"Ce n'est ni le monde ni ce que nous y sommes ou y faisons qui nous font peur, mais l'idée que l'on s'en fait, car la vision guide nos pas. Et sur cela, nous avons la main. C'est là toute la puissance de notre pensée ! " Après avoir durant des années posté ici réflexions et conseils sur le management des organisations, je livre aujourd'hui une vision de la réalité, au plus profond de soi même sur l'être et l'univers. Profitez ! Si vous êtes désireux d'accomplissement personnel, ce blog est pour vous. Fouillez dans ces plus de 500 articles ! Commentez ! Partagez ! Si ces contenus vous intéressent, le droit de copie, même partiel, est sous Licence Creative Commons : chacun est donc libre de les reproduire, de les citer comme il le souhaite, à l'expresse condition d'en indiquer chaque fois la source et de ne pas en faire commerce.

Le devenir des gens ne dépendrait-il pas de la façon dont nous les considérons ?

En d'autres termes, l'évolution des gens dépendrait de la façon dont ils sont considérés par leur entourage et leurs relations... C'est là une observation que fit Paul Watzlawick dans les années soixante à l'occasion, écrivait-il, d'un événement dramatique qui s'était passé à Palo Alto, une banlieue aisée de San Francisco. Un enfant de huit ans avait fait une tentative de suicide dans son école. Tous les journaux, toutes les radios, relatèrent l'événement avec force de commentaires. Et voilà cet événement, en très peu de temps, devenu une préoccupation collective. Dans les quinze jours qui suivirent, un grand nombre d'enfants firent, dans leurs écoles, des tentatives de suicide soigneusement ratées. C'est ce phénomène de reproduction qui interrogea Paul Watzlawick. Pourquoi, comment, par quel phénomène ?
Il va comprendre, alors, que le discours collectif acquiert la force de la réalité, et qu'il s'y "substitue". Il se pose alors la question de savoir si, cette conscience que nous avons des choses, cette préoccupation que nous en avons, ne serait pas la, de fait, "toute" la réalité. C'est ainsi qu'il nous propose, dans ces écrits qui en découlent, le fait que la réalité n'est ni dans les objets ou les événements, mais dans la conscience que nous en avons. Le principe même de réalité ne serait ainsi constitué que par cet état de conscience. Il convient que ladite "réalité" (prise de conscience, ou reconstruction dans notre conscience) nous est effectivement indispensable, et absolument nécessaire à nos actions et autres agissements. En cette occurrence, il s'agit là du seul chemin que nous ayons pour agir sur e monde.
Paul Watzlawick ne s'est pas arrêté là, et il a poursuivit ses observations à l'aune de cette conception apparemment nouvelle de la réalité. Nous savons, par ailleurs, que près de deux siècles auparavant, le philosophe Arthur Schopenhauer avais déjà posé ce principe, dans son ouvrage "Le monde comme volonté et comme représentation" sans que quiconque, alors, n'en saisisse la portée exacte. L'un et l'autre ont bien intégré le phénomène, à l'inverse de l'adage prêté à Saint Thomas qui, lui, ne croit que ce qu'il voit. Nous, en l'espèce, ne voyons que ce que nous croyons. C'est à dire, seul ce qui nous préoccupe, ce dont nous sommes convaincus, existe. Et alors nous le voyons et tous le reste n'est qu'accessoire. Ainsi il me souvient que, quand mon épouse attendait notre premier enfant, il y avait subitement moult landaus et nombre de femmes enceintes en ville, alors que quelques jours avant, il n'y en avait évidement pas...
Paul Watzlawick se rendit compte que ce à quoi nous croyons a bien plus de chance de nous arriver que le reste. Il nomma ce phénomène la "prophétie réalisante" à l'instar de la "prophétie auto-réalisatrice" qu'avait élaboré Merton quelques années auparavant. Mais il ne s’arrêta pas là et se rendit compte que si ce phénomène marchait pour soi, il fonctionnait tout aussi bien à l'égard des autres. Ainsi il prit acte de ce qui devint bientôt une quasi évidence : ce que l'on pense de moi, m'incite à le devenir et ce que je pense des autres les invite à le devenir.
Ses élèves, à l'université de Berkeley, vont faire une expérience osée mais probante. Entrant dans une école de jeunes enfants, sous prétexte de proposer des tests d'intelligence, ils discutèrent avec la maîtresse d'école qui leur indiquait que l'un était intelligent et donc premier de la classe et qu'un autre n'y arrivait pas et donc était dans le fond du classement. Ils s'avisèrent de faire passer des tests aux enfants, test totalement inutiles et "bidons". Ils revinrent quelques jours après en annoncer les résultats. Ils affirmèrent à la maîtresse d'école que celui qu'elle avait indiqué comme intelligent et premier de la classe n'était pas si intelligent que ça, juste adapté et obéissant, et que ledit "cancre" était en fait doué d'une intelligence créatrice remarquable. Et ils la laissèrent... Plusieurs mois après ce faut test, les étudiants revinrent et constatèrent que celui qui leur avait été indiqué comme doué avait régressé dans le rang des bons élèves et que le cancre, en revanche, avait gagné plusieurs place dans ce classement. Ils venaient de faire la preuve suivante : ce que la maîtresse avait dans son regard s'avérait déterminant dans le comportement des enfants.
Les sociologues constructiviste, c'est à dire les disciples de Watzlawick et de l'école de Palo Alto, continuèrent ce constat : ce que les gens pensent de quelqu'un l'invite à le devenir. c'est ainsi que les rapports sociaux se trouvent transformés, et donc induits. On se rendit compte ainsi que les patrons qui avaient de la considération pour leurs collaborateurs avait, corrélativement des gens intelligents, engagés et productifs. a contrario, les patrons qui méprisaient leurs collaborateurs avaient affaire à des tricheurs et à des imbéciles. Il semble bien que c'est sur cette considération étriquée et malveillante des ouvriers queFrederick Winslow Taylor élabora l'approche scientifique du travail. C'est aussi ce qu'affirmait, en 2003, Yvon Gattaz, le père de Pierre, devant un parterre d'entrepreneurs : "Mettez du contrôle et vous aurez des tricheurs. Mettez de la confiance et vous aurez de l’efficience !"
Mais la démonstration de Paul Watzlawick indique un phénomène bien plus inconscient et bien plus profond encore reposant sur le fait constructiviste : ce que je pense fait réalité. C'est donc bien sur cette conscience partagée et commune du réel que ce construisent nos rapports sociaux, nos "vivre ensemble", et donc toute l'action sociale et sociétale. Il montre ainsi que "ma" pensée, "ma" conscience du monde, est inductive sur l'évolution dudit monde. Surprenant, non ? Du moins intéressant...


Jean-Marc SAURET
Publié le mardi 14 novembre 2017



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