"Ce n'est ni le monde ni ce que nous y sommes ou y faisons qui nous font peur, mais l'idée que l'on s'en fait, car la vision guide nos pas. Et sur cela, nous avons la main. C'est là toute la puissance de notre pensée ! " Après avoir durant des années posté ici réflexions et conseils sur le management des organisations, je livre aujourd'hui une vision de la réalité, au plus profond de soi même sur l'être et l'univers. Profitez ! Si vous êtes désireux d'accomplissement personnel, ce blog est pour vous. Fouillez dans ces plus de 500 articles ! Commentez ! Partagez ! Si ces contenus vous intéressent, le droit de copie, même partiel, est sous Licence Creative Commons : chacun est donc libre de les reproduire, de les citer comme il le souhaite, à l'expresse condition d'en indiquer chaque fois la source et de ne pas en faire commerce.

Nos certitudes font réalité

Je retrouvais quelques connaissances, collègues et amis, sur le parvis d'un établissement où nous attendions de participer à un événement. Et que font les gens qui se retrouvent ? Ils se donnent quelques nouvelles, en demandent à ceux qu'ils ont plaisir à revoir. Ensuite, on attaque les actualités. C'est là que les convergences et les divergences apparaissent.
Plus le sujet est global, ou sociétal, et plus l'investissement en termes de croyances apparaît comme un pilier de la réalité. En l’occurrence, le sujet du jour était l'épidémie du coronavirus, et donc les discussions allaient bon train sur les consignes censées éviter la propagation du virus.
Quelques-uns étaient les tenants d'une pratique rigoureuse des recommandations, quand d'autres s'en détournaient allègrement. Les uns invoquaient les principes de contaminations virales quand d'autres s'attardaient sur la véritable dangerosité du virus. C’est à ce moment qu’un tiers évoqua une étude qu'il venait de lire...
Elle disait que la létalité de ce virus n'était pas plus importante que celle d'un virus d'une grippe ordinaire, que le développement de l'épidémie à Wuhan venait du confinement de toute une population, (qu'elle soit saine ou touchée). C’est dans ces conditions de concentration forcée que tout le reste de la population avait été contaminé.
Un participant affirma, coupant court à la restitution, qu'il n'existait aucune étude crédible, à l'heure qu'il était. La discussion polie continuait, chacun affirmant ses croyances et ses certitudes. Plus la conversation se déroulait et plus apparaissait le fait que l'on commençait à toucher à des "fondamentaux", et donc à du "sacré". Simultanément, et à partir de ce moment, les injonctions et les assertions se firent toujours plus radicales, sinon définitives...
Pour certains, il était évident que le virus présentait une forte dangerosité et de ce fondamental là, découlait tout le reste des raisonnements. Pour d'autres, il ne représentait qu'une faible dangerosité et le gouvernement prenait prétexte de ce phénomène pour effacer les "sujets qui fâchent". Il en allait ainsi des violences policières sur les manifestantes féministes et pacifistes. Le même argument valait pour le passage en force de la loi sur la refonte des retraites, mais aussi pour la perte de vitesse du mouvement présidentiel, etc.
Nous comprîmes assez vite alors, que la discussion se limitait, pour chacun, à ses seuls fondamentaux, à des "croyances" essentielles. Le reste devenait accessoire. Nous vîmes ainsi combien certains pouvaient aller jusqu'à nier les éléments qui étaient défavorables à leurs prémisses. Les mêmes ne manquant pas d’affirmer, fût-ce vainement, que ce qu'ils savaient était vrai, sans autre forme de preuve. Il s'agissait bien de défendre quelques éléments apparaissant alors comme du domaine du "sacré ", et donc, par voie de conséquence, ils devenaient aussi fondamentaux, qu'essentiels...
Ce type d'échange n'est effectivement ni original, ni particulier. Nous en avons connus de semblables lors d'autres conversations. Il apparaît que ce qui s'y "transacte" essentiellement, comme le montrait Rodolphe Ghiglione, ce sont les fondamentaux, les "d'où je parle", peuplés de certitudes et de sacrés. Il ne s'agit pas, en l'espèce de tenter de convaincre son interlocuteur, ce serait vain… Tout au plus, il s'agit d'affiner certains de nos propres sacrés, d'apprécier et mieux comprendre d'où l'autre parle, quels sont ses invariants, ses fondamentaux, ses croyances sacrées, son ''critérium'', comme le nommait Schopenhauer.
Mais la communication sociale a aussi un effet constructeur et bien souvent à notre dépend et contre nos certitudes et nos croyances. Les publicitaires ne le savent que trop... Il y a des constructions de sens passant insidieusement par les termes et les mots qui finissent par habiter nos consciences. Les linguistes Sapir et Whorf indiquaient que la langue donnait forme à la culture. Le sociologue Jerome Bruner en fit un développement très juste dans son ouvrage "Quand la culture donne forme à l'esprit".
Je pense, ici, à la communication gouvernementale durant le confinement, communication qui s'est d'ailleurs poursuivie ensuite… C'est à cette occasion que nos dirigeants nous ont "invités" à une "distanciation sociale". L’objectif annoncé était clair : il fallait que nous ne nous contaminions pas, et que nous ne soyons pas contaminés. Mais de quoi s'agissait il en fait ? Il s'agissait simplement d'une ''distance physique d'hygiène'', suffisante pour éviter les contaminations.
Il ne s'agissait certainement pas de distanciations sociales, celles dont la culture nous habille, lors de nos rapports sociaux : il y a une distance entre les gens qui, si elle est très grande n'indique pas la rencontre, et donc la nécessité de se saluer.
Puis il y a cette distance plus proche où la rencontre est considérée comme ayant lieu. Alors nous nous saluons.
Et puis il y a celle-là, plus proche encore, où la conversation s'invite. D'ailleurs, si vous ne parlez pas, le malaise s'installe jusqu'à ce que les gens, gênés, préfèrent s'écarter.
Et puis, il en existe une autre encore plus proche, que l'on nomme l'intime. Ces distances culturelles changent avec les cultures et les environnements. Certes, la distance intime n'est pas la même pour un Touareg dans le Sahel et pour un Parisien dans le métro...
En nommant et en déterminant la distance physique d'hygiène des corps ''distance sociale'', on indique deux choses :
- que les gens n'ont pas d'identité sociale réelle, qu'ils ne sont que des objets, des individus. Donc il n'y a qu'à les diriger comme un troupeau, ou les rouler comme des cailloux...
- que la logique sociale officielle est une logique mécaniste, celle là même qui tue l'individu pour mieux le comprendre. Il n'y a donc rien à en attendre. Dont acte...
Et si vous ne comprenez ni l'une ni l'autre de ces assertions, vous pouvez avoir un sentiment confus que ces notions vous échappant, vous seriez peut-être trop idiot ou trop inculte pour décider...
C'est peut-être justement ce que veulent ces gens qui nous dirigent... ("Laissez-nous faire ! Nous savons ce qui est bon pour vous"), en d'autres Termes, :"On s'occupe de tout, on s'occupe de vous". Mais ceci est un autre article.
Dans un tout autre contexte, quelques amis s'étonnaient de la très grande disparité de croyances et de la multitude des postures politiques et sociales dans ma famille. Certains me dirent alors que les repas de famille devaient être de vrais spectacles ! Je répondais qu'il n'en était rien, que chacun savait ce qui était du domaine de l'essentiel pour chacun des autres. A partir de là, on les respectait, on les écoutait et débattait avec eux, en fonction de ces éléments. De ce fait, chacun était en mesure "d'attraper" les éléments du discours de l'autre, de les discuter à l'aune des fondamentaux "mis en commun", sans anathème, sans jugement, ni catégorisation de quelqu’ordre que ce soit. C'est une autre façon, aussi, de vivre la tolérance.
Dès que nous avions compris que les fondamentaux de chacun étaient bien du domaine de son "sacré", qu'ils "faisaient socle", voire participaient même à sa construction identitaire (c'est cela aussi le sacré), aucune critique à leur égard, aucune déconstruction ne pouvait être entreprise, envisagée, ni même évoquée. Tout le reste pouvait être discuté et débattu en corrélation avec ces réalités-là.
C'est, chez nous, une pratique ordinaire largement partagée dans notre famille nombreuse. Ainsi le croyant convaincu partage avec l’athée. De même, l'enraciné très à droite sera en capacité d'entendre celui qui se positionne très à gauche. Cela vaut pour le catholique avec le protestant, le lacanien avec l'augustinien, le pragmatique avec l'idéaliste, le saint-simonien avec le libertaire, le jacobin avec le girondin, et tous s'aiment, s'apprécient et s'adorent. Un peu à l'instar de la célèbre phrase de Saint-Exupéry : " Si tu diffères de moi, frère, loin de me léser, tu m'enrichis !"
Il semblerait que, dès lors que l'on applique pour soi le bon sens stoïcien, tout se passe parfaitement bien dans le respect des autres et de soi-même. La philosophie, cet amour de la sagesse, est bien de trouver le courage d'agir sur ce sur quoi nous avons la main, d'avoir l'humilité d'accueillir ce sur quoi nous ne l'avons pas, et d'avoir ladite sagesse de bien faire la différence entre les deux.
Vous avez dit… tolérant ? Ceci me rappelle les quatre accords Toltèques :
- Que votre parole soit impeccable
- Quoi qu'il arrive, ce n'est pas vous
- N'en faites pas toute une fable
- Faites de votre mieux toujours...
Mais, je me demande si nous ne devrions pas compléter ces accords-là par quelques sages propositions populaires vraiment stoïciennes :
- "Ne jamais oublier que nous faisons bien trop souvent partie du problème." (Simon Sinek, conférencier)
- "Toutes les personnes qui ont réussi dans la vie ont eu à un moment donné un rêve." (Proverbe Maricopa)
- "Ne jugez pas votre voisin jusqu'à ce que vous ayez marché pendant deux lunes dans ses mocassins." (Proverbe Cheyenne)
- "La force, même retenue, engendre la résistance." (Proverbe Lakota)
Il est sûr aussi que bien d'autres propositions populaires sauraient être ajoutées. Chacun le fera donc...
Jean-Marc SAURET
Le mardi 16 juin 2020





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