"Ce n'est ni le monde ni ce que nous y sommes ou y faisons qui nous font peur, mais l'idée que l'on s'en fait, car la vision guide nos pas. Et sur cela, nous avons la main. C'est là toute la puissance de notre pensée ! " Après avoir durant des années posté ici réflexions et conseils sur le management des organisations, je livre aujourd'hui une vision de la réalité, au plus profond de soi même sur l'être et l'univers. Profitez ! Si vous êtes désireux d'accomplissement personnel, ce blog est pour vous. Fouillez dans ces plus de 500 articles ! Commentez ! Partagez ! Si ces contenus vous intéressent, le droit de copie, même partiel, est sous Licence Creative Commons : chacun est donc libre de les reproduire, de les citer comme il le souhaite, à l'expresse condition d'en indiquer chaque fois la source et de ne pas en faire commerce.

Quand l'absence de débat dérape en insultes (07 09)

C'est effectivement assez rare, mais quand ceci vous arrive, vous pouvez rester bouche bée. Je recevais, en commentaire sur l'un de mes articles, une injonction à éliminer un certain nombre d'arguments et d'éléments dont j'usais parce qu'ils jouaient une fonction d'illustration pourtant tangible et probante... "car cet article (était) trop long". Je tentais une réponse bienveillante, indiquant que la vie n'était parfois pas aussi si simple (ou simpliste) que cela et qu'il convenait bien de dire peu, mais juste, à propos et référencé.  C'est ce que l'on peut appeler aussi, le sens de la nuance. Je reçus en retour une bordée de propos malveillants, même insultants, conclus par ces quelques mots : "pour un sociologue, vous pétez plus haut que votre cul ! Je n’ai pas de temps à perdre avec un crétin". Et le quidam venait cependant de passer un certain temps à me l'écrire.

Que faites-vous dans cette situation ? Pour ma part, j'ai, comme on dit, lâché prise. Je me suis retiré de l'entre deux, et prévenu la personne qui l'avait mise en relation avec moi. Je compris que c'était bien ce que le quidam cherchait, à savoir que je quitte le cercle de réflexion où il officiait. Je l'ai donc satisfait... (Cependant, la responsable et animatrice du cercle sursoyait à ma conclusion de circonstance, préférant me voir continuer l'aventure dans le cercle)

Bien sur, il ne m'est pas apparu utile, ni judicieux, ni même opportun, de "ferrailler" avec cette personne excessive. Ce n'est pas que l'incohérence de son propos et les pensées courtes qui l'animaient m'eussent rebuté, mais il m'a semblé comprendre qu'il s'agissait plus d'une question d'ego que d'un argumentaire élaboré. Dans ces conditions, il est préférable de rendre à la personne son combat, et de pardonner ses écarts. Pardonner n'est pas effacer, mais c'est plutôt une façon "élégante" de laisser au quidam la gestion des conséquences de ses actes sans s'en occuper ni s'en préoccuper. 

Par ailleurs, nous avons plusieurs fois constaté que la colère, la haine et l'agitation sont des syndromes de faiblesse. Il n'est donc pas utile de compliquer les choses. Il suffit, comme l'on dit populairement, de laisser "retomber la mousse", comme les particules en suspension dans un liquide trouble... Dès lors on y voit mieux.

Mais je dois avouer que ce type de comportement, quoique insolite, n'est pas isolé. Il s'agit là d'une simple conséquence d'une postmodernité tout à fait consumériste, celle qui flatte les egos pour en faire de bons consommateurs émotionnels, dénués de toute réflexion. Ici, la raison n'est pas de mise ici. 

Il est vrai que nous voyons se développer sur les réseaux sociaux des échanges d'insultes et d'anathèmes de tous ordres. Cela va jusqu'aux plus vulgaires et aux plus violents, dans le seul but, semble-t-il, de faire briller des egos, la plupart du temps passablement incultes et mal informés. Ceci m'a d'ailleurs convaincu de m'en retirer.

C'est bien là un drame de la postmodernité néolibérale : plutôt l'affrontement car l'important est bien de "gagner" ! Gagner quoi ? Juste la sensation d'avoir été le plus fort, d'avoir "transcendé" l'échange... Mais pour quoi faire ? Juste pour flatter les egos et minauder en aparté : "Tu as vu ce que je lui ai mis ? A plate couture, je l'ai mis minable." Bien tristes propos, bien tristes échanges, pour quelle plus-value et pour quel résultat réel ?... 

"Sur la toile, l'expression des désaccords est une valeur aussi importante que le consensus" constatait Valérie-Anne PAGLIA, Directrice d'IPSOS. Ou comme l'écrivait dans le magasine "Décideurs" le philosophe des sciences, Etienne Klein, "A mesure que l'on gagne en compétence, on perd en arrogance". Il s'exprimait là à propos de la perte de confiance dans la parole scientifique lors de cette crise dite sanitaire.

C'est là, en fait, la convergence de deux phénomènes qui se développent dans cette fin d'ère. Les analystes sociaux les ont particulièrement bien repérés et mis en exergue. Je pense à "la médiocratie" formalisée par le philosophe canadien Alain Denault. Son essai édifiant décrit une tendance qui se confirme à mesure que défilent les années : les médiocres sont au pouvoir et le moyen fait désormais autorité. 

Je pense aussi à "la lutte des places" du sociologue clinicien Vincent de Gaulejac. Ce n'est pas une lutte entre des personnes ou entre des classes sociales. Elle désigne la lutte d'individus solitaires contre la société pour trouver une "place", c'est-à-dire un statut, une identité, une reconnaissance, une existence... Une autre conséquence de l'individualisme concurrentiel dans cette post modernité néolibérale : exister à une haute place et y être remarqué.

Dans cette culture de la confrontation et de la concurrence, de la performance et de l'exploit qui fait les surhommes et les sur-femmes, ces victimes de ce triste système semblent trouver un exutoire exaltant dans ces échanges insalubres, dans ces turpitudes avilissantes pour chacun et pour tous. Mais c'est aussi ce que l'on enseigne dans les écoles de commerce : se montrer le meilleur et ne pas se laisser impressionner par quiconque plutôt que de chérir l'œuvre à construire et la dynamique humaine pour ce faire. 

Mais tous y perdent, ladite performance en premier, car sans co-construction, sans coopération, sans collaboration, sans convergences non plus, pas de performance. Juste la répétition d'une médiocrité, celle qui justement a pris le pouvoir dans cette fin d'ère néolibérale, jusque parmi les élites... jusqu'à la "chute de Rome" !

Nombre de correspondants sur la toile, ou dans les cercles de réflexion, se lamentent, en déplorant cette situation délétère. Y répondre, c'est tomber dans un piège où l'assertion de Michel Audiard prend force et vigueur : "Ne jamais débattre avec un imbécile, il vous aspire dans des profondeurs où la bêtise excelle. Vous perdrez toujours car, sur ce terrain là, il y est mieux entraîné que vous !"

Ici aussi, la question du "lâcher prise" constitue une bonne réponse. Lâcher les affrontements d'egos. Fuir, avant que la spirale ne vous aspire, ne vous saigne, ne vous suce le sang froid, ou pire, ne vous détourne de vos travaux. Si la personne veut être le roi des c... qu'elle le soit, si c'est son but, qu'importe, mais sans vous ! 

A l'instar des relations avec les personnes malades d'alcoolisme, je garderai toujours une part de bienveillance car personne ne peut être considéré comme définitivement perdu par la maladie. Mais il faut juste lui laisser le choix de vouloir s'en sortir, de vouloir guérir. Il n'existe aucun sevrage malgré soi.

Oui, l'égotisme est une sale maladie de la postmodernité. Comme pour l'alcoolisme la raison ne peut rien. C'est bien ce qui nous rend impuissants à aider. C'est le malade qui a la solution, s'il veut bien lâcher l'ego pour l'œuvre. Cette résolution le ferait alors passer de la postmodernité au temps d'après, celui de l'alternance culturelle*. Nous y reviendrons...

* Voir : "Post modernité et alternation culturelle"

Jean-Marc SAURET
Le mardi 7 septembre 2021

Lire aussi Comment progressent les dérives totalitaires "


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