"Ce n'est ni le monde ni ce que nous y sommes ou y faisons qui nous font peur, mais l'idée que l'on s'en fait, car la vision guide nos pas. Et sur cela, nous avons la main. C'est là toute la puissance de notre pensée ! " Après avoir durant des années posté ici réflexions et conseils sur le management des organisations, je livre aujourd'hui une vision de la réalité, au plus profond de soi même sur l'être et l'univers. Profitez ! Si vous êtes désireux d'accomplissement personnel, ce blog est pour vous. Fouillez dans ces plus de 500 articles ! Commentez ! Partagez ! Si ces contenus vous intéressent, le droit de copie, même partiel, est sous Licence Creative Commons : chacun est donc libre de les reproduire, de les citer comme il le souhaite, à l'expresse condition d'en indiquer chaque fois la source et de ne pas en faire commerce.

Management et Organisations dans une évolution sociétale majeure

On dit que la France a besoin de se réformer. Il est vrai que sa culture, historiquement bureaucratique, l’a installée dans des modes de blocage où le mot même de « résistance » constitue une valeur forte (et pas que depuis 1945). Elle se trouve aujourd'hui dans un temps comparable à la période suivant la révocation de l’Edit de Nantes où les « réformés » ont quitté le pays, emportant avec eux la dynamique économique. Ils sont allés la développer en Allemagne, en Hollande et en Angleterre. Il y a même des sociologues, voire des géographes, pour penser que c'est là que se trouve la première raison de l'affaiblissement de la France. C'est là-dessus que se préparait la révolution de 1789, au-delà même des grands gels et des mauvaises récoltes successives. L’effondrement économique lent et continu aurait installé ces conditions majeures, propices à la grande rupture (il y en a même pour dire que cette période préfigurerait l'actuelle...). C'est dire !
Ce qui reste de cette perte culturelle protestante nous habite encore : on peut le qualifier de désir de permanence et résistance au changement (nous ne sommes pas des révolutionnaires et si nous faisons la révolution, ce n’est que par violente résistance, par frustration de consommateur, ou par défaut). Et comme le passé est toujours plus sûr que l’aventure de l’avenir, résister devient un mode de pensée et de vie. Nous savons le développer contre vents et marées, vent qui gonfle les voiles de nos économies, marées qui "alluvionnent" nos terres et nos cultures… Aurions nous à ce point adopté l’adage cathare « Mon frère, il faut mourir » ?
La réforme dont nous avons besoin est culturelle. Elle nous viendra soit par le sud, dans les apports de courage et de volonté trempés, soit par le monde anglo-saxon dont la culture irrigue l’ensemble de notre économie et de nos rapports sociaux. Reste à se poser la question de savoir si l'ensemble de nos rapports ne s’épuiseraient pas dans l’économie... Le commerce, s’il a été la raison ou le motif de nombre de nos contacts et relations, sera encore peut être longtemps le lien de santé avec le reste du monde.  Mieux ! Il s’agit bien là de sa santé non seulement économique et culturelle, mais aussi et peut être surtout de sa santé en termes de sensation de progrès. C’est elle que l’on trouve associée à une marche en avant.
Cependant, il nous faudrait transformer notre regard sur ces champs là afin de disposer d'une vision d’un commerce et d’une économie faite pour l’humain et par l’humain. Trop de caricatures idéologiques nous servent de paravent confortables.
Comme l’avaient évalués les sociologues Paul H. RAY et Sherry Ruth ANDERSON dans les années 90*, une nouvelle culture est en phase de création depuis plusieurs années Elle nous offre une alternative à l’ultra consommation, celle qui justement nous épuise matériellement, écologiquement, culturellement et humainement. Ces alter-consommateurs, ou « créateurs de culture », s’engagent, portent leurs projets et les développent. Ce sont des projets que l'on peut qualifier d'humaniste, pragmatique, spiritualiste et hédoniste. Cette population montante a besoin de plus de latitude pour porter son action tout en tentant d’alléger ses contraintes. Générations « Y » (comme "Why?") pour les uns, alter-mondialistes ou hyper-modernes pour d’autres, tous ces acteurs se définissent comme "alternants culturels", c'est à dire qu'ils développent une alternance de notre vivre ensemble dans une évolution culturelle de fond. Dans ces conditions, ces « acteurs » au plein sens du terme, saisissent toute opportunité pour créer, organiser, prester, réaliser.
Nous les trouvons probablement trop zappeurs, ego-centrés, personnalistes, voire insaisissables ou peu « manageables ». Ils construisent néanmoins leurs parcours au gré des opportunités, s’adaptent, cueillent la vie et les rencontres avec un redoutable pragmatisme. Aujourd'hui dans cette entreprise, demain ailleurs, ils s'avèrent plus sensibles au plaisir d’être là, de faire "ça" plutôt que pour gagner plus. Ils développent de surcroît une mobilité toute guidée par leur goût de la vie, leur plaisir de faire et leur sens aigu de l’autonomie. 
Tout cela se réalise au gré des opportunités, car ils vivent en réseau, développent un "multi entre soi" où chaque acteur est un "hub", un cœur ou tête de réseau, et à la fois contributeur de bien d'autres. Ils apprennent et s’adaptent constamment. Ils énervent les managers qui ne savent ni comment les prendre, ni gérer ou même, plus prosaïquement, répondre à leurs questions constantes. Celles-ci, multifactorielles, portent d'abord sur le sens, et engendrent des "comment faire". Comment répondre à leurs propositions perpétuelles pour un mieux faire autrement ?... car ils sont engagé dans ce qui a du sens pour eux. Ils sont tout, peut être, sauf des bureaucrates.
Cette population énergique et énergétique, force de construction et d’innovation, n’a même pas besoin de structures, même légères, pour évoluer. Nombre d'entre eux ont donné aux sociétés d’intérim une manne temporaire parce qu’ils sont à la recherche de possibilité pour travailler où et quand ils veulent. Aujourd'hui, comme ils ont grandi, ces sociétés qu'ils ont traversé en nomades, ne leurs suffisent plus. C'est ainsi qu'ils préfèrent créer une entreprise légère, plutôt en grande Bretagne d’ailleurs, ou zapper d’une boite à l’autre que de s’installer dans des fonctions pérennes. Ils n'aiment pas es structures lourdes. Ils sont plus utilisateurs que consommateurs propriétaires. Ce qui leur irait le mieux serait des revenus suffisants pour vivre (voire le confort du salariat) avec la liberté d’action du libéral… Ceci existe. Il s’agit du portage salarial. Il offre tous les avantages de souplesse et de sûreté qu’ils attendent, confort et liberté au service de leur créativité hyperactive.
Pour cette culture montante, cette population grandissante en nombre, en âge et en compétence, cette forme d’inscription dans l’économie qu’est le portage salarial est bien le cadre qui leur va bien, peut être mieux que l'auto-entrepreneuriat. Il y a fort à penser que se trouve là l’opportunité de ne pas voir partir nos talents, notre dynamique créatrice vers les pays anglo-saxons ou ailleurs, car leurs projets et leur imagination ne connaissant pas les frontières. Ils visent davantage de s'épanouir au boulot que de gagner forcément plus.
Il y a quelques années, mon fils, qui appartient à cette nouvelle population, me dit : « L’anglais, finalement, c’est bien plus pratique que le français pour s’exprimer… ». Je restais bouche bée, moi pour qui la langue de Molière est une richesse, une arme d’expression redoutable. J'avais l'impression d'avoir raté quelque chose… Depuis, il vit à Londres, à son compte... Le monde aurait-il changé ? Peut être, mais ce ne peut être sans nous…
Jean-Marc SAURET
Publié le mardi 5 décembre 2017

* Paul H. RAY & Sherry Ruth ANDERSONThe Cultural Creatives : How 50 Million People Are Changing the World (illustrated ed.). New York: Harmony Books, 2000.



Lire aussi : "Management, une question de sens, de sens et de sens..."

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