"Ce n'est ni le monde ni ce que nous y sommes ou y faisons qui nous font peur, mais l'idée que l'on s'en fait, car la vision guide nos pas. Et sur cela, nous avons la main. C'est là toute la puissance de notre pensée ! " Après avoir durant des années posté ici réflexions et conseils sur le management des organisations, je livre aujourd'hui une vision de la réalité, au plus profond de soi même sur l'être et l'univers. Profitez ! Si vous êtes désireux d'accomplissement personnel, ce blog est pour vous. Fouillez dans ces plus de 500 articles ! Commentez ! Partagez ! Si ces contenus vous intéressent, le droit de copie, même partiel, est sous Licence Creative Commons : chacun est donc libre de les reproduire, de les citer comme il le souhaite, à l'expresse condition d'en indiquer chaque fois la source et de ne pas en faire commerce.

Difficiles communications ? Non...

Je partageais avec un ami proche quelques-uns de mes articles. Il se trouva que, au cœur de l'un d'eux, quelques passages semblèrent le heurter. Ils résonnaient avec quelques violence et radicalité à son oreille, lui donnant la sensation que la forme empêcherait le partage du fond. Sur ce passage très proudhonien libertaire, il s'agissait pour moi de dire directement et le plus simplement possible quelque chose qui m’apparaissait comme une évidence. J'avouais prendre le risque de ne pas être entendu. J'en étais tout à fait conscient.

Mais rappelons nous ce que nous indique la théorie sociologique dite des représentations sociales : nous n'entendons qu'à partir de ce que nous savons déjà. Cela signifie que nous "ancrons" l'objet nouveau sur notre connu et accepté, c'est à dire selon des références que nous nous sommes construites par la culture et l'expérience. Dans ces conditions, nous comprenons que ce ne sont pas les choses que l'on voit mais le sens que nous leur trouvons... 

Par exemple, ce n'est pas l'arbre que nous voyons mais un peu de son sens pour nous, via quelque chose de sa finalité qui nous occupe et à quoi elle renvoie. Ainsi, pour l'un, cet arbre sera le capteur de gaz carbonique local. Pour un autre ce sera du bois de chauffage pour un hiver douillet. Pour un troisième, ce sera le potentiel d'un magnifique meuble. Pour un autre encore, la noblesse de la créature, un symbole de vie. Pour un tout autre encore, un matériau d'une certaine densité capable de propager magnifiquement des sons. Pour encore un autre, un grand frère porteur de bonnes vibrations naturelles, ou peut être un élément de nature, ou de patrimoine, que gèrent les services des Eaux et Forêts. Mais pour un autre encore, ce peut être un peu de tout cela...

De la même façon, ce qui me paraissait abscons ou absurde, il y a quelques années, peut me sembler évident aujourd'hui. La réciproque doit pouvoir se vérifier. Il en va de même pour nos "écoutants" qui ne peuvent entendre que ce qui leur semble plausible. C'est là que se trouve la grande difficulté dans nos échanges. Nous n'avons parfois ni les mêmes références, ni la même symbolique... ce que l'on appelle aussi une "vision du monde". Combien de fois avons nous entendu, ou nous sommes nous entendus dire, "Je ne peux pas entendre ça !" précédant une coupure de communication, une rupture de dialogue ?

Mais nous savons qu'à ces fondamentaux s'ajoute l'attraction des enjeux et des intérêts, lesquels déforment les représentations, un peu comme la masse, dont parlait Einstein,  qui déforme l'espace... Ainsi, nous ne sommes pas vraiment prêts à voir tous la même chose, ni à nous comprendre entièrement, et pourtant...

Ce n'est pas tout : selon la manière dont nous considérons notre interlocuteur, nous donnons crédit ou non à son propos. Avec un minimum d'empathie véritable, toute écoute bienveillante et attentive nous est donc possible. Mais comment faire ?

Il me revient cette historiette que je racontais à mes étudiants (et autres participants), dans mes formations intégrant ce sujet. "Le matin, en allumant la radio dans ma salle de bain, j'entends le spécialiste de la bourse indiquer qu'il est temps d'acheter des actions XY car, vu la conjoncture actuelle elles vaudront au moins le double dans quelques mois. Ce propos très loin de mes préoccupations glissait alors sur mes oreilles et, n'ayant aucune affinité avec ce spécialiste, je n'en fis rien. Mais enfin, bref, ce devait sûrement être vrai...

Sortant du bus qui me déposait à le porte de mon travail, je tombais sur un "clochard aviné" qui me dit, avec une voix approximative, que "il était temps d'acheter des actions XY car, vu la conjoncture actuelle elles vaudront au moins le double dans quelques mois." Ne pouvant donner aucun crédit à ce personnage qui semblait témoigner de bien autre chose qu'une quelconque spécialité à l'enrichissement personnel, je passais mon chemin sans rien noter... peut-être en lui concédant une petite pièce de monnaie.

Arrivé à mon bureau, Paul, mon collègue joueur et toujours à l’affût des bons coups, me dit que "il était temps d'acheter des actions XY car, vu la conjoncture actuelle elles vaudront au moins le double dans quelques mois..." Connaissant bien le bougre, sympathique mais peu raisonnable, je lui souris avec sympathie et incrédulité.

Mon patron passa alors la tête dans l'embrasure de ma porte et me lança : "As-tu écouté les conseils boursiers ce matin à la radio ? Il semble qu'il soit temps d'acheter des actions XY car, vu la conjoncture actuelle, elles vaudront au moins le double dans quelques mois...." Je le regardais avec attention et commençais à faire quelques plants sur la comète...

Ce n'est effectivement pas le contenu du message qui me le fait apprécier mais surtout ce que représente, à mes yeux, le porteur dudit message. Il est, en la matière, son "référent". L'information n'est donc pas un simple objet. Elle est avant tout une "relation"... 

Allons encore un peu plus loin, et intéressons nous aux éléments contenus dans le discours, ce dont il est significatif ou pas. Il se trouve qu'il sollicite aussi d'autres références ailleurs dans nos têtes et nos cœurs...

Je repense à cette tendance actuelle, responsable de nombre de comportements, dans le traitement de la problématique de la différence des genres. Celle-ci voudrait protéger et punir les porteurs du genre : protéger les femmes et punir les hommes qui les battent. Ceci est sans doute juste, mais cela me fait penser à un comportement tout aussi régressif, celui qui consiste à voiler les femmes parce que les hommes développent envers elles des émotions fortes.

Ce ne sont pas les individus qu'ils faut punir ou protéger comme des objets mais la vision que l'on a de chacune et de chacun. Il s'agit de porter une attention aiguë à ce qui fait le lien social, ou y participe. En lieu et place de contraintes, de mise sous contrôle de l'autre, c'est la bienveillance et l'amour de cet autre qu'il nous faudrait développer. C'est à dire, l'émotion lié dans le regard de l'autre... Je m'explique. Il s'agit de traiter du sens que les choses prennent dans nos regards, plutôt que de traiter des objets eux-mêmes comme si leurs sens étaient absolus ou universels.

Certains, pourtant, seraient tentés de dire que cette "bienveillance influente" est impossible à mettre en oeuvre. Je m'en étonne car les publicistes savent très bien lier, dans le cœur du futur client, une émotion avec l'image d'une voiture. Non ? Alors, pourquoi tout cet argent dépensé  afin d'en gagner davantage ? Ne pourrait-on pas l'utiliser afin de créer un lien social de qualité dans les cœurs des protagonistes ? Nous y voilà !

Une fois de plus, il s'agit bien de travailler sur le sens (l'image, disent les publicistes et les communicants) et non sur la "répression",  ou la contrainte qui consiste à contenir, maintenir, dresser, menacer ou punir, etc... Mais par quel tour de passe-passe, par quel outil ou par quelle posture pourrions nous réussir cette magie ?

Je racontais en formation cette historiette imaginaire afin d'amener les participants à saisir ce qu'était le concept "d'assertivité". Je racontais qu'un de nos ancêtres, forcément commun, s'était trouvé nez à nez avec un mammouth. Très judicieusement et pour éviter de se faire écraser sous ses grosses pattes, il avait fui. J'ajoutais qu'il avait bien fait car, sans cela, nous ne serions sûrement pas ici aujourd'hui. Donc, leur disais-je, "la fuite, c'est bien !". Les participants acquiesçaient...

Notre ancêtre commun rentra donc au village et raconta son "nez-à-nez" avec ce "garde à manger sur pattes". S'ils y allaient tous, pensèrent-ils, avec des lances et des flèches, ils avaient une chance de manger tout l'hiver. Cette agressivité leur était donc salutaire. Ainsi leur disais-je "l'agressivité, c'est bien", et les participants acquiesçaient.

Mais, poursuivais-je, la toison du mammouth était si épaisse que ni les lances ni les flèches ne pouvaient la traverser. Ils rentrèrent bredouille au village et s'en confièrent au vieux sage de la communauté qui leur dit : "Nous allons lui tendre un piège. Nous creuserons une fosse dans un passage étroit. Nous placerons un pieu vertical et acéré au fond. Nous masquerons le trou et nous y attirerons ce "Garde-à-manger-sur-pattes..." C'est ce qu'il firent : cela fonctionna., et ils purent enfin dîner... C'était là de la manipulation et j'affirmais donc que "La manipulation, c'est bien !"... et tous acquiescèrent.

Seulement voilà... tout ce qui marchait si bien pour gérer le mammouth et l'environnement devenait délétère et dysfonctionnant entre les membres de la tribu. Se fuir, s'agresser et se manipuler semait la zizanie entre eux ! En effet, parce qu'inscrites dans le langage, ces postures touchaient à l’ego de chacun qui, dès lors, se défendait.

Nos ancêtres inventèrent alors "l'assertivité", c'est à dire, une relation sans fuite, sans agressivité et sans manipulation : juste une affirmation assumée de soi (Je), complétée seulement par des faits sans aucun jugement... L'expression vient du verbe anglais "to assert", qui signifie "s'affirmer", "faire valoir". Nous construisîmes à partir de là quelques exemples et pratiquions quelques exercices pour s'en imprégner : il s'agissait, en l'espèce, de pratiquer l'expression factuelle de façon totalement "désémotionnalisée" (si l'on peut dire). Nous vîmes très vite que tout cela marchait assez bien. Une seule réserve, peut-être, et ce  constat permettant de dire que la pratique restait difficile à maîtriser. Il en fallait très peu pour qu'une assertion s’imprègne de nos jugement involontaires et de valeurs trop évidentes.

Cette posture assertive développée en management, permet de tendre vers l'efficacité relationnelle attendue, dans le respect des autres et de chacun, sans particulariser quiconque. C'est là le début factuel de la bienveillance.

Ne pensez vous pas qu'il ne serait possible de travailler ensemble cette posture bienveillante, en accompagnant ainsi quelques  dirigeants lucides et attentifs, avec l'aide de quelques consultants aguerris ? Elle permettrait un lien social de meilleure qualité, je crois ! Si nos dirigeants prenaient exemple sur l'entreprise pour gérer la vie de la nation, alors, sans doute seraient-ils mieux à même de s'inspirer du meilleur ? Mais peut-être ces éléments ne sont-ils pas dans leurs références, après tout...

Alors, oui, ce ne sont pas les sujets qu'il faut punir ou protéger, mais la qualité du lien social qu'il nous faut restaurer afin de l'assurer ! C'est tout à fait fondamental et réalisable. Il nous faut juste corriger notre regard. On s'y aidera mutuellement, je crois...

Jean-Marc SAURET

Le mardi 21 janvier 2020


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