ailleurs si cela servira à son interlocuteur, si cela lui sera utile. Les trois conditions ne semblant pas acquises, Socrate refusa d'en entendre davantage et invita son interlocuteur à oublier cette chose non vérifiée, pas forcément bien intentionnée et inutile.

N'avons-nous pas plutôt tendance à chercher la victoire que d'avancer dans la vérité ? Mettons au centre de nos préoccupations ce qui est vrai, bon et utile. L'affrontement n'apporte que le désagrément, n'est-ce pas ? Un jour, je lu cette assertion : "Plutôt avoir la paix qu'avoir raison !"...

Lors de mes cours sur la communication managériale, pour initier mon propos, j'avais l'habitude de raconter cette histoire que j'avais le plaisir de relier avec le lieu de chaque formation. Il y a bien longtemps notre ancêtre commun se promenait dans la plaine (c'est là que je faisais un lien avec le lieu de la formation). Il tomba nez à nez avec un mammouth. Notre ancêtre se dit que voilà un joli "garde à manger sur pattes" ! Mais la différence de proportion entre le mammouth et notre cher ancêtre commun lui apparut si forte qu'il prit la fuite. Ainsi, comme il a survécu et que nous sommes là aujourd'hui : la fuite, c'est donc bien !

Il rentra au village et rameuta tout le monde afin que chacun sorte avec lui. Ils vinrent armés de lances, de flèches et de massues pour aller agresser le mammouth. Ainsi, s'ils peuvent le capturer, ils pourront bien manger pendant quelques semaines et donc (s'ils y parviennent) cela nous assurerait d'être là aujourd'hui. Donc, l'agressivité, c'est bien !

Mais le mammouth était résistant et voilà que malgré l'agression, il continua de gambader dans la plaine. Notre ancêtre, accompagné de ses congénères du village, retournait à la maison et, ensemble, ils sont allés voir le vieux sage du village pour lui soumettre la situation. Celui-ci leur proposa de fabriquer un piège dans un passage étroit, constitué d'une fosse armée d'un pieu en son centre et masqué par des branchages. Il suffirait, à coup de provocations, d'attirer le mammouth dans cet endroit où il sera piégé. Et si la manipulation fonctionne, il sera plus aisé de l'achever à coups de pierres. Ainsi donc, tout le village se nourrira durant plusieurs semaines et nous sommes là aujourd'hui. Donc, en l'espèce, la manipulation, c'est bien !

Cependant, dans ce village, quand les personnes usent de fuite, d'agressivité et de manipulation à l'encontre de leurs congénères, cela se passe assez mal et finit souvent "engueulades", voire en bagarre. Si ces postures sont utiles pour gérer l'environnement et ses accidents, elles s'avèrent délétères dans l'entre soi, car alors elles touchent à des questions de conscience de soi, voire d'ego irrité dirons-nous...

Ainsi, il reste la posture assertive, ou factuelle. C'est ce type de relation qui reste quand on l'a débarrassée de fuite, d'agressivité et de manipulation. Si je sollicite une relation simple, directe et en paix, j'aurai besoin de rencontrer le ou les interlocuteurs sur un terrain sans jugement, sans valorisation : je serai juste assertif (le philosophe Jurgen Habermas dit bien, dans son "agir communicationnel" que la vérité des faits nécessite la dialogue, la concertation). Pour cela, je me donnerai à voir, présenterai ce que sont les seuls faits avec ce que j'aime et n'aime pas. Je dirai ce dont j'ai besoin et ce qui est rédhibitoire, mais aussi le sentiment qui m'anime sans fioritures ni chercher à convaincre, ou à influencer. Bref, je me situe dans une transparence réelle et le respect absolu de la liberté de l'autre.

Lors de ces formations, je devais ajouter quelques précisions psychosociales, comme le fait que ce qui nous dirige sont des intérêts, des fiertés, des envies, des pulsions et répulsions. Il est un fait que chacun a les siennes et réagit à son tour selon ces variables-là, poussé ou retenu. Il est juste aussi de savoir que la relation humaine peut être un commerce où s'échangent des biens, des faits et des coups. Il ne s'agit pas de nier ces variables mais de ne pas les investir dans la relation afin qu'elles restent apaisées, sereines.

Je n'oubliais pas que, dans ces circonstances, 80% de notre communication passe par le non verbal, directement de notre conscience (ou inconscient) à la perception par l'autre. Pour s'assurer de l'homogénéité de la relation, je portais une attention particulière à la sincérité et à la fluidité de ma pensée. Oui, ceci n'est pas simple et trébucher nous arrive...

Voilà ce que je racontais pour donner à voir cette posture utile et nécessaire pour une bonne relation interpersonnelle, voire dans la communication non violente. Ce qui m'a toujours quelque peu gêné dans la démarche de Marshall Rosenberg, c'est l'usage de concepts à forme négative comme "ne pas juger", ou "ne pas valoriser". On sait bien qu'une injonction négative n'est pas analysée par le cerveau et qu'il l'attrape dans ce qui est dit, à savoir dans l'injonction "ne pas juger", il enregistre "juger" et il a tendance à se polariser dessus. Et ce, un peu comme dans le jeu "ni oui, ni non".

Il est donc plus efficace d'utiliser des injonctions de forme positive, comme "accueillir l'autre et son point de vue", ou bien "factualiser son propos", ou encore "utiliser les mots de ses références". Il est tout aussi possible de "reformuler sous forme neutre".

J'ai déjà évoqué ici que je préférais l'appellation de communication "en-paix" plutôt que l'expression à la forme négative de "non-violence"*. Mais comment qualifier cette pratique, ou processus, apparemment si efficace, et donc pas si "bisounours" que ça ? Je laisserai ici la parole au spécialiste, interrogé dans la revue "Psychologie" : les propos sont rapportés par Stéphanie Torre.

La CNV

Marshall Rosenberg a été publié tard en France, près de 40 ans après avoir développé aux Etats-Unis le processus de communication non-violente. Dans "Les mots sont des fenêtres ou bien ils sont des murs" (Syros), ce docteur en psychologie clinique, ancien élève de Carl Rogers et fondateur du "Center for Nonviolent Communication", exposait les principes de la "résolution pacifique des conflits" qu’il a enseignés dans une trentaine de pays avant de s'éteindre le 7 février 2015.

Sa théorie : "Les jugements que nous portons sur les autres sont l’expression tragique de nos besoins non satisfaits". C’est en prenant le temps de les écouter et de les formuler que notre interlocuteur pourra identifier le message, afin d'y répondre à son tour.

L'entretien

Psychologies : Qu’est-ce que la communication non violente ?

Marshall Rosenberg : Ce processus permet à chacun d’entrer en contact avec ses besoins profonds pour mieux communiquer, en laissant libre cours à sa bienveillance naturelle. Son but : transformer les conflits potentiels en dialogues paisibles, et désamorcer les disputes. Son outil : le langage du cœur.

Psychologies :  Comment parler ce “langage du cœur” ?

Marshall Rosenberg : Il y a quatre points simples mais essentiels à suivre. D’abord, j’observe ce qui se passe réellement dans une situation donnée : qu’est-ce qui, dans les paroles ou les actes de mon interlocuteur, contribue à mon bien(mal)-être? Ensuite, j’exprime ce que je ressens en présence de ces faits : suis-je triste, joyeux, inquiet, fâché ? Je dois préciser les besoins à l’origine de ces sentiments.

Il y a quatre points simples mais essentiels à suivre. D’abord, j’observe ce qui se passe réellement dans une situation donnée : qu’est-ce qui, dans les paroles ou les actes de mon interlocuteur, contribue à mon bien(mal)-être? Ensuite, j’exprime ce que je ressens en présence de ces faits : suis-je triste, joyeux, inquiet, fâché ? Puis je précise les besoins à l’origine de ces sentiments.

Ainsi, la mère d’un adolescent pourrait-elle exprimer ces trois points en disant à son fils : "Lorsque tu laisses tes vêtements dans le salon au lieu de les emporter (observation), je suis de mauvaise humeur (expression) car j’ai besoin de plus d’ordre dans les pièces que nous partageons (besoin précisé)".

Dernière composante : une demande précise et concrète. "Pourrais-tu, s’il te plaît, prendre tes affaires et les mettre dans ta chambre ?" En utilisant ces quatre points et en aidant l’autre à faire de même, nous établissons un courant de communication qui débouche naturellement sur la bienveillance. Et cela, aussi bien dans son couple ou avec ses enfants, qu’au travail. Chaque année, nous formons des policiers, des enseignants, des infirmières. Mais aussi des militants pour la paix, dans des régions touchées par la guerre comme le Rwanda, l’Irlande, la Palestine ou Israël.

Psychologie : Un exemple ?

Marshall Rosenberg : Un jour, je présentais ma méthode devant cent soixante-dix musulmans palestiniens réunis dans un camp de réfugiés, à Bethléem. Une rumeur a parcouru l’assistance qui s’est mise à m’insulter : "Ils disent que vous êtes un Américain, donc un tueur d’enfants", m’a expliqué mon interprète. Je savais que les réfugiés en voulaient aux Etats-Unis qui fournissaient des armes à Israël. Je me suis adressé à celui qui venait de me traiter d’assassin : "Vous êtes en colère, car vous aimeriez que mon pays utilise ses ressources autrement ? Vous aimeriez que l’on vous aide à améliorer vos conditions de vie ?"

"Exactement, m’a-t-il rétorqué. Vos enfants vont-ils à l’école ? Ont-ils des terrains de jeu? Parce que le mien, lorsqu’il joue, c’est dans les égouts !" Mon interlocuteur a exprimé sa souffrance pendant vingt minutes. Cherchant à repérer les sentiments et les besoins implicites dans chacune de ses déclarations, je me suis contenté de recevoir ses paroles. Non comme des attaques, mais comme le don d’un semblable qui cherche à faire partager ses rancœurs et son sentiment de vulnérabilité. Il s’est senti compris, respecté, écouté et a été à même de m’écouter, à son tour, exposer les raisons de ma visite : les bienfaits de la CNV.

Psychologie : Pourquoi cette démarche ?

Marshall Rosenberg : Je me suis interrogé très tôt sur la nature humaine. Enfant, j’ai vécu à Détroit, dans le Michigan. Le racisme y était très vif. A l’école, mon nom de famille m’a valu insultes et coups. Plus tard, persuadé que la nature profonde de l’homme le conduit à donner et à recevoir dans un esprit de bienveillance, je me suis posé deux questions : pourquoi nous coupons-nous de notre bonté naturelle au point d’adopter des comportements agressifs ? Comment, inversement, certains individus parviennent-ils à rester en contact avec elle-même dans les pires situations ? J’ai cherché des réponses dans les textes religieux. Puis j’ai étudié la psychologie clinique à l’université. Mais j’ai vite été déçu : entendre mes confrères ne parler qu’en terme de "pathologie" me semblait rétrograde et réducteur.

Après mon doctorat, j’ai décidé d’entreprendre mes propres recherches. A cette époque, j’ai rencontré le professeur Carl Rogers et ses travaux m’ont été précieux. "Pour dépasser la souffrance, disait-il, il est nécessaire d’avoir une écoute empathique et de l’authenticité." Le rôle déterminant de l’usage que l’on fait des mots m’a toujours frappé. Notre relation au langage, de par notre éducation, pousse la plupart d’entre nous à étiqueter autrui et à exiger plutôt qu’à prendre conscience de nos sentiments, de nos envies et de nos responsabilités. J’ai donc encouragé les gens à dépasser cette communication aliénante pour qu’ils apprennent à exprimer leurs véritables désirs, à entendre la demande derrière le message exprimé et essayer d’y répondre.

Psychologie : Que faire face à une personne silencieuse ? 

Marshall Rosenberg : J’ai reçu une patiente qui n’avait pas ouvert la bouche depuis longtemps. J’ai commencé à lui dire comment moi je me sentais : "Je suis tendu parce que j’aimerais pouvoir établir une communication avec vous et je ne sais pas comment m’y prendre." Faute de réponse, j’ai parlé de moi pendant trois quarts d’heure. Le lendemain: toujours la même souffrance exprimée à travers le silence. Et moi, je faisais tout mon possible pour établir un lien en lui parlant de mon impuissance.

Au cinquième jour, enfin, elle a communiqué : détournant son visage de moi, elle a mis son poing près de ma figure. J’ai ouvert ses doigts crispés, un à un. Ils maintenaient un papier sur lequel était inscrit : "S’il vous plaît, aidez-moi à dire ce qu’il y a à l’intérieur."

Petite mise en pratique :

Parlez-vous non-violent ?
A l’instar de Gandhi ou Martin Luther King, parlez-vous couramment la langue de la non-violence, que Marshall Rosenberg appelle aussi le “langage du cœur”, garant de sérénité et de respect ? Pour le savoir, voici quatre exercices relatifs aux quatre composantes de la CNV   
Observer sans juger
Cochez les phrases qui, selon vous, ne comportent aucun jugement :
- Sylvia travaille trop.
- Arnaud est un homme généreux.
- Jean-Louis ne m’a pas demandé mon avis pendant la réunion.
Observation
- 1 "Trop" est une opinion. Pour ne pas juger, on aurait pu dire : "Aujourd’hui, Sylvia a passé douze heures au bureau."
- 2 "Généreux" est une évaluation. Pour l’éviter, on aurait pu dire : "Depuis vingt ans, Arnaud donne un dixième de son salaire à une œuvre de charité."
- 3 Il s’agit bien là d’une observation sans évaluation.

Exprimer clairement ses sentiments
Cochez les phrases où, selon vous, des sentiments sont nommés :
- 1 J’ai le sentiment que tu ne m’aimes pas.
- 2 J’ai peur quand tu dis cela.
- 3 Je me sens incompris(e).
Expression
1 - "Tu ne m’aimes pas" ne dit pas les sentiments de la personne qui parle, mais
décrit ceux qu’elle attribue à l’autre.
2 - Ici, un sentiment est spécifiquement exprimé.
3 - "Incompris(e)" n’est pas un sentiment. On aurait pu dire : "Je suis déçu(e)…"
Identifier ses besoins
Cochez les phrases où, selon vous, la personne qui parle prend la responsabilité de ce qu’elle ressent :
1 - Il arrive que les gens fassent de petites réflexions qui me blessent.
2 - Je suis mécontent(e) quand tu es en retard.
3 - Je suis fâché(e) quand tu dis cela, car j’ai besoin de respect et j’entends tes paroles comme une insulte.
Identification des besoins
1 - Pour préciser vraiment les besoins qui sont à l’origine de ses sentiments, cette personne aurait du dire : "Parfois, quand les gens me font des réflexions, je me sens blessé(e), car j’aimerai être apprécié(e)."
2 - Pour exprimer véritablement ses besoins, il aurait fallu dire : "Je suis contrarié que tu arrives en retard, car j’espérais passer la soirée avec toi."
3 - Ici, la personne assume pleinement la responsabilité de ses sentiments.

Savoir formuler une demande
Cochez les phrases où, selon vous, une action concrète est demandée :
1 - Je veux que tu me comprennes.
2 - Je veux que tu arrêtes de boire.
3 - J’aimerais que tu ne dépasses pas la limite de vitesse.
Formulation
1 - "Que tu me comprennes" n’exprime pas clairement une demande concrète.
2 - On ne dit pas ici ce que l’on veut, mais ce que l’on ne veut pas.
3 - Ici, la demande est claire et concrète.

Source : "Les mots sont des fenêtres ou bien ils sont des murs" de Marshall Rosenberg, Syros, 1999.

Je crois qu'ici beaucoup a été dit et bien des choses indiquées. Il me semble qu'il n'y a plus qu'à expérimenter, voire à s'y mettre. Non ? Alors bonne paix à chacune et à chacun ... et joyeux devoirs de vacances de fin d'année !

 Voir l'article : "La communication en paix"

Jean-Marc SAURET
Le mardi 20 décembre 2022

Lire aussi : "Les trois passoires de Socrate"



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2 commentaires:

  1. Merci pour ce billet. Le challenge chouette est d'abord de simplement écouter... ce qui n'est pas simple :-)

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  2. Merci cher Jean Marc 👌

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