"Ce n'est ni le monde ni ce que nous y sommes ou y faisons qui nous font peur, mais l'idée que l'on s'en fait, car la vision guide nos pas. Et sur cela, nous avons la main. C'est là toute la puissance de notre pensée ! " Après avoir durant des années posté ici réflexions et conseils sur le management des organisations, je livre aujourd'hui une vision de la réalité, au plus profond de soi même sur l'être et l'univers. Profitez ! Si vous êtes désireux d'accomplissement personnel, ce blog est pour vous. Fouillez dans ces plus de 500 articles ! Commentez ! Partagez ! Si ces contenus vous intéressent, le droit de copie, même partiel, est sous Licence Creative Commons : chacun est donc libre de les reproduire, de les citer comme il le souhaite, à l'expresse condition d'en indiquer chaque fois la source et de ne pas en faire commerce.

Le lâcher prise

Il y a plusieurs années, un collectif de consultants et moi-même, préparions un colloque sur "la souffrance du manager". Nous l'organisions dans les locaux de l'ENSPTT où j'étais alors consultant-chercheur. Comme à mon accoutumée, à l'époque, je trouvais que les choses n'avançaient pas assez vite ou assez simplement. Je m'agaçais donc et exprimais ouvertement à mes collègues mon irritation. L'un d'eux, Benoît, coach remarquable et consultant hors pair, me dit d'un ton très bienveillant : "Lâches, Jean-Marc..." et rien de plus, me renvoyant à ma décision, à ma posture, à mon autonomie... Je rétorquais que ça ne ferait pas avancer les choses plus vite et mieux. Je restais bloqué sur ma préoccupation. Benoit repris simplement : "Lâches, Jean-Marc...". 
La considération que j'avais pour lui, fit que j'entendis et, tout en ruminant, je n'extériorisais plus cette fronde intérieure. Benoît sourit et ajouta simplement : "Lâches pour de bon...". Après un petit silence où peut-être je semblais commencer à comprendre, Benoît me récita lentement quelques éléments qui marchaient bien. "Bon, on a fait ceci, on a fait cela..." C'est tout. Je crois qu'il m'a fallu encore du temps pour apaiser ma tempête intérieure. Mais je crois avoir compris à cette occasion ce que voulait me montrer Benoît. Pourtant, tout cela, je le savais, intuitivement, intellectuellement, ou conceptuellement : c'est bien le regard que nous portons sur les choses qui nous gêne, pas les choses elles-mêmes. Je l'avais lu chez quelques philosophes anciens comme Sénèque et Marc Aurèle. Je savais que ce type de sentiment vif causait plus de torts à son "auteur-propriétaire". Pire, peut-être, car je devais me résoudre à admettre ce simple constat : c’est qu’il n’existait, en cette occurrence, aucune influence, en terme de résultante, sur les faits eux-mêmes, bien au contraire !... Mais avant que cela n'atteignent "les neurones du cœur", il me fallut un certain temps.
Voilà ce dont je me suis rendu compte à partir de cet événement anodin mais si riche et si interpellant. Les sentiments sont des marqueurs. Ils fixent notre mémoire et colorent nos réalités. Ils sont aussi des déclencheurs d'action, des interrupteurs du passage à l'acte. Nous savons bien que la voiture la plus pratique, et rationnellement la plus utile en ville, est petite, électrique, avec des flancs en matière souple,... et pourtant, on achète la Ferrari parce qu'elle est rouge ou le gros quatre-quatre parce qu'il est beau. Ces marqueurs émotionnels, liés à des représentations d'intérêt sont des cadenas qui nous attachent, nous bloquent sur ces "obscurs objets de désir". Combien de drames familiaux ne sont que des attachements, parfois stupides et obsessionnels, à des représentations personnelles (héritage perdu, amour trahi, sensation de mépris ou de dégradation d'image de soi, etc.). Ce sont bien ces images, ces représentations mentales qui, renforcées de marqueurs émotionnels tenaces, nous pourrissent la vie.
Nous savons de surcroît que la réalité n'est que la conscience que nous avons des choses et des éléments. Nous savons aussi pertinemment, que ces représentations s'ancrent dans des vécus chargés de marqueurs émotionnels. Nous savons bien, par ailleurs, que l'existence ne précède pas l'essence,... et que l'inverse n'est pas plus vrai, dans la mesure où il n'y a en "réalité" qu'un objet... pour "le" sujet qui le regarde. Si le sujet s'en va, l'objet disparaît (cf. l'approche constructiviste). Il n'y a donc de réalité que pour soi. Il est vrai qu'en partageant nos représentations, nous faisons culture et tissons du lien social. Mais ce n'est toujours pas le "réel", mais juste des représentations partagées à revisiter dès que possible...
Nous savons aussi que s'il est difficile de modifier une représentation installée (la terre est ronde. Elle n'est pas plate, posée sur une tortue ou portée par un Atlas). Il est tout à fait possible de la revisiter et développer une société nouvelle, un vivre ensemble nouveau, ouvert différemment (mais non, les Auvergnats ne sont pas tous bougnats ou cafetiers, ni chiches ou systématiquement radins).
Alors, par déduction, nous savons que nous pouvons changer nos représentations de soi, nos images du monde, de l'autre et de ses intentions, de représentations de nos intérêts, etc. On peut, ou devra les changer bien avant que la dépression, le drame ou la bêtise n'arrive. Quand l'obsession est là et nous attache, nous parlons alors de "lâcher prise" parce que ce n'est pas l'obsession qui nous tient mais nous-mêmes qui la tenons fermement. Alors avant que la tempête ne nous engloutisse, nous pouvons ouvrir les mains et les bras vers la vie et laisser tomber tout ce qui n'est pas nous, ni essentiel.
Dès lors, le poids disparu des attaches abandonnées, c'est une sensation (tiens, encore un marqueur émotionnel) de bien-être, de légèreté et de liberté qui nous accompagne, comme si nous nous étions "libérés"... et c'est en fait tout à fait le cas. Nous voici soudain, allégés, soulagés, aériens... et peut être dès lors justes et efficaces ! "Elle est pas belle la vie ?"
Jean-Marc SAURET
publié le mardi 25 avril 2017

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