"Ce n'est ni le monde ni ce que nous y sommes ou y faisons qui nous font peur, mais l'idée que l'on s'en fait, car la vision guide nos pas. Et sur cela, nous avons la main. C'est là toute la puissance de notre pensée ! " Après avoir durant des années posté ici réflexions et conseils sur le management des organisations, je livre aujourd'hui une vision de la réalité, au plus profond de soi même sur l'être et l'univers. Profitez ! Si vous êtes désireux d'accomplissement personnel, ce blog est pour vous. Fouillez dans ces plus de 500 articles ! Commentez ! Partagez ! Si ces contenus vous intéressent, le droit de copie, même partiel, est sous Licence Creative Commons : chacun est donc libre de les reproduire, de les citer comme il le souhaite, à l'expresse condition d'en indiquer chaque fois la source et de ne pas en faire commerce.

Le mythe de l'homme providentiel

Une des singularités de notre culture française, outre une affection profonde pour les systèmes bureaucratiques, est le mythe de l'homme providentiel, ce sauveur, ce leader, ou ce "dirigeant éclairé". Il ne s'agit pas du développement de héros de type "Marvel", ces bandes dessinées américaine pleines de Captain-America, Hulk et autres Spider-Man. Non, nous n'avons pas le culte du héro solitaire (plutôt mal vu par nous par ailleurs et l'on s'en méfie) mais bien de l'homme providentiel qui viendra orienter, diriger, animer le groupe, l'entreprise, l'association. Nous avons, en quelque sorte, le culte du leader. Nous avons peut-être coupé la tête au roi mais nous comptons toujours sur lui...
Ainsi, nombre de nos partis politiques ressemblaient à un aggloméra autour d'un homme porteur de sens. Je l'ai plusieurs fois écrit : nos institutions, nos organisations en ont besoin. La particularité de ces hommes providentiels est qu'ils concentrent tous les pouvoirs sans que cela n'affecte personne et ne pose question à quiconque. Le preuve en est cette particularité française que constitue la fonction centrale de P-DG dans nos grandes entreprises. Bien de nos voisins Européen et Anglo-saxons se préservent de cette concentration de pouvoirs et préfèrent même des instances dirigeantes et "contrôlantes" séparées et indépendantes, comme les Directoires et Conseils de surveillance. Nos structures administratives territoriales ont bizarrement conservé cette "con-fusion" entre un maire ou président d'assemblée et son directeur général. Mais comme le marque la phrase précédente (qui ne fait que reprendre un usage linguistique ordinaire et commun), il s'agit du président et de "son" directeur général, lequel "saute" s'il n'est pas absolument fidèle, dévoué, "hyper loyal", mais aussi pratiquement à chaque changement de maire ou de président. Dont acte...
Ce système fonctionne, comme tout système, grâce à l'adhésion ou à la soumission des collaborateurs. En cette occurrence, cette posture est favorisée soit par le désir de chef emblématique, de leader porteur de sens, soit par la mécanique ordinaire de montée vers le pouvoir. Cette dernière est en quelque sorte l'âme des systèmes bureaucratiques où chacun se soumet aux dictas de l'autorité, même à contre-éthique, de manière à profiter de l'organisation, de "l'ascenseur social", fut-il "favoritif" et "prérogatif". Il s'agit, en tout objectif, de faire partie de ceux qui "montent". Par ailleurs, nous savons bien que la couleur du Pacha colore toute l'organisation. Si le dirigeant est bienveillant et attentionné, toute la ligne hiérarchique aura tendance à l'être. S'il est autoritaire et directif, toute la ligne hiérarchique aura tendance à l'être aussi.
Ici, dans ce système bureaucratique bien français, le patron ou la patronne n'a rien d'un personnage providence. Les couloirs du pouvoir sont bien plus importants que la raison d'être, que la cathédrale à construire, que l'oeuvre à produire. Mais pour tous ceux dont le comportement ressemble davantage à la majorité des collaborateurs, comme j'en ai plusieurs fois parlé, pour qui la question du sens est motrice, alors la dimension de ce personnage providentiel, porteur de sens, gouverneur (au sens de "maître du gouvernail"), joue toute sa fonction.
Regardons quelques instants, quels sont nos mythes constructeur de notre culture. Ce sont Jeanne D'Arc et Clovis, sortis des fontes de l'histoire par les républicains en quête d'emblèmes rassembleurs et identitaires. Que nous a-t-on enseigné en histoire à l'école ? Des monographies de héros : Vercingétorix, Charles-Magne, Louis 9 dit Saint Louis, Henry IV, Du Guesclin, Bonaparte au pont d'Arcole, etc. et j'en passe. C'est une collection de héros, inscrits dans leurs paraboles singulières, qui ont chacun apporté par leur action une solution définitive. Comment traitons nous nos héros ? En leur faisant descendre les Champs-Elysées  sur le toit d'un bus ouvert, en leur offrant la sépulture dans un panthéon. On baptise des places et des rues à leur nom. Quelques statues ornent nos places à un instar (moindre) de ce qui se fait dans les pays totalitaires, lesquels ont beaucoup développé le culte de la personnalité.  Il est normal, alors, que notre culture attende toujours l'homme providentiel puisqu'elle le célèbre et en institue le principe.
Alors, que se passe-t-il vraiment ? La population attend que le personnage providentiel fasse ce qu'elle-même aurait pu faire toute seule. Ainsi, ce culte participe-t-il à l'attente inactive que l'on constate dans nos tendances posturales. Et quand certains de nos héros ont fait de la résistance une identité glorieuse nationale, quand l'après guerre en a fait la condition pour participer à la reconstruction nationale, il est normal que, leurs traces persistant, le comportement conforme s'installe et perdure : résister quoi qu'il en soit contre tous les changements.
Des traces culturelles témoignent de cette demande de subsidiarité ascendante. Comment se fait-il que, dans la fin des années quatre-vingt-dix, les ouvriers de Danone, Heineken ou de Moulinex, leurs usines fermant, se soient adressés à l'état pour conserver leurs emplois ? Ce n'est pourtant pas du ressort de celui-ci. Mais l'état-père est alors appelé à la rescousse comme un sauveur providentiel. Le phénomène c'est plusieurs fois reproduit. Souvenons-nous de cette expression populaire fustigée par Coluche "Mais que fait la police ?". Elle est déclinable à souhait : "Mais que fait l'état", "Mais que fait le maire ?" ou encore "Mais que font nos dirigeants ?". Quelle est l'élection la plus populaire en France ? Celle de son président de la république. Il y a dans notre culture cette attente constante de l'homme providentiel, fut-il une femme comme Jeanne.
Mais alors que faire ? Il nous suffit de faire comme le font les "alternants culturels", cette population montante, pragmatique, humaniste, fonctionnant en réseau, comme je les ai plusieurs fois décrit : nous impliquer, prendre en charge et faire nous même. Beaucoup d'entre nous n'ont pas attendu et le monde associatif continue de palier tout ce que l'état ne fait pas, ou ne sait pas faire. Saluons leurs actions et marchons là, dans leurs pas.
Jean-Marc SAURET

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