Le mouvement des gilets jaunes, celui des anti-pass, les manifestations locales ou "montées" à Paris, MeToo, Black Mater, Marches pour le climat, les Fake news et "Complotismes" sur la toile, restent des événements qui posent question et sur lesquels les avis divergent. De fait on ne comprend plus ce qui se passe. Tout n'est qu'une question de relations, de rapports, de représentations et d'enjeux...
Alors ne faudrait-il pas revenir à des outils simples et anciens, même s'il vaut mieux ne plus les utiliser à l'identique, et actualiser leur usage ? Je pense à la pyramide de Maslow que nous avons besoin de remettre à l'ordre du jour selon le principe la roue de Mandfred Max-Neef. Il n'est plus question, en l'espèce, d'une mise en pyramide des besoins dès lors que l'on a passé un certain seuil d'inacceptabilité. Il s'agit alors plutôt d'une roue composée de segments sur lesquels on peut faire avancer ou reculer les curseurs, même si certains de ces segments, aujourd'hui ont des importances relatives. "Mutatis mutandis", les choses évoluent...
Mais reconsidérons ces cinq étages d'Abraham Maslow que sont les besoins physiologiques, de sécurité, d'appartenance, de reconnaissance et de réalisation de soi. Nombre de cadres et d'acteurs de notre société ont changé de vie. Certains ont quitté leur emploi de cadre supérieur. L'un pour, ouvrir une épicerie sociale de produits bios locaux, l'autre pour créer une ferme de permaculture, l'autre encore pour développer en zone de montagne une activité de débardage avec des chevaux, etc. Tous ceux-là ont préféré "descendre" en qualité "physiologique" (les revenus confortables) et de sécurité d'emploi, afin de concrétiser un rêve, un essentiel, une réalisation de soi qui relève d'un certain idéal de vie, de soi, et du monde.
Max-Neef a bien raison, et notamment sur ce point-là : on peut vraiment "descendre" les curseurs de la sécurité et des besoins matériels, au profit d'autres curseurs, dès lors qu'un certain niveau de confort est atteint. Aujourd'hui la question de la réalisation de soi est souvent plus importante que celle de la satisfaction matérielle. Bien entendu, si les conditions matérielles se dégradent et que l'on arrive dans une zone de conditions peu inacceptables, alors Maslow redevient pertinent. Cependant, il y a actuellement une prise de conscience qui dépasse le besoin de confort. Certains préfèrent prendre des risques matériels plutôt que de s'ennuyer toute la vie.
Cela n'a rien de particulier ni d'exceptionnellement actuel. Il me revient la fable du chien et du loup de La Fontaine. Le loup trouvant le chien bien portant et lustré, écoutait ce dernier lui vanter les avantages de la vie à la ferme où il était nourri, logé, blanchi. Mais quand le loup vit la trace du collier sur le cou du chien il partit, préférant sa liberté à toutes ces douceurs confortables.
Ce que l'on n'a pas compris lors des différents événements sociaux récents, c'est l'importance des deux secteurs d'appartenance et de reconnaissance de la pyramide, ce que Pierre Rosanvallon résume par cette phrase : "Il y a un désir d'égalité, que chacun soit reconnu dans sa singularité"*. Combien de groupes sociaux réclament-ils leur reconnaissance ? On les accuse de communautarisme. Je veux bien, mais que fait-on de cette réalité sous-jacente, de ce double désir d'appartenance et de reconnaissance singulière ? Faudrait-il qu'au nom d'une laïcité absolue ils s'assoient dessus ?
Mais, certains opposeront peut-être, que le gouvernement a débloqué des millions pour venir en aide à ces gens démunis. Or, ce que ne comprennent pas les gouvernants, (trop souvent gestionnaires), c'est qu'ils ont oublié d'être des managers-leaders. En d'autres termes, les milliards censément déversés sont et restent abstraits pour une population qui compte des euros et des centimes au jour le jour. La parole et la posture sont bien plus concrètes que des chiffres abstraits. Chacun les comprend tout de suite, sans traduction ni interprétation.
Il y a bien une fracture, un fossé de réalité entre les élites et le peuple, comme l'a si bien développé Michel Maffesoli dans "Le nouveau printemps des peuples - la chute des élites" (Mardaga, 2021) et dans "L'ère des soulèvements" (Cerf, 2021). Le souci est que le peuple est souverain et il le sait. A partir de là, toute tentative de contrainte est vécue comme un reniement, une disqualification, un rejet. Michel Maffesoli a cette très juste expression : "Le peuple instituant et les élites instituées".
Certaines personnes, "mouillées" par leur soumission, deviennent des négationnistes de ce totalitarisme. C'est ce que j'avais indiqué dans ma thèse doctorale** sur le management dans les centres de tri de la poste depuis 93. Je nommais cette catégorie de personnel par le jugement que les autres leur adressaient : les "fayots". Ceux-ci, coupables de leur soumission profitable, niaient qu'il s'agisse d'une allégeance et défendaient les dépositaires de l'autorité. C'était aussi là une manière de se dédouaner, de justifier leur posture. Par ailleurs, il fallait que leur "camp" gagne, sinon ils risquaient le goudron et les plumes... ce qui arrivait quand même à l'occasion !
Il est vrai que ce type de scission, au sein du peuple sert le pouvoir. Lesdits "fayots" sont un alibi de vérité. Les autres n'ont qu'à se taire. C'est d'ailleurs ce à quoi l'on assiste quand les médias sociaux, comme Youtube, annoncent éliminer les vidéos qui mettent en cause les vaccins des grands laboratoires.
Si l'on reprend la pyramide d'Abraham Maslow, on comprend que les gouvernants, en répondant aux seuls besoins physiologiques et de sécurité, délaissent les besoins d'appartenance, de reconnaissance et de réalisation de soi. Ceux-ci sont pourtant devenus fondamentaux. Alors, les gens du peuple, ou des peuples, s'en emparent et s'en occupent, opposant résistances et rébellion sur ces volets-là,. En même temps, ils se défient des élites devenues coupables à leurs yeux, de perte de sens. Pourtant, ce "sens" reste essentiel, et il serait de leur fonction de le porter, de l'incarner, voire d'en produire.
Il faudra donc bien, à un moment ou à un autre, s'occuper réellement de cette dynamique-là, et le plus tôt sera le mieux. Non seulement il va s'agir de rendre la parole et la décision aux peuples, mais aussi et peut-être surtout, de savoir les entendre et les écouter. On dirait que les élites sont devenu aussi idiotes qu'abouliques derrière leur surdité technocratique.
Médiocratie, chute et faillite des élites, bureaucratie stérile et bloquante, théorie du choc... autant d'éléments sur lesquels sociologues et philosophes alertent depuis un bon bout de temps... La réponse populaire est déjà là et son bruit augmente. Impossible d'y rester sourds plus longtemps.
Lire aussi : "Aujourd'hui avons nous toujours autant besoin de leaders ?"
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