Ce psychologue canadien a bousculé les codes de l'apprentissage.
Selon lui, le seul fait de croire en ses propres compétences, les rend
réelles et efficaces pour chacun de nous ! Il a construit sa démarche
sur ce concept constructiviste qui permet d’affirmer que la
croyance en soi, en ses propres capacités, en ses compétences suffisantes, constituent non seulement les
moteurs de la motivation, mais deviennent également le gage de la performance et du succès. Je dirais
avec force qu'il n'a pas tort.
C'est là aussi, toute
une fonction, sinon « la » fonction du
coaching : celle qui,
justement, va permettre de « donner à voir » à
son client, et de reconnaître avec lui, en
l’espèce, qu'il
est bon et compétent. Sur ce seul phénomène, ledit client reconnaitra de
lui-même et en lui-même, ces « quelques
choses » qui seront ses compétences,
forces, et puissances. Il
les vivra comme lui étant « propres ».
Inutile, nous dit Albert Bandura, de donner à voir au
client, même si le "coach", lui,
les repère, des compétences
qu'il ne se reconnait pas lui-même. Cela produirait des inquiétudes, des peurs,
voire des freins, et peut-être des blocages.
"Mais alors, si le client ne possède pas réellement ces compétences
?". L’interrogation est légitime. Albert Bandura nous dit, à
l’instar de la conception constructiviste, qu'il n'y a de compétences que
celles que l'on se reconnaît.
Ainsi, c'est bien du seul fait que l'on se la reconnaisse
que notre compétence existe. La compétence en soi n'existe pas. Elle n'est pas
un "produit" que l'on verse dans des contenants. Elle n'est qu'un
"aperçu"...
Cela me rappelle encore une fois cette célèbre phrase de Samuel
Langhome Clemens, dit Mark Twain : " Ils l'ont fait parce qu'ils ne
savaient pas que c'était impossible ". La question de la conscience de soi
ne tient nullement à une idée de vérité, mais à celle de la
foi, de ce réalisme de charbonnier, du bon sens pragmatique : "Si je
pense que je peux, alors je peux". En effet, cette conception fait plus
penser à une démarche spiritualiste (la foi en soi) que matérialiste (la
mécanique de la physique). Nous retrouvons là l'opposition des visions du monde
mécaniques et organiques dont nous avons plusieurs fois parlé.
En ce qui nous concerne,
il nous faut juste savoir que le management a déjà évolué vers cela
aux Etats Unis : il projette de ne plus s'occuper du
développement des compétences, mais de s'attarder sainement sur les capacités,
les compétences et autres expériences possédées par le collaborateur, et qu’il « se » connaît.
Il s'agit alors de s'appuyer sur elles pour confier de nouveaux chantiers au
collaborateur, des chantiers bien différents du champ de sa seule spécialité. Sur ces nouvelles activités
dans un champ inconnu, tout en exerçant ce qu'il sait, il
apprendra encore et encore,
dans des domaines même très différents. Il en tirera alors de nouvelles
compétences et se développera de manière expérientielle. Voilà un pragmatisme
réaliste.
Albert Bandura avait donc construit son principe d'apprentissage
sur trois facteurs distincts, complémentaires et concomitants :
- un facteur
cognitif qui consiste en la croyance absolue en ses propres capacités
- un facteur
culturel qui convoque les comportements sociaux, les rites et
liturgies groupales par lesquelles nous apprenons et nous développons par
admiration, observation et mimétisme
- et un facteur
environnemental qui est favorable à l'expérimentation (ou pas)...
Nous voyons là se dessiner une démarche de développement que l'on
pourrait résumer simplement ainsi : admirer, imiter, développer, de manière interactive dans un milieu
favorable. De quoi s'agit-il ? Ce n'est là qu'une démarche ordinaire que
le bon sens populaire a déjà formalisé dans ses habitudes : "Regarde donc
comment papa fait ! N'est-ce pas qu'il travaille bien, papa ? Tu seras fort
comme lui, quand tu seras grand...".
Lu comme
cela, voilà qui fait quelque
peu… « bisounours » ! Et pourtant, c'est
bien de cela dont il s'agit
: Voir - Admirer - Imiter et mettre à sa main, dans une interaction en milieu
favorable. Voilà bien
l’essentiel. (nous
reviendrons une autre fois sur la part importante du « milieu favorable »).
Nous voyons là toute l'importance de la posture du coach, de l'enseignant,
du manager, de l'éducateur dans le développement de l'apprenant : confiance,
attention, reconnaissance, bienveillance... Nous voyons là que les postures
dirigistes, contraignantes, "canalisantes", sont totalement contre
productives : car ce sont bien elles qui tuent
la dynamique vivante.
Mais, me direz-vous, ceci n'a rien de bien nouveau ! C'est bien
comme cela que parents et grands-parents ont toujours fait avec leurs
enfants et petits-enfants ! J'en
suis tout à fait d'accord. Tout ceci relève bien plus du bon sens que de la
technologie. Mais allons plus loin. Il nous suffirait de regarder
comment font les grands singes avec leurs petits, comment font tous les
mammifères avec leur progéniture, comment font toutes les espèces en la
matière... Le « plus » que
nous apporte Albert Bandura est qu’il nous donne les mots, les arcanes
de la magie du phénomène. Dans la mesure où nous sommes des êtres de conscience, il nous est important et
utile d’être conscient, dans les mots, de ce que nous faisons. Nous avons besoin
de savoir pourquoi ça marche et comment cela se passe, avoir une
vision claire du principe pour le produire et le reproduire. Et voilà qu’il
nous apporte ceux de ce phénomène interactif d’enseignement et d’apprentissage.
Est-ce que nous sommes séduits par la proposition d’Albert Bandura ?
Est-ce que nous croyons en nos « capacités-plaisirs » de le faire ?
Et si le milieu y est favorable, toutes les conditions du succès seront réunies.
Voilà le « secret »… Dès lors, puisque nous
disposons maintenant d’une représentation claire de l’essentiel,
tout le reste ira de soi...
Jean-Marc SAURET
publié le mardi 20 juin 2017
Excellente mise au point mon cher Jean-Marc. Cela ne peut que rappeler les études cruelles sur l'effet Pygmalion.
RépondreSupprimerBien vu, mon cher Thierry. Merci à toi
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