Comme
je l'évoquais dans l'article précédent, notre société a changé
et nos repères, comme nos références, archétypes, valeurs, points
d'ancrage et réalité, ont été bousculés. Le monde d'aujourd'hui,
n'est plus du tout le même qu'hier et nous n'avons rien vu venir, ou
si peu. Pourtant c'est tout le fond de notre culture qui a été
repeint. Mais de quoi s'agit-il ?
On
appelle post-modernité cette période "émotionnelle" et
de grande consommation qui suit la période rationnelle de la
modernité née du siècle des lumières. A quelque chose près, elle
commence avec les années soixante dix, disons après les événements
de mai 68. Il n'y a pas fracture ni de rupture dans le passage de l'une à l'autre, juste un
glissement progressif et nuancé, mais qui s'avère implacable.
Ce
que l'on observe dans le changement, c’est cette sortie progressive
d’une modernité rationnelle, à l'organisation verticale et
pyramidale. On la voyait fondée sur une collection d'individus,
travaillant raisonnablement à l’avènement d'un monde meilleur,
fait de progrès scientifiques et systémiques. C'est à ce moment
que nous avons inventé les grandes idéologies, la rationalité, la
démarche scientifique, l'organisation pyramidale, la troisième
république et la démocratie populaire. Nous les avons
progressivement et majoritairement abandonnées pour cette
postmodernité, comme la nommait le philosophe Jean-François
Lyotard, en empruntant le mots à la critique artistique.
La
fin des années soixante et le début des années soixante-dix vont
voir l'effondrement structurel,
progressif et majoritaire de ce monde de raison. Par le développement
de médias comme la télévision et de ses outils (publicité et
journaux du vingt heure), une société de consommation à tout va
s'installe et fait culture. Le libéralisme économique occupe alors
tous les interstices d'un nouveau lien social. Ce nouveau vivre
ensemble va s'orienter vers d'autres valeurs en faveur de la
surconsommation et fondées sur elle. C'est cela qui va transformer nos relations sociales
et sociétales, nos repères et priorités, et même nos modes de
pensée.
Certains,
comme la psychanalyste canadienne Hélène Richard, ont pensé, et
pensent que cette post-modernité constitue une période de
transition, comme l'a été la renaissance entre le moyen age et la
modernité. J'en suis : cela présage donc d'un "temps d'après".
Je l'ai décrit comme étant l'ère quantique, celle des "alternants
culturels".
Ces
alternants culturels sont pragmatiques et intuitifs. Ils se
comportent en personnes engagées, porteuse de talents et
d'intelligence pratique. Ils "fonctionnent" en réseau, se
lient et se délient en fonction des projets auxquels ils
participent. Ils ont le temps et sont centrés sur l'oeuvre à
laquelle ils contribuent ou qu'ils réalisent. Ils agissent majoritairement
en libertaire, non conflictuels, bienveillants mais fermes et décidés. Ils sont en réaction pragmatique à l'incurie de la postmodernité.
D'autres,
comme le sociologue libéral Michel Maffesoli, pensent que cette
postmodernité est l’apanage d’un temps présent, et aussi celui
du temps qui vient, dans une lente mouvance hédoniste.
Ce
qui caractérise et fonde la post-modernité est ce passage à
l'utra-consommation en même temps que l'omniprésence du libéralisme
dans nos politiques occidentales.
Il
se trouve que les libéraux dits "capitalistes" ont
réellement pris le pouvoir, un pouvoir quasi totalitaire,
confisquant la démocratie au profit du marché. Il n'y a dès lors
de bon citoyen que consommateur. Ce passage a des conséquences
directes sur nos vies : l'urgence, l'omniscience, la suffisance,
l'inconséquence, l'individualisme, la concurrence,
"l'émotionnalité", l'émiettement de l'identité et sa
transformation en apparence de soi. Regardons chacune de ces
caractéristiques dans ses effets...
L'urgence
: La modernité, à la suite du Moyen-âge, vivait par la science et
le progrès, avec, en perspective, un monde meilleur à venir (à
l'ère gnostique du Moyen-âge, il s'agissait du Jugement dernier et
en modernité “du temps des cerises”).
A
contrario, la postmodernité s'installe dans un “ici et maintenant”
total, totalisant, et totalitaire. Dès lors, à partir d'une
politique générale de consommation, la seule perspective de la
jouissance devient le but immédiat de la vie de chacun. Ce système
nous le propose et nous l'impose comme une évidence. Lacan disait
que l'illusion du capitalisme
pouvait se réduire à la formule suivante : ”que le bonheur
passerait à nos pieds et qu'il suffirait de se baisser pour le
ramasser”. Grossière erreur, en effet !... "Si tu n'a pas ce
smartphone, tu es “out” !"
C'est
ce que nous met dans la tête, et en filigrane, la publicité. Elle
est mercantile et c'est là sa finalité : donner l'illusion que le
bonheur est immédiatement accessible et facilement par le seul
objet. Dès lors que l'objet est acquis, le consommateur se tourne
vers le suivant,... et le processus est sans fin, prenant la forme
d’un engrenage aussi insidieux que pervers, jusqu'à la sensation
de dépouillement.
Cette
urgence crée de la précipitation, empêche la prise de hauteur, la
réflexion et génère de la frustration. Et voilà relancé le bon
vieux moteur, pour une prochaine action de consommation. La
postmodernité nous a installés dans une fuite en avant sans
hauteur, sans réflexion, sans conscience. Plus dure sera la chute,
car plus la frustration se manifeste, et plus l'urgence augmente.
Pour
leur part, aujourd'hui, les alternants culturels ont le temps, le présent est
éternel... A suivre !
L'omniscience
: En postmodernité, la confusion entre opinion et connaissance
s'installe. La toile ne nous aide pas. Comme nous le disons parfois,
notre ami Google nous dit tout et n'importe quoi, les informations
comme les bobards, et c'est au "consultant" de faire, ou
pas, le tri.
Dans
ces conditions, si tout ce que la recherche et l'enseignement nous
apportent n'est que l'opinion de ceux qui les disent,... alors chacun
peut à ce moment, penser tout et n'importe quoi, dans la mesure où
tout n'est qu'opinion.
Dans
cette logique (ou réputée telle) du "pourquoi pas", tout
élément est égal à un autre,... ce qui n'est pas “vrai” ! :
non, la terre n'est pas plate !
Alors,
dans les écoles, les universités, les maisons, les assemblées, les
plateaux de télévision, nous assistons
à des confrontations d'ego et d'opinions hors de toute analyse. La
dictature de la forme (être vu et identifié) s’est substituée au
fond.
"J'ai
le droit de le penser !", surgit
dans les conversations comme dans les cours et les débats télévisés.
Cela devient la justification suprême de chaque déviance. La
logique, et la raison nous ont abandonnés. La bêtise s'installe
dans l'arrogance.
Pour
leur part, les alternants culturels ont le sens du
réseau, de l'intelligence partagée et ça va changer bien des
choses...
La
suffisance :
En revanche, au lieu de rendre modeste,
cette posture d'ultra-consommateur a
effacé la connaissance dans le champ social. Elle n'a plus de place
ni de raison d'être. Dès lors, tout le monde est intelligent, ou
pense qu'il l'est, et il n'y a aucune raison à ce compte là, qu'il
ne le soit pas. L'arrogance et la suffisance s'installent dans les
rapport sociaux à coup de "pourquoi pas ?".
Il
n'y a là aucune mauvaise intention, juste une incompétence, liée à
cette incapacité à raisonner. On la retrouve doublée par cette
impossibilité à réfléchir librement, à considérer les faits et
les éléments corrélés aux sujets de débats et de conversation.
J'y reviendrai bientôt... "L'imbécile ne sais pas que le sage
connaît la lune et les étoiles, quand il ne regardait que le bout
de son doigt". Alors l'imbécile accuse le sage de bouffonnerie,
il le traite de rêveur, voire d'antisémite ou d'homophobe.
Pour
leur part, les alternants culturels, pragmatiques, ont le sens de l'oeuvre, de la relativité de leur identité dans l'action, le sens de ce que j'ai nommé "l'identation", l'identité par l'action...
L'inconséquence
: La confiscation par le consumérisme de l'intelligence des choses
et des phénomènes produit cet effet sur les gens : ils perdent le
sens de la réalité des choses. Ils ne
voient plus leur propre impact sur leur environnement, sur le vivre
ensemble et la vie de la cité. Ainsi, on voit des tas
d'ordures s'amasser dans des forêts et ravins, dans les fossés sur
le bord des routes, le long des voies rapides de circulation
automobiles, ou à coté des poubelles prévues à cet effet.
Le "si j'ai envie" tant entendu,
est le symptôme de cette inconséquence.
Nous savons combien celle-ci est dévastatrice...
Elle
s'accorde très bien avec la consommation
: il a fallu développer des campagnes
d'information, dites "de conscientisation", pour que les
gens changent leurs comportements. Mais ne soyons pas dupes. Le
marché nous indiquait dans les années soixante-dix que le moteur
diesel produisait moins de CO2 que le moteur à essence. C'est vrai
et ça l'est toujours. Mais pour des raisons commerciales (la mévente
de l'essence) la ''vérité'' s'est inversée.
En
effet, à cette époque, cette campagne d'information intéressait
les pétroliers car le gas-oil leur restait sur les bras, malgré une
ouverture grandissante sur le marché agricole, industriel et le
chauffage domestique. Il faut juste savoir que d'un baril de brut,
ils tirent une quantité constante de kérosène, de gas-oil et
d'essence, et toujours dans une même proportion, inchangée !... Les
ventes de véhicules diesel ont donc augmenté, consommant ce gas-oil
invendu. Et ce, jusqu'à ce que la consommation s'inverse, laissant
sur les bras des pétroliers une masse importante d'essence qui ne se
vendait plus.
Il
fallait donc inverser les représentations et l'on trouva une
pollution particulière aux moteurs diesel : les particules fines,
que les pots catalytiques sont censés brûler... Une nouvelle
campagne de "conscientisation" vit donc le jour, avec ses
nouveaux jeux d'acteurs, mais toujours au bénéfice des grandes
puissances d'argent.
Tout
ceci est possible sans encombre. Il n'y a rien de mal à cela, nous
en sommes d'accord. Je me pose juste la question de la continuité
comportementale et ce qui se passe quand les champs se croisent...
On
comprend là comment le capitalisme libéral joue et sait jouer sur
ces variables de "représentations-culture" et
"d'intérêts-nécessité" des gens (je n'arrive même plus
à écrire le mot "citoyens").
Pour
leur part, les alternants culturels vivent la conséquence de leurs actes. Ils réinventent la résistance par la désobéissance individuelle, car seule l'oeuvre compte, la réalisation de soi dans celle de l'oeuvre réalisée, partagée...
L'individualisme
: Dans les conditions de la suffisance,
les gens ne se rencontrent plus. Ils se côtoient. Au mieux, ils
s'affrontent, se toisent en se comparant ou rivalisent d'une manière
ou d'une autre. Ce peut être symboliquement dans des rites qui leurs
sont propres, mais cela peut aller parfois jusqu'à l'affrontement.
Proudhon doit se retourner dans sa tombe, lui qui clamait que la
liberté augmente à la rencontre de l'autre, en précisant que la
coopération était naturelle et indispensable.
Il avait bien compris et écrit que le capitalisme détruisait ces
"solidarités" pour lui si gênantes. Il savait que l'individualisme
servait la consommation et faisait taire
les rébellions.
Le
capitalisme libéral a donc réussi. Proudhon cependant pensait que
les mots de liberté et de solidarité
se superposaient, devenant en cette occurrence, quasi
interchangeables. La consommation individualise les rapports à la
jouissance, sa quête et les usages y afférant. Si
le marché parle de regroupement, de vie
de groupe, ce n'est qu'autour de l'objet, du produit qu'il
commercialise, exclusivement, et dans toute l'acception du terme.
Le capitalisme libéral est la tombe de la liberté et des
solidarités.
Pour
leur part, les alternants culturels ont compris que la construction se fait en réseau dans l'adjonction des compétences dans une vision collective de l'oeuvre à accomplir, qu'elle soit physique ou projet de société...
La
concurrence : Les
valeurs du marché, comme le profit et la concurrence sont devenus
des valeurs sociétales. Il ne s'agit
plus d'être heureux mais d'être riche. Le bonheur n'ayant de sens
que dans la consommation, il s'est
séparé de ses causes et de ses objets, comme le plaisir de faire,
d'avoir réalisé, d'avoir contribué, avec la fierté du bon travail
accompli, le partage et la célébration, etc… À partir de ce
moment, les consommateurs sont en concurrence pour tout et n'importe
quoi.
Il
n'y a qu'à se rappeler les combats de consommateurs dans les
magasins pour obtenir quelques pots de
pâtes chocolatées à l'huile de palme à "prix cassé".
Ce sont les consciences des consommateurs qui sont cassées. Ce sont
les liens sociaux qui sont détruits. Ce sont les chemins vers le
bien vivre qui sont brisés, défoncés...
Plus
personne n'a l'idée de se réunir pour réussir,... sauf sur les
ronds points ! Ainsi, la sagesse revient par les territoires. Nous y
reviendrons...
Pour
leur part, les alternants culturels ont compris que la concurrence est destructrice de résultat, que la coopération et la convergence sont bien plus efficaces et totalement recevables dans le respect des engagements de chacun...
L'émotionnalité
: Sur quels ressorts fonctionne ce système absurde ? Sur les
émotions et sensations des gens : celles que produisent l'avidité,
la frustration et leur mise en concurrence ou compétition.
Effectivement, la place de la raison pour décider et faire nos choix
a, culturellement, été remplacée par l'émotion. Cette émotion
que produit sur nous la publicité, et ce, au moment même où elle
nous présente ses produits. Je
pense à l'humour pour nous vendre du crédit ou de l'assurance, la
fierté d'être supérieur pour nous vendre une banque, la sensualité
d'une voiture, etc.
Je repense encore à ce "et si j'ai envie" que l'on entend
fréquemment pour justifier des choix qui paraissent incohérents ou
absurdes,... parfois plus proche de la soumission que d'un quelconque
progrès ou mieux être.
Avec
cette nouvelle rhétorique, il y a plus d'émotions que de raison.
Les facteurs de décision relèvent bien plus de celles-là que de
réflexions. Serions nous encore dans une recherche de la vérité,
ou seulement cantonnés ou réduits à un contexte de séduction
permanente ?
Pour
leur part, les alternants culturels savent bien que l'émotion est un moteur, et qu'elle est plus puissante quand elle est dans l'action réalisatrice, dans la contemplation de l'oeuvre accomplie, dans la satisfaction du travail bien fait, dans l'appréciation du partage, du lien social...
L’émiettement
de l'identité : Comme nous savons
que l'identité est une activité incessante de
vérification chez l'autre de ce que nous sommes, le résultat en
est en permanence modifié par une sorte d'effet miroir.
Là
où la raison faisait des “construits sociaux” d'identités
résilientes, on retrouvait alors, des facteurs souvent liés au
métier, à la fonction ou à la lignée. Nous sommes aujourd'hui
face à des fluctuations de retours dépendant, le plus souvent, de
l'émotion du moment, de la consommation, (ou pas) de produits et
services, voire de l'air du temps. La résultante peut également se
trouver liée à l'arbitraire, lié à la sensation de l'autre. Amis
un jour, rivaux un autre, adversaires puis amants, voilà un des
circuit fluctuant au possible.
Par
ailleurs, la diversité des groupes sociaux d'appartenance éphémère,
comme les réseaux sociaux, crée des retours d'image aussi divers
que variés, et parfois contradictoires. Ainsi il faut être des ''Me
Too'' ou du quelconque courant montant, hurler avec les loups et les
louves... dont les ''raisons'' sont toujours bonnes, évidentes.
Mais
qu'importe, selon les émotions ressenties, on "efface"
l'un, se lie à un autre, adhère à un groupe et quitte
l'autre. Le zapping est devenu le sport universel du postmoderne, sur
le simple "j'ai envie" et "je n'ai pas envie".
Ici, le client est roi et, comme ce sont les ego les plus simples qui
sont ici flattés, le message est bien passé.
C'est
à cette occasion que l’on découvre des personnalités éclatées.
Ce bon père de famille peut être à la fois un voyou au boulot, un excellent
paroissien et bon guitariste au temple, un faible peureux dans
l'équipe sportive, un participant à la gay-pride parce que ça lui
plait (il a même un ami gay), un chauffard macho en voiture, et
toujours un bon papa quand il rentre à la maison.
Quand
par exemple on retrouve le collègue
sportif à son boulot ou le croise dans la gay-pride en traversant la
rue, quand le conducteur qu'il "chauffarde" est le pasteur
de sa paroisse, quand son fils ou sa fille viennent le voir au stade, que se passe-t-il ? Et ainsi de suite. La personne, loin de toute rationalité risque de ne pas
"analyser" ce qui va alors en résulter.
Peut être alors va-t-il devenir victime de l'images de lui-même
reçu dans cette mise en "contradiction".
Pour
leur part, les alternants culturels ont retrouvé le sens de l'identation...
Alors, une
autre question me taraude : quel type de société pourrait encore se
développer dans ce "lien social" individualiste,
concurrentiel, hédoniste, émotionnel, etc. Ceci apparaît comme un
oxymore, et je vois bien, dans ce paradoxe, soit l'ensemble se
déliter dans un totalitarisme libéral et de consommation, soit
imploser pour laisser place à un "temps d'après" pourquoi
pas girondin et libertaire, comme l'évoque le philosophe Michel Onfray. C'est cette projection que mettait en
avant Hélène Richard. Je pense aussi que ce sera cela, la
résultante... Les "alternants culturel" œuvrent déjà,
et nous avons à nous en occuper aussi, puisque nous sommes dans ce monde.
Alors,
comment pourrait-on régler ce long,
lent et dramatique dérapage ? Très certainement en travaillant sur
les deux variable que sont la culture et la nécessité. Il s'agit
tout d'abord de faire évoluer les valeurs de fond de la société,
pour en revenir à un humanisme
libéral (ou libertaire). En l'espèce, il s’agit bien de cette
philosophie qui pense la société comme un système vivant, par les
gens et pour les gens. Il s'agira de ranimer aussi les valeurs de
liberté, d'égalité et de fraternité, en les remettant à l'ordre
du jour. Peut être faut il affirmer (ou rappeler) que l'égalité se
construit dans une liberté solidaire, et que le groupe est capable
de s'autodéterminer, de faire le choix de ses orientations. Il
s'agit bien, en en cette occurrence, d’une véritable
"revitalisation" de la commune.
Mais
il existe un autre élément que nous pouvons prendre en compte : le
fait que l'humain est un être vivant, pas un individu. Il s'agit
bien là d’une personne faite de chair et de mental. On retrouve,
dans ce processus, une interaction permanente entre ces deux pôles
actifs. Ceci nous permet d'affirmer que nous sommes, en présence
d'une réelle osmose entre le corps et l'esprit. Ce sont bien ces
mêmes éléments que l’on va retrouver dans les phénomènes de
somatisation. Travailler sur les valeurs et les représentations,
c'est aussi améliorer les corps. Travailler sur les nécessités,
comme le développement physique et sa santé, et plus généralement
sur son bien être, c'est aussi travailler sur la santé morale, son
équilibre et son développement.
Existe-t-il
une suprématie du corps sur le mental ou du mental sur le corps ? Ce
n'est pas là, la bonne question. Elle n'a d'ailleurs aucun sens. Il
s'agit bien là d'une interaction constante de deux partie de la même
pièce. Le côté pile prévaut-il sur le côté face d'une monnaie,
ou vice versa ? Comme dans la gestion de tout système, il s'agit
bien de travailler sur l'interaction entre ces deux variables, que
constituent la culture et de la nécessité.
Forts
de tout cela, comment pouvons nous repenser notre vivre ensemble ?
Parce que nous sommes face à l’effondrement d'un système
néo-libéral, ou capitaliste libéral, nous avons l'urgence de
réinventer le monde qui vient. J'en ai déjà beaucoup parlé et
j'ai formalisé cette sociologie de l'alternance culturelle, fondée
sur l'oeuvre, la promesse de la personne, le réseau et
l'impermanence, cette sorte d'intemporalité, d'éternité du
présent.
Dans
les faits, c'est l'avènement d'un communalisme libertaire comme l'a
théorisé Murray Bookchin, d'un municipalisme libertaire comme le
pensait Proudhon et dont j'ai déjà dit que le temps qui vient est
le sien, du moins lui donne raison. Nous vivons déjà les bars associatifs, les épiceries solidaires, les bibliothèques de rue, etc. qui nous indiquent la reconstruction dans les communes de la vie sociale solidaire et directement démocratique, interactive et pragmatique. De nombreuses de ces entités sont en lien entre elles par le biais associatif ou confédéral. Proudhon l'avait rêvé et nous l'avons fait...
Pour
construire cette transition, nous avons la voie toute tracée, celle
de la désobéissance civile non violente, et que je nommais "l'en
paix" dans un précédent article. Pour cela, il nous faudra aussi, là où la dynamique n'est pas encore apparu, prendre le temps d'assemblées constituantes, pour mieux comprendre
le présent, et mieux envisager les possibles à construire où se
fera un retour des solidarités. Enfin, alors, la devise républicaine
française aura du sens : Liberté, Egalité, Fraternité...
Jean-Marc SAURET
Le mardi 17 mars 2020
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