"Ce n'est ni le monde ni ce que nous y sommes ou y faisons qui nous font peur, mais l'idée que l'on s'en fait, car la vision guide nos pas. Et sur cela, nous avons la main. C'est là toute la puissance de notre pensée ! " Après avoir durant des années posté ici réflexions et conseils sur le management des organisations, je livre aujourd'hui une vision de la réalité, au plus profond de soi même sur l'être et l'univers. Profitez ! Si vous êtes désireux d'accomplissement personnel, ce blog est pour vous. Fouillez dans ces plus de 500 articles ! Commentez ! Partagez ! Si ces contenus vous intéressent, le droit de copie, même partiel, est sous Licence Creative Commons : chacun est donc libre de les reproduire, de les citer comme il le souhaite, à l'expresse condition d'en indiquer chaque fois la source et de ne pas en faire commerce.

Le mythe et le processus

Cette approche par le mythe et le processus tend à montrer comment nous vivons notre rapport au monde, comment nous le "manageons". Mais avant de traiter la question, rappelons-nous deux principes psychosociaux fondamentaux : "la vision guide mes pas" et "je ne vois que ce que je crois". Non seulement nous bougeons en fonction de ce que nous comprenons du monde, de soi et de l'univers, que c'est bien l'image que je me fais de mon contexte de vie et de moi-même dedans qui détermine ce que je vais faire et comment. Mais nous savons que cette vision est biaisée par nos croyances et nos convictions. Je renvoie à mes précédents articles sur le sujet.
Dans ces conditions, si je comprends mieux comment je vis mon rapport au monde, je pourrai en faire un meilleur usage pour une meilleure destinée. Alors, forts de tout ce "bagage", regardons cela de plus près.
Nous avons déjà vu d'autres éléments complémentaires. A ce titre, j'ai déjà plusieurs fois développé le fait que deux variables déterminantes agissent dans notre rapport au monde , en l'espèce: la culture et la nécessité. 
Ce sont bien ces éléments qui "font société". Il nous reste juste à repréciser que dans le champ de la culture, nous trouvons les représentations sociales, les valeurs, mais aussi tous les éléments reconstruits individuellement dans le frottement de nos expériences avec le réel. 
Dans le champ de la nécessité, nous allons trouver la collection des envies et les besoins, lesquels sont étroitement liés et entachés du champ culturel des représentations sociales. Par exemple, le consumérisme néolibéral développe fortement dans la culture l'hypothèse illusoire et doctrinale d'un bonheur par la consommation des produits et services. "Consommez, jouissez de nos biens et vous serez heureux !"
Tout en gardant ces deux variables en mémoire, parce qu'elles constituent un cadre pertinent pour l'étude, nous allons tenter de voir maintenant quelques éléments impliqués dans ce rapport au monde. Il va s'agir d'apprécier le comment et le pourquoi des actions que nous conduisons au quotidien. C'est-à-dire, en d'autres termes, ce qui fait système. Car ces actions sont toutes orientées. Elles ne sont jamais gratuites, jamais anodines, jamais brouillonnes. Elles répondent à un cadre social, que l'on s'y soumette ou que l'on s'y oppose.
Et dans ce champ social, le rôle de "l'Autre" comme le proposait Lacan, est très prégnant. Miroir, résistance, moyen, opposition ou motif expérientiel, cet autre (ou parfois ce Grand Autre absolu) vient peser sur nos choix, intervient dans nos pratiques et nos actions. Rien, en cette occurrence, ne se fait réellement dans le secret ni totalement dans l'ombre. Tout ou partie est résolument observable à la lumière du social.
Prenons un exemple : A rencontre B et en tombe amoureux(se). D'accord, mais sur quels critères ou éléments ? Sur sa beauté ? Les canons de la beauté sont sociaux. Sur son intelligence ? Les caractéristiques de l'intelligence sont sociales, elles aussi : intelligence pratique, QI, intelligence de situation, intelligence de calcul, analytique ou synthétique. Chacune suit et répond à une nécessité sociale. Bref, les critères de l'intelligences sont culturels aussi. Alors ce serait sur son "charme" ? Mais cette notion culturelle nous est propre, à nous, Occidentaux. La prévalence de l'émotionnel est, de plus, caractéristique de notre évolution postmoderne...
Ainsi donc, pour cela, que fait A ? Il-elle invite B au cinéma ? ... au restaurant ?... à boire un verre ?... ou à faire un tour de manège ? ... ou une promenade dans les bois ? ... ou à rencontrer ses amis, sa famille, voir son lieu de vie ?... à une séance de recueillement ?... à une lecture partagée ? Chacune de ces possibilités répond d'une culture ou d'une autre. Il n'y a là rien d'universel, rien de générique.
La variable de la nécessité, elle, répond à des impératifs sociaux, comme l'honneur, la richesse, la célébrité, la faim, la soif, la protection, le bien-être, le plaisir, etc... Cela indique et valide pourquoi, pour quel motif, dans quel but, en fonction de quel bénéfice, nous agissons. Dans cette variable, nous retrouvons le fait qu'habituellement la majorité des personnes voit d'abord et retient a priori ce à quoi elle croit socialement, communautairement ou personnellement. Il s'agit là de recouvrir sa propre raison d'être. 
De fait si le stimulus, et donc cette invitation à l'action, apparaît déviant, irréel, iconoclaste, asocial, trompeur ou erroné, voilà qui “commence mal”. Pour peu qu'il sollicite la personne à engager un changement de cap, la disqualification de l'autre peut apparaître comme la solution. C’est, hélas, ce qui va permettre de ne rien changer à sa posture, ou à sa propre démarche.  
L'élaboration d'une irrecevabilité du stimulus se transformera en une disqualification de son auteur. Cela revient à la “négation” du contradicteur. Tout élément susceptible de le “salir” pourra être utilisé de manière à ce que son propos devienne irrecevable. Le “procès devient donc exclusivement univoque, et à charge : "Vous dites cela mais vous n'en avez pas fait d'études !", ou bien "Quelle vérité peut bien sortir d'une cerveau xénophobe, homophobe et misogyne !", ou bien encore "Vous n'êtes pas d'ici et avez des intérêts ailleurs !". Les exemples sont légion : "Ne serait-ce pas vous qui avez insulté, provoqué ?". Nous voyons aussi que la part de la mauvaise foi et de la calomnie peut être illimitée... 
Ainsi, sortir du cadre, ou même seulement le critiquer, reste compliqué. D'autant que nous croisons dans notre société les dogmatiques et les bien-pensants qui sont, pour les premiers, les "docteurs de la loi" et, pour les autres, les "pharisiens" d'aujourd'hui. Tous deux sont des "affections" de la pensée qui nous promettent le paradis tout en développant douleurs et afflictions, quand ce ne sont pas quelques tortures morales. La voie de la sagesse nous est socialement vendue comme difficile et douloureuse.
Quand le premier jette des anathèmes, le second invective et porte atteinte par diffamation à l'intégrité de ses opposants. Tout ceci se passe ainsi. Actuellement, le cœur de la problématique économique (que l'on nous vante avec autant de certitudes que de véhémence) est un véritable vivre ensemble bâti sur un mythe "indiscutable" et un processus obligés. C’est justement ce propos que nous “discutons” : le progrès linéaire, le mythe de la croissance continue et le processus néolibéral du marché, de la compétitivité, constituent bien, à eux seuls, une spirale infernale. 
Aujourd'hui, la mécanique économique que l'on nous vend est un dogme. Autant l'organisation, telle qu’elle est prônée, structure et pérennise les mythes et les modes de faire, autant seul l'individu peut y porter la critique en l’assortissant de créativité et d’'innovation. La seule question est : c'est à quel prix ! Corrélativement, nous voyons bien là la puissance sociale de ces variables que constituent la culture et la nécessité.
"Ce n'est pas vrai !" me direz-vous. Ou alors "C'est bien vrai !". L'alternative est crédible : dont acte... Mais, si la réalité est sociale, la vérité n'a rien à voir avec elle. La vérité n'est en fait qu'une quête. Elle est comme l'horizon, une référence, un repère. Mais socialement, soit la vérité est sacralisée, soit elle est confinée, c'est à dire confisquée. Soit la vérité est sur le fond, soit elle est sur la forme des choses. Mais qui (ou quoi) peut en être considéré comme le gardien et le garant ? Rien ni personne. Elle est une convention le plus souvent sociale ou en rapport avec son "sacré". Ainsi, son sens et sa réalité changent d'une culture à l'autre. C'est ainsi, qu'on le veuille ou non...
Celui qui proclame le bien et le mal, le vrai et le faux, sans que vous ne lui demandiez rien est un pharisien. Il appartient à cette catégorie de missionnaires ou de mercenaires dogmatiques de la bien-pensance, des gendarmes autoproclamés de la vérité. Celui qui vous abreuve de conseils sans que vous ne lui demandiez rien est aussi un pharisien. Celui qui se déclare désintéressé quand il œuvre pour le bien de tous est un autre type de pharisien soumis à sa légende. Car la légende donne l'histoire de la réalité et le profil de sa vérité. C'est là que réside le mythe, cette conceptualisation de la légende. Si celle-ci raconte les fondements des croyances, desdites réalités, le mythe les installe en vérité. Voilà la raison des dogmatismes de tous ordres.
Il me souviens cette réplique dans ce mythique film de John Ford, “L’homme qui tua Liberty Valance” : “On est dans l’Ouest, ici. Quand la légende dépasse la réalité, on publie la légende”...
Le mythe est la "véritable réalité" qui organise la vie sociale. Ainsi le mythe du héros, celui du sauveur, celui du martyre, ou encore du "self made man", voire du "rêve américain", etc. sont des guides à l'usage de ceux qui sont prêt à les entendre. Tous ces projets de société, bâtis sur ces mythes, seraient alors des fantômes, des leurres, des "irréalités", du virtuel ? C'est bien possible... Voire même fort probable. Mais les mythes, bien réels, sont socialement bien "nécessaires". Ils ouvrent les champs "mythiques de possibles", et donnent même des indications sur les "modes de faire", des processus de succès. On les trouve, par exemple, dans la culture néolibérale : la compétition, la croissance, la santé du profit, la jouissance par l'objet, etc.
C'est alors la finalité sacrée devient le fondement et la raison d'être de nos actions et projets. Ceux-ci sont atteint par des démarches et parcours singuliers, dans les processus du rapport au monde et de la relation aux autres. Tout ceci fait religion au sens profond du terme. En revanche, ce sont nos failles, les ruptures dans notre histoire, nos fautes et faux pas qui vont nous “tirer d’affaire”. Le paradoxe n’est qu’apparent, car ce sont bien les accidents et hiatus dans notre parcours ou dans notre personnalité, qui vont être la source de notre sagesse, de notre prise de hauteur, de notre relativisme. Ces éléments de la vie, quand ils sont digérés et assumés, nous gardent à une distance convenable du mythe et des certitudes. Ce sont bien ces éléments-là qui nous permettent l'accès à la sagesse pratique et ordinaire. Ils cassent le pharisaïsme et ses fruits d'amertumes.
Quand on est en autonomie, en résilience, en communalisme libertaire, qu'il y ait des prêtres de la vérité ou pas, on s'en moque. Qu'il y ait un système de gouvernance ou pas, Etat constitué (ou non), le résultat est le même. Dès lors,à partir du moment où l’on s’est aperçus qu’ils ne servent à rien, alors, on s'en détache, et l’on n’en tient plus compte.
On ne fait pas la révolution pour prendre un pouvoir que l'on déteste parce qu'il nous oppresse. Il y a le "pouvoir pour (faire)" et le "pouvoir sur (les personnes)". Tout "pouvoir sur" reste le pouvoir. Alors on l'évite, on s'en distancie, on le contourne, on le triche pour construire ce que l'on veut à côté.
J'ai rencontré il y a bien longtemps une communauté de voleurs. Ils vivaient de nombreuses pratiques illégales. Ils tenaient banquet où ils chantaient leur insoumission dans quelques comptines à la gloire de leurs penchants rebelles. Le vieux patriarche, ou du moins celui que j'avais identifié comme tel, me dit : "On ne combat pas les képis. On est tranquilles. On leur en donne pour ce qu'ils veulent. On les contourne, on attire leur regard ailleurs pendant que l'on pratique. Il n'y a pas de fierté à les affronter. Il n'y a que des inconvénients." J'avoue qu'il n'avait pas tord.
Quand le perroquet de Chomsky crie : "Tout le pouvoir au peuple !", et que Chomsky lui-même en appelle à l'autodéfense intellectuelle, le peuple s'en moque. Il est déjà loin. Il a commencé la construction du monde alternatif en dehors du système, sur ses fanges, sur ses oripeaux, sur les marges de l'ancien monde et contre sa mémoire... 
Les alternants culturels, quant à eux, quel que soit l’endroit où ils se manifestent, ne sont partout que de passage. Le monde et les organisations sont leur terrain de jeu et ils jouent, tout en se jouant des objectifs et des pseudo-finalités de ces survivants de l'ancien monde néolibéral. Ils y créent leurs propres œuvres en réseau avec ceux qui, comme eux, bâtissent le monde alternatif. Un "nouveau monde" bien meilleur que le précédent. 
"Mais sera-t-il durable ? Sera-t-il pérenne et suffisamment stable et solide ?" crient les gens de droite et de gauche. Les alternants s'en moquent. Ce n'est pas là le problème. Leur seul objectif est de faire, de bien faire, selon son imagination et le lien social dans lequel ils créent... C'est tout ! 
"Mais quand votre monde alternatif sera-t-il là ?" Aucune importance ! La seule réponse est : "quand il sera fini !" De toute manière, il est déjà là...
L'objectif d'un monde "mécaniste" est exclusivement lié à la croissance, au mieux l'autonomie. L'objectif d'un monde "organique" est la résilience, le bien-vivre ensemble ici et maintenant. Plus personne n'attend plus le temps des cerises. Plus personne n'espère de ce système un monde meilleur. Il le fait...
Si le cœur de la problématique est le "vivre ensemble", alors ce ne sont pas les questions de structure ou les seuls aspects techniques qui importent. Ça, c'est le secondaire. Le fondamental est la relation humaine, l'écoute active, la co-création, l'imagination du demain et de l'aujourd'hui, le "bien-être-ensemble".  Serait-ce quelque peu du domaine fantasmé des "bisounours" ? Sûrement pas. Ce n'est que réaliste car c'est bien là que se trouve la force de création et de réalisation, bien plus que des moyens économiques. Cette sagesse les transcende.
Oui, il s'agit de passer d'une pensée mécaniste à une pensée organiste. Oui, tout est vivant. Il s'agit de s'en "inonder le regard", de s’en "mettre plein les yeux". Bien sûr, les deux variables, à jamais récurrentes dans ce vivre ensemble, sont toujours la culture (la question des représentations, "comment tu le vois") et la nécessité (ce dont nous avons envie et besoin). Le principe réside bien dans ce "penser ensemble les pourquoi" et nous voilà revenus à cette incontournable variable culture. Ce sont bien là nos deux jambes. Elles sont interdépendantes, inéluctablement associées et donc complémentaires. Alors pour bien les voir, mieux se les approprier, mieux nous en "servir", mieux nous conduire ensemble, nous les transformons en mythes et procédures. Mais ce n'est là qu'un aspect pratique.
Ce ne sont pas les règles qui régissent les groupes mais les valeurs que portent les mythes. Justement ces valeurs qui émergent de la culture, protègent la "nécessité". Les seules choses dont le collectif a besoin, ce sont les intelligences partagées. Pour ce faire, la voie, la seule voie, l’unique voie, s’illustre par le dialogue ouvert. Son outil est la conversation et sa fonction effective consiste à laisser les "inimportants" à la porte du collectif.
Inutile de se creuser la cervelle pour trouver des mythes fondateurs. Les peuples premiers nous les apportent sur un parfait plateau culturel. Ces mythes sont leurs propres histoire et leurs visions de l'univers où tout et toutes les personnes d'un collectif sont interdépendantes, où toutes personnes qui se rencontrent ouvrent un collectif. Mais ceux-ci, puisqu'ils ne sont pas nous, qu'ils ne sont pas notre vécu, pourraient nous paraître bien loin et si différents, et leurs mythes trop abstraits ou surfaits, voire peu intelligibles. Eh bien, qu’à cela ne tienne, une référence s’impose à nos yeux abasoudis ! Nous venons nous de vivre cette période d'occupation du Covid-19. Que s'est-il passé ?  
Nous avons assisté à des mensonges successifs de dirigeants apparemment incapables de gérer la situation et peu soucieux de reconnaître leurs erreurs, leurs manquements et leur allégeance aux plus riches, aux grands laboratoires pharmaceutiques. On a pu les surprendre à ne pas vouloir soigner les malades, posant un processus contraire à toutes les recommandations des professionnels et organismes de la santé. La confiance est perdue. Le mépris a changé de bord.
Que s'est-il passé alors ? Nous nous sommes solidarisés comme jamais, apportant  des soutiens réels par des masques, des blouses faits maison, de la nourriture pour tous ceux qui tentaient de soigner nos concitoyens, pendant que les gouvernants agitaient des promesses et payaient de mots les premiers de corvée.
Les gens dans les rues se sont encouragés, ont fêté la solidarité chaque jour, chacun apportant ce qu'il avait : de la musique, du jeu, de l'humour, des idées, de l'aide pour tous ceux qui en avaient besoin. Ici, personne n'a été laissé de côté. Les plus anciens ont été accompagnés, aidés, écoutés. La toile est devenue un grand réseau d'information, de diffusion de trucs et astuces pour faire des masques, de la cuisine simple et bonne, du pain, des habits, du rangement, la leçon aux enfants. Chacun s'est attaché à passer de l'information, ouvrir des débats de connaissance et de vérité. Et tout cela dans l'humour et la bienveillance...
Pendant ce temps-là, la pollution a disparu, les plantes et les animaux sont revenus en ville, montrant que la nature reprenait bien vite toute sa place. On a eu l'impression que la planète était sauvée, et que donc c'était possible. On a commencé à s'inquiéter d'elle et de nous tous lors de la fin de cette période de grand calme. Nous avons vécu là une période fondatrice faite de tout ce que l'on souhaite : humanisme, solidarité, partage, entraide, respect, engagement, la vraie vie ! Et ce sans la police et les gouvernants. Plus besoin de lois, juste du bon sens. Personne ou si peu, désormais, ne souhaite revenir à ce monde du temps d'avant où nous étions méprisés, mis en concurrence, exploités, etc. N'est-ce pas là un mythe fondateur fort ?
Il va falloir s'attacher maintenant à changer les mythes du néolibéralisme : quitter la légende du progrès-bonheur par la propriété et le processus marchand universel de conquête. Il nous faut quitter le mythe de l'argent roi... Il nous faudra remettre l'humain au centre du village, de toutes nos préoccupations. Installer notre mythe nouveau. Mais pour se détacher de nos anciennes bouées, il nous faut déconstruire le mythe qui nous a amené jusqu'à se prendre le mur de l'histoire, celui qui nous a emportés comme une vague de l'océan, celui du néolibéralisme. Nous pouvons imaginer sa déconstruction à partir des six diktats du néolibéralisme, ceux-là même qui l'ont fondé. Ce processus de déconstruction doit faire place nette, et c'est peut-être ainsi que l'on peut l'envisager :
1 -  Il n’existe pas de sociétés (“There is no such thing as society”, disait Margaret Thatcher), de collectifs ou de cultures, il n’existe que des individus. 
Eh bien si, tout est société et l'humain est un animal social. Sans le "vivre ensemble" il meurt. C'est bien ce que nous ont enseigné les fatales issues de chaque édition de l'expérience interdite.
2 -  L’avidité, la soif du profit est une bonne chose. Greed is good. 
Eh bien non, il s'agit là d'une pathologie névrotique. L'expérience en cas de conflits, de situations dangereuses, montre que ce sont les comportements  empathiques, bienveillants, de partage, de solidarité et d'entraide qui surgissent Et ce sont eux qui permettent de sauver la situation et donc chacun des protagonistes.
3 -  Plus les riches s’enrichiront et mieux ce sera, car tous en profiteront par un effet de ruissellement (trickledown effect). 
La doxa a fait long feu... Malgré les discours prometteurs du président français, ledit ruissellement n'a jamais eu lieu. Il n'est que le prétexte à justifier la confiscation des richesses. C'est seulement le partage a priori qui permet à tous et à chacun d'avoir accès aux biens. Seule la solidarité permet le ruissellement.
4 -  Le seul mode de coordination souhaitable entre les sujets humains est le marché libre et sans entraves, et celui-ci (y compris le marché financier) s’autorégule tout seul pour le plus grand bien de tous. 
Eh bien non, toujours non ! Là aussi, il s'agit d'une dérégulation permettant aux plus riches de l'être davantage et cela toujours aux dépends de la masse des plus pauvres. C'est l'intelligence collective, la coopération et le solidarisme libertaire qui facilitent les échanges. Ceux-ci peuvent alors s’effectuer même hors de tout commerce, via le don et le contre-don, via les potlatchs et les pots communs, etc. 
5 -  Il n’y a pas de limites. Toujours plus, c’est nécessairement toujours mieux. 
Nous voyons là le basculement pathologique dans l'addiction. Toutes les addictions créent du déséquilibre et aboutissent à la mort personnelle ou collective. Le "toujours plus" n'a effectivement pas de sens. Il est lié à une notion illusoire du progrès et à l'idée farfelue de l'inéluctable croissance. La vie dans la nature nous montre les vertus des équilibres, et les limites des excès.
6 -  Il n’y a pas d’alternative (“There is no alternative”, comme le proclamait encore Margaret Thatcher).
Voilà le pur alibi de mauvaise foi des néolibéraux. Bien évidemment qu'il y a une alternative, voire même nombre d'alternatives que les initiatives locales et souveraines ont développées. Je pense aux AMAP, aux bars associatifs, aux épiceries solidaires, aux Fab Labs, aux ressourceries, aux écovillages, aux monnaies locales, aux coopératives de production, aux communautés intentionnelles, alternatives, libertaires et autres, etc. 
La liste est encore longue. Nombre de sociétés dites "premières" ont largement expérimenté historiquement et avec succès ces modes organisationnels solidaristes et interdépendants, comme les Navajos, les Lakotas, les Yakis, les Koguy, les Nenetts, les Dogons, les Bushimen, les Aborigènes d'Australie, etc... etc...
Mais la société occidentale, prédatrice et conquérante, ne souhaite laisser aucune place à  la contradiction, même à tout ce qui n'est pas elle. Elle détruit, parque, assujettit, contraint, corrompt jusqu'à l'extinction. Et aujourd'hui, arrivée au bout de son absurdité hors-sol, égocentrée, néolibérale, ultra-consommatrice, c'est elle qui s'effondre.
Au-delà, la porte s'ouvre vers des alternatives joyeuses. Ne pourrait-on penser un souverainisme local, communaliste, convivialiste, associatif ? Un localisme, en fait, et ne pourrait-il pas prévaloir sur toute autre autorité ? Pourrait-il être pris comme la base d'un renouveau sociétal, libertaire, solidariste, pacifiste, humaniste et fédéraliste ? Ne peut-on pas construire dès maintenant, à côté de celui qui s'effondre, le monde que l'on souhaite vivre ? ... fonder quelques villages gaulois ? Je crois savoir que nombre de communautés de ce type existent déjà deci delà de par le monde.
C'est bien en cela que consiste le changement de mythe et de procédure. Tout réside sur ces simples éléments de société. Simple, non ? Comme le disait l'activiste serbe Srdja Popovic : "Voyez grand mais commencez petit !". Personne ne vous suivra si le projet est trop immense, mais si vous commencez à la dimension que chacun peut envisager, alors vous irez très loin...
Jean-Marc SAURET

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