"Ce n'est ni le monde ni ce que nous y sommes ou y faisons qui nous font peur, mais l'idée que l'on s'en fait, car la vision guide nos pas. Et sur cela, nous avons la main. C'est là toute la puissance de notre pensée ! " Après avoir durant des années posté ici réflexions et conseils sur le management des organisations, je livre aujourd'hui une vision de la réalité, au plus profond de soi même sur l'être et l'univers. Profitez ! Si vous êtes désireux d'accomplissement personnel, ce blog est pour vous. Fouillez dans ces plus de 500 articles ! Commentez ! Partagez ! Si ces contenus vous intéressent, le droit de copie, même partiel, est sous Licence Creative Commons : chacun est donc libre de les reproduire, de les citer comme il le souhaite, à l'expresse condition d'en indiquer chaque fois la source et de ne pas en faire commerce.

Ce n'est jamais le meilleur qui gagne

L'idée que le meilleur gagne forcément est une illusion dont il faudra se défaire si l'on veut vivre normalement, tranquilles et en paix. "Que le meilleur gagne !" nous dit l'adage en forme d'injonction à la loyauté, au fair-play. C'est pourtant cette idée, que l'on retrouve en toile de fond des parties de jeux, et qui fait le "charme" de nombres de matchs sportifs. Les participants s'affrontent et se ré-affrontent au fils des mois et des ans, cherchant à chaque fois, non pas à vérifier s'ils sont les meilleurs, mais à tenter le diable pour gagner, et savourer la victoire. Après, ils décorent leur propre couronne de cette illusion qu'ils sont les meilleurs, ce que les enchaînements de victoires prouveraient.
L'illusion sert de garantie au bon déroulement du jeu, avec ce cadre réputé rigoureux. Car ce qui est avant tout "hors-jeu" (et la règle existe dans tous les jeux) c'est la tricherie qui permettrait "au moins fort" de gagner tout de même. Mais il n'y a pas que la tricherie pour gagner contre le cours des choses, contre le cours du jeu. C'est aussi cela qui rend la partie incertaine, haletante, palpitante. C'est d’ailleurs ce qui fait le piment de certaines compétitions, comme la coupe de France de foot, où, sur un match, tous peuvent l'emporter et atteindre le tour suivant.

Ainsi se présente en filigrane le fait que le meilleur ne gagne pas forcément. C'est dans ces conditions que la logique s'inverse : c'est celui qui gagnera qui sera donc... le meilleur... Et pourtant !...
De ce fait, qu'il s'agisse de concours, d'examens ou de compétitions, tous les participants, et leurs arbitres, semblent convaincus que celui ou celle qui gagnera sera le ou la meilleure. Ils sont tous d'ailleurs bien persuadés que le concours servirait expressément à cela : révéler le meilleur. Pourtant, dans toutes ces compétitions sportives ou professionnelles, nous pouvons voir des résultats surprenants, comme invalidant la croyance. Alors le doute s'installe...

Entrez dans les entreprises, dans les organisations et regardez qui dirige, qui monte en promotion, à qui l'on confie les responsabilités, les chantiers sensibles, les projets d'avenir. Sont-ce les meilleurs ? La logique le voudrait, et la culture le proclame. En réalité, et de fait, les logiques de corps, de réseaux, d'affinités, prennent le pas et priment, en "faisant" la décision. Anciens de grandes écoles, disciples de tel ou tel dirigeant, colorés politiquement ou pas, syndicalement ou pas, membres de clubs sportifs ou autres, sont dans un entre soi qui participe, voire constitue des réseaux forts. Ils sont les couloirs du pouvoir. Une affiliation sera bénéfique ici, et rédhibitoire ailleurs. Une allégeance, un apport d'intérêt, une relation tierce, peuvent faire office d'adoubement et, le jour des choix, la personne se retrouve "sous le robinet". Pendant ce temps-là, le commun des mortels pense que la qualité de son travail l’amènera immanquablement vers des sommets prometteurs. Douce illusion... La valeur du travail est tout à fait secondaire dans les échelles de pouvoir. Cela ne sert qu'à l'exécution des tâches.

De quoi s'agit-il ? Comme dans toute partie de jeux, l'arbitre et ses enjeux (être impartial et incorruptible ou être du bon côté des retombées) remplissent leurs offices. mais d'autres facteurs sont aussi à considérer : le temps, le climat, le charme et la séduction, l'environnement, le regard que chaque joueur porte sur la partie, sur les enjeux. On y ajoutera la vision des coachs, la logique du public, tous ces éléments, et bien d'autres variables s'invitent encore dans l'issue de la partie. C'est dire le caractère multifactoriel du processus...
Une partie comporte tellement d'aléas, et "d'incertitudes", qu'il devient totalement aléatoire, sinon illusoire, d'affirmer que le meilleur gagne. Cela ne doit pas nous inciter à gémir ! Il faut juste savoir que "c'est comme ça", que le fantasme de l'intégrité du jeu est bon pour la vitrine, mais que ce n'est pas lui que l'on retrouve dans la réalité profonde de la partie.

Je ne dis pas non plus que le travail et la rigueur ne servent à rien. Je dis seulement qu'ils ne sont pas décisifs. Je ne dis pas non plus que la tricherie et le dopage pèsent définitivement, car sans le travail et d'autres variables aléatoires, ils s’avéreraient totalement insuffisants. Je dis juste que le meilleur ne gagne pas forcément et cette seule qualité n'emporte pas la décision, loin de là. Ici, comme dans tout, il n'y a pas de logique mono-causale. C'est toujours et à chaque fois un faisceau de cause qui fait la décision, et dans ce faisceau, il y a vraiment de tout...

Mais poussons le bouchon un peu plus loin. Qu'est-ce qu'être le meilleur ? Est-ce seulement obtenir le meilleur résultat ?... ou est-ce faire preuve des meilleures qualités pour réussir à "ce" moment ?...ou seulement disposer des meilleures qualités ? Tout le monde à ce souvenir du propos de Jacques Chirac à l'encontre d'Alain Juppé à l'occasion des candidatures à la présidence de l'UMP : "Il est le meilleur d'entre nous !". On se souvient du tollé qu'avait soulevé cette phrase dans le milieu de sa classe d'âge. 
Que voulait-il dire et qu'avons-nous compris ? Pourquoi cette effervescence ? Parce qu'il y avait, dans cette assertion, le poids du "réel". Le dire, c'est affirmer que, quoi qu'il se passe et quoi que l'on fasse, les vertus et qualités du candidat resteront définitivement supérieures à celles des autres personnes en jeu. C'est l'affirmation qui fait le symptôme et le symptôme qui fait la réalité. Voilà le fond de la réalité, toujours "temporelle".

Dans cette affirmation là, ce n'est pas que la comparaison qui est en jeu mais l'affirmation définitive de la supériorité "essentielle" (par essence) des qualités et potentiels de la personne. C'est la désignation et l'affirmation définitive de qualités intrinsèque. C'est le fait que ces qualités soient vécues et lues comme parties intégrantes, faisant corps avec le sujet, qui rend définitive l'affirmation. Il s'agit donc bien une lecture sociale du réel, d'une représentation sociale liée à l'idée que l'on se fait de la personne humaine en général, et de celle qui est en jeu en particulier : la personne est ici, vécue socialement comme un réceptacle de compétences et de qualités portant un potentiel de performances, de succès, de résultats... L'être humain est, dans ces conditions, limité à un rôle de contenant, une "boite". Voilà le fond du système.
C'est donc bien "l'idée de meilleur" qui se confirme comme une illusion sociale. Rien ne l'installe dans la réalité, sinon sa propre représentation, comme nous venons le vérifier (ou le contester) dans des parties de jeux. "Le meilleur" n'est que la couronne de lauriers posée sur la tête des vainqueurs. Elle est cet indicateur éphémère d'un état social à un instant "T". Nous confondons ainsi l'état et l'être, l'image de l'occasionnel avec l'être permanent, voire transcendant, le sujet. Ce "meilleur" intrinsèque n'existe donc pas. Il n'est qu'une représentation sociale, l'attribution permanente à quelqu'un d'un instantané, une attribution qui marche...

A ce propos, il me souvient l'image d'adversaires du boxeur Mike Tyson, réputé, à l'époque, le meilleur de sa catégorie, et de loin. Ceux-là devenaient livides à la vue du "meilleur" montant à son tour sur le ring. L'idée qu'ils se faisaient de lui prenait le pas sur le réel. Aujourd'hui, dans le coaching sportif, la sophrologie vient déconstruire ces a priori paralysants. Les coachs sont bien conscients que ces représentations sont bien et uniquement dans la tête des participants, que l'illusion est totale mais que c'est bien elle qui s'avère déterminante. Alors, par le travail de déconstruction, on se défait de ces représentations handicapantes.
Et nous avons bien raison, car elles sont bien des porteuses d'illusions, qu'elles soient positives ou négatives. "Tout est dans la tête", affirment bien des coachs. "Tout est dans les représentations", enchérissent les psychosociologues. Et on se souvient de cette phrase célèbre de l'écrivain Mark Twain : "They didn't know it was impossible so they did it" ("ils ne savaient pas que c'était impossible, alors ils l'ont fait !").
Nous savons donc maintenant que ce n'est jamais "le meilleur" qui gagne parce que cet attribut n'est qu'une illusion, un "éphémère". Pour ne plus être victime de cette illusion, nous ferions mieux de la lâcher. Et pour être "maîtres du monde", nous aurions avantage à travailler nos représentations de nous-même et du monde, comme le propose, par exemple, la sophrologie, ou le coaching issu de la psychosociologie clinique : la posturologie*
Jean-Marc SAURET
publié le mardi 18 avril 2017


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