"Ce n'est ni le monde ni ce que nous y sommes ou y faisons qui nous font peur, mais l'idée que l'on s'en fait, car la vision guide nos pas. Et sur cela, nous avons la main. C'est là toute la puissance de notre pensée ! " Après avoir durant des années posté ici réflexions et conseils sur le management des organisations, je livre aujourd'hui une vision de la réalité, au plus profond de soi même sur l'être et l'univers. Profitez ! Si vous êtes désireux d'accomplissement personnel, ce blog est pour vous. Fouillez dans ces plus de 500 articles ! Commentez ! Partagez ! Si ces contenus vous intéressent, le droit de copie, même partiel, est sous Licence Creative Commons : chacun est donc libre de les reproduire, de les citer comme il le souhaite, à l'expresse condition d'en indiquer chaque fois la source et de ne pas en faire commerce.

L'illusion « collective »

Parce que nous pensons quelque part que l'intelligence est collective, nous avons parfois tendance à déduire (un peut) vite que les décisions, les constructions doivent aussi être collective. Combien de fois ai-je entendu : « Nous allons voir ensemble ce que nous allons faire », ou bien « Notre mode de faire, c'est décider ensemble » et ce avec une certaine délectation morale. Il me semble qu'il s'agit peut être là d'une erreur tenant plus du glissement sémantique que de la réalité fonctionnelle.
Comme nous avons tendance à confondre la démocratie avec le vote, lequel est l’arrêt du débat, là justement où se trouve la réalité de l'action démocratique, nous avons tendance à confondre la richesse du débat (l'écoute active, l'art de la contribution, l'enrichissement collectif des idées à la pensée d'autrui) avec l'action, le passage à l'acte, qui restent individuels et personnels.


Nous avons effectivement, ici, quelque chose qui fait symptôme : la responsabilité nous apparaît toujours beaucoup plus personnelle que partageable. N'oublions pas cette fâcheuse tendance que nous avons à rechercher les coupables, par exemple.
S'il est vrai que l'intelligence naît de la confrontation au réel et de « con-prendre » (soit prendre avec soi) l'environnement, les forces en présences, leurs interactions, déduire des hypothèses, projeter des conséquences et des faisabilités, l'action reste personnelle et propre au plaisir de faire. Et le plaisir, quelle que soit la façon de tourner le phénomène, reste une affaire personnelle. En aucun cas l'action collective peut être assimilée à une action de masse. Elle est une convergence d'actions personnelles qui la multiplient, voire la démultiplient en cette quintessence « unique ». Ce n'est pas parce que le groupe, la foule, la masse, sont des singuliers que nous pouvons les confondre avec la personne.


Prenons le cas des sports d'équipes : les entraîneurs et sélectionneurs recrutent pour leurs équipes des « talents individuels », c'est à dire des gens qui ont des capacités d'action, des savoir-faire particuliers. Tout l'art est de les inscrire dans une démarche d'intelligence collective, pas de les soumettre à un mode d'action dirigé, voire même démocratiquement décidé. Si c'était le cas, qu'adviendrait il ? Le groupe dysfonctionnerait (oui, c'est parfois le cas) et les talents s'en iraient (et c'est aussi parfois ce qui arrive). Nous savons combien, paradoxalement, l’obéissance tue le talent.
En revanche, l'art du management de cette équipe (et c'est ce qui fait la différence entre les entraîneurs de talent et les autres) consiste bien à créer la synergie entre les individualités qui « s’encanailleront » à « faire ensemble ». « Le management consiste à rassembler les meilleures conditions » disait Sumantra GHOSHALAinsi, l'action reste individuelle et personnelle. L'articulation est collective. Pour que l'acteur prenne du plaisir à l'action, il faut qu'il décide et réussisse. Et s'il prend du plaisir, il devient le meilleur de lui même. C'est bien là le fondamental.


Il m'est arrivé de rencontrer des organisations qui avaient confondu l'intelligence collective et l'action. Comment cela se traduisait-il ? Les managers ou les garants de l'institution, ou de la chapelle, interdisaient les actions qui n’avaient pas été décidées collectivement, C'est à dire que le processus de passage à l'acte devenait une démarche intellectuelle collective et, qui plus est, "procédurée"... Ça ne pouvait effectivement pas marcher puisque nous savons que le passage à l'acte, chez chaque individu, ne relève pas de la rationalité mais de l’impulsion émotionnelle ou sensorielle. Par exemple, nous savons que le meilleur véhicule pour circuler en ville est petit, économique, discret, maniable et nous achetons la Ferrari parce qu'elle est rouge et mythique... (le propos reste de l'ordre de la symbolique)
Le passage à l'acte n'est pas l'analyse. Il y a bien deux temps dans la création et tous les conducteurs de projet le savent : le premier, de l'analyse et de la compréhension et le second, celui de l'action. Comme nous voulons tout contrôler, tout sécuriser, nous voulons que la construction soit aussi « procédurée », rationalisée, normalisée. Si c'était le cas dans l'exercice sportif, nous n'aurions que des succès mathématique et plus aucun public dans les tribunes. Ce qui fait l'action c'est l'impulsion individuelle. C'est là que se trouvent les miracles.


Il me revient que dans mon passé de rugbyman et de boxeur (totalement amateur, et de modeste niveau), nous passions des heures tous les jours à travailler des situations pour qu'elles ne nous surprennent pas, pour que nous ayons dans nos corps un ensemble de « possibles » à réaliser réactivement. Nous travaillions « 10 » pour produire « 4 ou 5 ». Nous savions parfaitement que l'action est impulsion, « ré-action », en fonction d’un contexte et de visions ou représentations personnelles. Il existe à cet effet les interactions fécondes,… et les autres,… qui le sont moins.
Alors,  pourquoi donc voudrions nous « procédurer » l'action, afin qu'elle soit soumise à des règles directives, sécurisées ou démocratiques ? Toutes ces démarches relèvent de la même erreur : la confusion entre l'intelligence (toujours meilleure quand elle est collective) et l'action qui est toujours personnelle et impulsive. Ne serait-ce pas notre peur de l'échec, notre peur de l'autre et notre vision mécaniste du monde qui nous ferait penser ainsi ? Mais où est, la dedans, l'humain sur le quel nous comptons tant aujourd'hui ? Nous avons besoins des talents individuels et pourtant ils nous font peur.
J'ai même vu des décideurs qui ordonnaient des modes de faire et réagissaient impulsivement en un tour de main. Paradoxe !... Alors, en un mot, l’œuvre collective ne se décrète pas, elle s'accueille et se constate. 
Jean-Marc SAURET
Mardi 7 mai 2013



P.S. : On pourrait affirmer aussi que « l’accident » n’est jamais accidentel... Mais c'est là une autre histoire.

Lire aussi : " Aujourd'hui, avons-nous toujours autant besoin de leaders ? "


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