"Ce n'est ni le monde ni ce que nous y sommes ou y faisons qui nous font peur, mais l'idée que l'on s'en fait, car la vision guide nos pas. Et sur cela, nous avons la main. C'est là toute la puissance de notre pensée ! " Après avoir durant des années posté ici réflexions et conseils sur le management des organisations, je livre aujourd'hui une vision de la réalité, au plus profond de soi même sur l'être et l'univers. Profitez ! Si vous êtes désireux d'accomplissement personnel, ce blog est pour vous. Fouillez dans ces plus de 500 articles ! Commentez ! Partagez ! Si ces contenus vous intéressent, le droit de copie, même partiel, est sous Licence Creative Commons : chacun est donc libre de les reproduire, de les citer comme il le souhaite, à l'expresse condition d'en indiquer chaque fois la source et de ne pas en faire commerce.

Et le bonheur dans tout ça !

Le siècle des lumières a vu se développer cette posture d'acteur caractéristique constant à mettre la rationalité en capacité à répondre aux problématiques du progrès que le siècle venait d'inventer. L'humain pouvait, à lui seul, faire évoluer le monde vers un "meilleur". Jusque là, le bonheur était l'oeuvre divine, au mieux il pouvait procéder de la relation. Cette relation que pouvait entretenir l'être humain avec ce dieu tout puissant. Le bonheur était "accordé" à ceux qui le méritaient. Par ailleurs, l'humain ne pouvait décider de ce qu'était le bonheur. Ledit bonheur restait encore l’apanage du divin supérieur. L'invention de la modernité consistait donc à donner (ou à rendre) à l'humain la fixation des caractéristiques du bonheur, assorties de ses propres variables d’ajustement. Que souhaitait alors “l’Homme” pour lui-même ? C’est à ce moment (propice), que l’on a chanté le temps des cerises, ce temps "plus tard" où le bonheur sociétal sera là. On travaillait donc pour des lendemains qui chantent.
Oui, mais voilà, plusieurs décennies plus tard, dans le vingtième siècle, le monde n'est toujours pas meilleur. Le bonheur est toujours et encore bien trop loin. La promesse du progrès n'est pas arrivée. Pire encore, le commun des mortels se rend compte que la tournure que prend l'évolution sociétale ne nous y conduira pas. La conscience du bien et du mal, l'intelligence des conséquences de nos actes, l'analyse rationnelle des tenants et aboutissants de tout système sociétal, ne font pas prendre les options utiles, nécessaires, indispensables.
Il apparaît que les vieux démons humains sont encore et toujours là : l’âpreté au gain, la recherche de ce même gain facile et immédiat dirige encore nos actes comme une intention cachée, implicite, souterraine. La cupidité pour des biens et revenus à court terme, dirige encore les actions, et même les notres. La perspective du monde meilleur disparaît dans les brumes de la pollution, dans les affres des inégalités, des génocides et des violences en tout genre. Et le bonheur dans tout ça ?
Quelques-uns accèdent à des jouissances éphémères, mesquines et exiguës. Les riches sont malheureux comme les pauvres mais pour d'autres raisons. L'ivresse s'est substituée au bonheur. Jouir n'est pas un gros mot mais devient une perspective réelle, fondatrice de nouveaux liens sociaux, associés à de nouvelles structures organisationnelles. Aujourd’hui, c’est l'humain qui est mis au service de l'économie et non l’inverse, comme de logique. Et l’on commence de surcroît à imaginer que "ça a toujours été comme cela..." Triste revirement de l'histoire moderne.
Alors, dans cette quête d'illusions, le monde “se rajuste” : désormais, les humains viseront la seule jouissance immédiate. Voici le retour du “ici et maintenant”, le toujours plus d'émotion, puisque c'est cela qui donne l'ivresse, cet ersatz de bonheur. La postmodernité se construit, ou tente de se construire sur les ruines d’un projet de société rêvé, promis, sur fond d'idée de “progrès”. Désormais, ledit progrès sera technologique. Point barre ! Le bonheur n'est pas la jouissance, d'accord, mais celle-ci est accessible !... On la sent “ prenable”, à portée de main.
Alors, droit devant, l'humain fonce dans l'ultra-consommation, l'étourdissement par les biens, et tout le monde occidental s'y met, entraînant les pays émergents... C’est alors que l'humain comprend que cette course à l’échalote n'est qu'une source de frustrations toujours plus grande. La jouissance est un tonneau des danaïdes : on ne le comble pas. Plus on l’alimente, plus on le nourrit et plus il en demande. Dès qu'un objet est acquis, nous voici déjà partis à la quête du prochain. Dès que l'émotion forte est atteinte, on tente désespérément de la reproduire, de la retrouver et ça marche toujours moins bien. La surenchère ne comble rien. On devient addict...
C’est à ce moment que toute un frange de ces humains regarde avec lucidité le désastre. Tout ça pour ça ! Aurait-on manqué l'essentiel ?
Mais c'est quoi, le bonheur ? Ces humains-là commencent à se détourner de la consommation, de la propriété même. Seul l'usage des objets est utile. c’est ainsi que des zones d'échanges et de partages s'ouvrent. On "covoiture", on donne, on troque, on imagine une nouvelle relation humaine. Et si c'était l'humain l'essentiel ? L'humanisme pragmatique remonte à la surface. Et si Proudhon et Fourier avaient raison ? Le sens de l'oeuvre revient en moteur de l'action. On a le temps. Plus rien ne presse. Le réseau prend la place des territoires et des zones de pouvoir, de la hiérarchie et des tribus qui lui ont succédé. Tout est possible. On se lâche. On est au delà de la raison. Nous voilà revenus dans un pragmatisme aigu. La pyramide des valeurs s'inverse. On ne vit plus pour travailler, pas plus que nous ne travaillons pour vivre. On “fait” parce que faire est un bonheur. La réalisation de soi, dans celle de l'oeuvre, arrive au sommet, en phare du vivre, et donc en modèle directeur. L'aspiration est nouvelle. C’est ainsi que se réalise le "flow", ce “flow” que procure l'action aux limites du rêve et de la compétence. Csikszentmihalyi a bien raison.
Et puis tout s'accélère. Il faut quitter ce monde post-moderne de l'ultra consommation. Il est mortifère. Mon ami, il faut décidément “faire” ! C’est à dire associer les talents, rêver ses compétences pour en disposer. Cette nouvelle mise en perspective permet aussi d’imaginer l'inimaginable, de penser au delà du monde, et, en révisant nos fondamentaux, courir plus loin encore. Le temps d'après est là. Nous avons les pieds dedans. On ne pense plus au bonheur, ni au progrès, ni même au temps des cerises, ni à telles ou telles finalités lointaines chimériques. On lâche prise. On fait ! Un point c'est tout !
On réalise alors, insensiblement d’abord, qu'on est heureux, sans grand chose, juste en réalisant... Puis, au fur et à mesure, le phénomène s’amplifie… Tout à côté de soi, quelques “modernes” continuent la quête du progrès. D'autres post-modernes celle de la jouissance et de l'avoir. Tout cela cahote, tant bien que mal... Mais les contradictions augmentent. Certains acteurs s'épuisent. D'autres entrent dans des violences extrêmes. D'autres encore, en bons pharisiens, pensent pour tout le monde et tentent de tout contrôler, de tout réguler. "Il faut que ce chaos cesse !" disent-ils... Et la vie continue au milieu de ce brouhaha. Les humains en réseaux éphémères surnagent et poursuivent leur construction sans hâte de ce temps d'après, sûrement un monde meilleur qu'ils ne visent pas mais qu'ils font... et qu'ils sont !
Jean-Marc SAURET
Publié le mardi 10 avril 2018

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