"Ce n'est ni le monde ni ce que nous y sommes ou y faisons qui nous font peur, mais l'idée que l'on s'en fait, car la vision guide nos pas. Et sur cela, nous avons la main. C'est là toute la puissance de notre pensée ! " Après avoir durant des années posté ici réflexions et conseils sur le management des organisations, je livre aujourd'hui une vision de la réalité, au plus profond de soi même sur l'être et l'univers. Profitez ! Si vous êtes désireux d'accomplissement personnel, ce blog est pour vous. Fouillez dans ces plus de 500 articles ! Commentez ! Partagez ! Si ces contenus vous intéressent, le droit de copie, même partiel, est sous Licence Creative Commons : chacun est donc libre de les reproduire, de les citer comme il le souhaite, à l'expresse condition d'en indiquer chaque fois la source et de ne pas en faire commerce.

"Qui êtes-vous ?" (01 02)

Il est bien souvent arrivé à tout un chacun de ne pas répondre la même chose à cette question pourtant simple : "Qui êtes-vous ?" ou à cette injonction  : "Présentez-vous !" Il me souvient, par exemple avoir répondu, d'un air quelque peu malicieux : "Je suis le voisin de Christel et Hervé..." Ce qui laissa mon interlocuteur quelque peu interloqué. Ce n'était pas du tout la réponse qu'il attendait, même très loin de ce qu'il était supposé attendre.

Effectivement, nous répondons à ce type de demande en fonction du contexte, de l'environnement, de l'histoire ou du type de rapport que nous entretenons avec cet interlocuteur dans un temps donné. Il y a toujours une finalité sous-entendue et supposée. Il ne nous viendrait pas à l'esprit de faire spontanément, comme je le cite plus haut, une réponse décalée, à moins que l'humour ou un certain surréalisme ne nous habite à ce moment-là. Et ce serait toujours pour exprimer quelque chose de particulier, de singulier, d'à propos, certainement. Il y a alors comme une marche sur la marge de la réalité...

Nous ne répondons jamais de manière brute à une question, comme si elle contenait l'ensemble des éléments à construire la réponse. Il n'y a en effet rien de "numérique" dans nos relations humaines. En effet, un négociateur, un enquêteur, un curieux ou un commerçant n'attendent pas la même réponse à la même question. Et s'ils sont écoutants, ils ne répondront pas non plus la même chose car leurs intérêts réciproques sont singuliers, circonstanciés. Il y a toujours une "vérité" dans la réalité des faits, celle du "récit", du discours de contexte.

On apprécie d'ailleurs, lors d'interviews sur les médias, l'à propos et l'intelligence de quelques intervenants dans leur capacité à prendre en compte leurs propres références, leurs propres préoccupations, apportant ainsi dans le propos le sens et les éléments qu'ils souhaitent investir parce qu'ils leur seront favorables et suivent la vérité qu'ils servent.

Il me souvient de ce maire interrogé par des journalistes pour sa prise de position favorable à une désobéissance civile face à un gouvernement défaillant dans sa gestion d'une crise. Le journaliste lui demandait alors s'il appelait à enfreindre la loi. Le maire aurait pu se conformer strictement à la demande et répondre par oui ou par non avant d'argumenter. Il répondit simplement en citant un article de la constitution indiquant de ne pas obéir à une loi absurde ou disproportionnée. Le journaliste en était pour ses frais. Il du relancer sur autre chose...

Il est en effet bien difficile, dans une conversation, de rester aligné sur la "réalité" d'où l'on parle et que l'on souhaite faire partager, du moins faire prendre en considération par son interlocuteur. Ce sont les "critériums" de chacun, comme l'indiquait Schopenhauer, leurs références, qui de fait s'affrontent, c'est-à-dire leurs "vérités".

Ainsi, dans la demande de se présenter, à répondre à la question "Qui êtes-vous ?" il y a autant d'intentions contextuelles chez l'interlocuteur que sa propre intention de donner quelque chose à voir, à prendre en compte. Ce sont nos intentions et nos priorités momentanées qui nous font fouiller dans nos critériums.

Aussi, quand un futur employeur nous questionne, nous mettons en avant les qualités professionnelles et humaines que pourrait attendre cet employeur à propos de ladite fonction, et de l'idée que l'on s'en fait, mais aussi de ce dont on espère témoigner de soi-même et de ses propres représentations. On passera d'entrée sur le nom et l'adresse, voire le métier principal que nous exerçons, car tout ceci est sur la fiche que l'interlocuteur a sous les yeux, le fameux CV, le "curriculum vitae".

Il arrive bien souvent que des personnes soient un peu perdues à se présenter de la sorte. Elles n'en ont pas l'habitude. Bien souvent, en tant qu'employés, elles sont plutôt habitués à une considération justement "d'employés", c'est-à-dire à être utilisées pour une compétence, soit dans une appréciation d'utilité dépersonnalisée. Il est alors assez difficile de se mettre dans la posture de son questionneur et s'habiller de ses attentes. Pourtant c'est bien cela dont il s'agit, quels qu'en soient les acteurs et les circonstances.

Mais quand on entre dans un local privé dans des horaires inhabituels à la circulation des personnes, la question prend un tout autre tour. Elle résonne dans la tête du questionné parfois comme une suspicion. Et elle peut l'être en effet. Alors nous racontons l'histoire portant les circonstances qui nous situent et nous dédouanent d'une posture incongrue, voire de malfaiteur, ou autres. L'histoire est alors explicative car elle donne des éléments de contexte déconstruisant et reconstruisant l'hypothèse de réalité. Bref dans tout entretien de questionnement il y a un implicite contextuel, que l'on considère aussi comme un "ordre des choses".

Cependant, il me revient cette petite histoire d'une embauche vécue par un de mes anciens collègues. Le recruteur lui demanda pourquoi il s'était présenté à cet examens professionnel lui conférant un niveau dit 4.1 (une singularité de l'administration où il postulait). Il répondit sans sourciller que quand il était enfant il rêvait d'être justement 4.1... La réponse était totalement incongrue puisque, par ailleurs, cette classification administrative n'existait que depuis peu de temps. Ses interlocuteurs comprirent l'incongruité de leur question, s'en excusèrent et poursuivirent. Comme quoi, l'implicite peut être aussi "bougé" dans la conversation...

En effet, j'ai plusieurs fois, dans ces lignes, développé ou relaté que l'identité n'est pas un état mais une activité où l'on passe son temps à "se vérifier" en situation dans le regard de l'autre. Pour mieux le dire, j'utilisais le néologisme "d'identation" (voir ci-dessous "Lire aussi "). Nous connaissons bien des situations cocasses que les quiproquos sur le sujet peuvent produire. Le théâtre de boulevard en a fait son moteur.

Une nouvelle fois nous voyons bien que nous ne sommes que le résultat d'une relation dans un environnement événementiel, historique et culturel donné. Et c'est cet environnement qui fait sens et "vérité". Nous avons ainsi le droit de "jouer" avec ce contexte en notre faveur ou à celui des objectifs que nous servons.

Il en va de même pour l'identité que nous prêtons à l'autre. Quand un président traite une catégorie de personnes "d'irresponsables" et de "moins citoyennes", il ne fait que mettre en avant ses propres critères personnels, oubliant et effaçant publiquement ceux de la communauté, soit les principes et valeurs de la constitution républicaine. Dès lors et de fait, il se sort du jeu et de sa fonction.

Jean-Marc SAURET
Le mardi 1er février 2022

Lire aussi Vous avez dit "identation" ? "


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