"Ce n'est ni le monde ni ce que nous y sommes ou y faisons qui nous font peur, mais l'idée que l'on s'en fait, car la vision guide nos pas. Sur cela, nous avons la main et c'est là toute la puissance de notre pensée ! " Après avoir durant des années posté ici réflexions et conseils sur le management des organisations, je livre aujourd'hui une vision de la réalité, au plus profond de soi même sur l'être et l'univers. Profitez ! Si vous êtes désireux d'accomplissement personnel, ce blog est pour vous. Fouillez dans ces plus de 500 articles ! Commentez ! Partagez ! Si ces contenus vous intéressent, le droit de copie, même partiel, est sous Licence Creative Commons : à l'expresse condition d'en indiquer chaque fois la source et de ne pas en faire commerce, chacun est donc libre de les reproduire, de les citer comme il le souhaite.

Retour aux origines (02 12)

En lisant un article fort intéressant sur le retour de peuples africains à leurs philosophies et spiritualités originelles, je me mis à penser à la similitude de cette situation avec la notre et nous-mêmes aujourd'hui. A l'occasion de cette recherche d'identité, (ou espace laissé vacant à l'occasion de la décadence de l'occident), l'article résumait cette phase de façon synthétique, en soulignant l'opportunité que se donnaient bien des peuples en Afrique de l'ouest pour se “repenser”, dans l'essence même de leurs cultures et de leur Histoire”. Ce “moyen” leur permettait de se retrouver “essentiellement”. 

J'imaginais alors ce retour que nous aurions à faire sur nos pensées et philosophies anciennes, préchrétiennes. En termes d'alternative, nous avions le choix : soit de se situer avant le catholicisme paulien, (inventé par l'empereur Constantin), c'est à dire celui de la soumission, de l'obéissance et de la rédemption (mais de quoi?) par la souffrance et le sacrifice sous l'emblème de la croix.

Il serait intéressant de retrouver, nous aussi, ce qui nous a constitué avant la France de Clovis, par son baptême en 486. C'était là une affiliation à l'histoire et à la culture d'un empire romain défait. On sait bien l'incidence césariste sur l'ensemble de la civilisation occidentale. A cet effet, je repense à ce qui, dans notre culture, a traversé tous ces siècles, a d'ailleurs perduré en termes de "chamanité", de guérisseurs et coupeurs de feu. On retrouve ici aussi le druidisme, et quelques autres pratiques dites païennes et qu'on identifierait plutôt d'animistes... Il me semble voir là une similitude entre, par exemple, notre processus d'acculturation et celui des Antilles ou de Louisiane, entre christianisme et vaudou...

Nous savons que la religion la plus répandue dans le monde est l'animisme, (ou chamanisme). Nos rebouteux, guérisseurs, coupeurs de feu et autres magnétiseurs, relèvent de cette tendance ancestrale chamanique. Les pratiques de guérison sont les mêmes, et je me réfère ici aux travaux de l'anthropologue suisse du soin, Jean-Dominique Michel. Cet auteur montre comment la guérison relève essentiellement, de la relation entre le patient et le praticien. In fine, c'est le patient qui se guérit lui-même, sur la base de cette relation de croyance et de confiance.

Ces pratiques-là sont détachées du corpus sociétal césariste, dont on sait bien qu'il est fait d'individualisme, de commerce, mais aussi de compétitions, de concurrences et de guerres. L'apogée de ce “moment” est bien ce néolibéralisme, lequel est en train de s'effondrer actuellement sous nos yeux. Il est donc temps de retrouver notre âme, notre essence profonde. Certes, il semble difficile de retrouver la dimension animiste pré-chrétienne. Mais si l’on fait le lien entre tous les animismes du globe, on comprendra que le processus est partout le même et que la perdurance des rites traverse les cultures. Rien ne se perd. Tout se métisse, ''rampe'', puis réémerge, en évoluant. Il nous reste, en l'occurrence, juste à désaxer notre regard, en gardant en tête l'universalisme animiste. A partir de ces prémices, les liens et constances se font tout seul, et viennent tout “naturellement”. (J'ai commencé ce travail dans mon ouvrage "La puissance de la pensée imaginaire - Retour vers l'animisme", 2023, Ed. Bookelis)

Ainsi, nous n'oublierons pas cette maxime africaine : "L'homme est le remède de l'homme" que j'aime relier à cette parole bouddhique : "Sois ta propre lampe ! Ne crois rien ni personne. Vérifie et expérimente tout". Notre "aggiornamento" reste, dans ces conditions, à inventer et à expérimenter nous-même, par nous-mêmes. Notre chemin initiatique vers le retour à “notre propre âme” est celui là, bien à l'intérieur de nous.

Sociologiquement ou anthropologiquement, il nous sera aisé de fouiller dans nos pratiques populaires ressurgies de nos campagnes, pour retrouver ce chamanisme des origines. Celui-ci a continué à vivre et à poursuivre son exercice à travers le temps. C'est non seulement une chance mais probablement aussi un indice de sa réelle présence vivante. La démarche sera facilitée par le fait que nombre d'ouvrages foisonnent sur le sujet sous le chapeau d'une "nouvelle spiritualité". Et ce tout en sachant profondément que la sagesse et la connaissance ne sont pas dans des livres, mais sur notre chemin expérientiel.

Non seulement les rituels et pratiques sont là, mais on y retrouve aussi toute une réflexion sur les raisons de leur présence qui abondent. Il n'y a plus qu'à en prendre conscience et à observer le phénomène. Mais ce n'est pas tout et la démarche de déconstruction et reconstruction en Afrique de l'ouest nous permet de voir évoluer un champ d'incidence plus large. Je voudrais m'y arrêter quelques instants.

Ces collègues africains commencent leur aggiornamento en constatant et prenant acte d'une rupture mentale entre l'émancipation de la "colonisation spirituelle" et la réappropriation de l'identité d'origine. Cette seule prise de conscience devient un moteur déterminant pour atteindre ces origines quelque peu effacées, mais pas perdues.

Souvenons nous que ce catholicisme romain qui s'est infiltré, puis installé dans notre Gaule par le baptême de Clovis en 486, est cette religion paulienne de l'obéissance et de la rédemption par la souffrance élaborée par l'empereur Constantin pour refédérer l'empire Romain. C'est là un acte de colonisation césariste pour perpétuer cette organisation sociétale et conserver à César toute sa puissance et à ses sbires tous leurs privilèges. Il n'y a là rien de la révélation d'un peuple reconnu mais juste une instauration de la culture de la soumission volontaire.

Et puis, cette prise de conscience façonne une rupture sociale, car elle instille l'idée d'une reconstruction de valeurs collectives. Ainsi, nous pourrions assister, comme chez nos confrères africains, à un retour aux mythes communautaires et aux valeurs ancestrales. Je repense au solidarisme bienveillant que nous voyons ressurgir dans nos campagnes, quand les regards se tournent vers le "pays" et lâchent les avidités singulières.

Alors nous assistons à une réelle rupture politique. Ainsi nous lâcherions ce néolibéralisme individualiste, compétitif, concurrentiel et si catholique, pour des modèles de gouvernance inspirés des traditions de partage et de solidarité. Comme nos collègues africains y parviennent nous ferions une réappropriation des modèles politiques anciens. Je pense à ces collectifs d'assemblées citoyennes qui ont structuré les relations sociales et que nous retrouvons avec les approches girondines et libertaires de type associatif, fédéral et confédéral. La naissance de coopératives et de syndicats sont de ce type.

Par ces bouleversements sociétaux, nous constatons quelques ruptures spirituelles avec les églises centralisatrices, cultivant un certain culte de la personnalité, comme celle du chef pour, à l'instar de nos collègues africains. Dans ces conditions, réapparaît une nouvelle définition de la spiritualité dont le principe serait lié à une entité supérieure transcendantale, et présente en chaque personne. C'est en son sein que se retrouvent l'univers et les dieux, chers à Aristote et Socrate, notamment.

Si nous pratiquons ces ruptures salutaires avec les religions imposées, pour retourner aux traditions ou plus exactement à ce regain de dynamisme spirituel, alors, face à la crise multiforme desdites religions d’essence abrahamique, nous trouverons les issues utiles, sinon un… salut. Plus qu'à l'occasion de révolutions protestantes, aujourd'hui la tendance est d'aller plus loin encore, dans un retour vers l'animisme et ses rites chamaniques. La puissance de la pensée imaginaire où la personne n'est pas réduite à un individu, mais éclose dans des égrégores à la conscience universelle, s’apparente à celle d'un univers vécu et ressenti partout dans chaque environnement.

En conclusion, nous pourrions partager, voire prédire, que notre chemin va retrouver ses anciennes attaches, tout en marchant sereinement, vers une utopie transformatrice : on peut la considérer comme la prise de conscience de soi dans le monde. Ainsi, pour poursuivre la comparaison, les mythes ouest-africains ne seraient pas à considérer seulement comme des récits du passé. Ils pourraient devenir ces outils vivants qui inspirent les ruptures majeures de la société actuelle. J'ai juste poussé la porte sur ce possible qui ne saurait tarder… Certes, ”l'essai” reste à transformer... puisqu'il est déjà marqué !

Jean-Marc SAURET

Le mardi 2 décembre 2025


https://www.pressenza.com/fr/2025/04/les-processus-de-ruptures-en-afrique-de-louest-et-linspiration-des-mythes/

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Penser librement et le dire (25 11)

Si penser librement est un axe central de l'œuvre d'Annah Arendt, c'est aussi cette posture qui est la sienne et qui respire à travers toute son œuvre. Elle oriente ma pensée reconnaissante aujourd'hui. Il y a tellement de femmes qui, dans l'histoire, ont fait preuve de ce courage et de cette vigilance que je me demande, n'ayant plus rien à perdre face à une société "homocrate", pourquoi ces personnes là ont plongé dans ces combats pourtant a priori "ingagnables".

Je pense aussi à Olympe de Gouge, à Louise Michel, à Colette, à Candace Owens et à infiniment bien d'autres dont le courage et l'intelligence n'ont d'équivalent que leur sincère engagement total. Oui, il est urgent de relire Annah Arendt pour garder le cœur à sa place et les neurones bien agités. Ces personnes nous font modèles. 

Ce qui me réjouit est que ces personnes pensent par elles même, réfléchissent spontanément à ce qui se passe, sans crainte ou conscientes des enjeux et disent quoi qu'il en soit leurs pensées. Nous comprenons que la même guerre entre les quelques richissimes et le peuple pauvre se rejoue inlassablement depuis Jules César et même peut être ailleurs bien avant certainement.

Si nous gardons les yeux bien ouverts, la conscience claire et l'esprit aux aguets, alors nous aussi pourrons prendre le relais de la résistance fertile. Il s'agit de penser sans concession, en modérant les influences majoritaires, et d'agir en conséquence. Le but de ce blog est bien celui ci puisqu'il se nomme "Comprendre et agir" ! Si j'écris, comme je l'ai déjà rapporté ici, c'est pour mieux penser et développer ma réflexion au plus juste.

Celui qui ne dit pas ce qu'il pense est un "collaborateur" de ce monde menteur et manipulateur. En poursuivant sur ce mode, on peut aller jusqu'à dire que celui qui ne dit pas ce qu'il pense est un traitre à la raison, un combattant d'en face. Celui qui ne pense pas par lui même, ou qui n'essaie même pas, deviendrait un esclave qui lâchement se laisse détruire. Les mots sont forts, certes ! Mais en l'espèce, et dans ces conditions, l'individu laisse vivre un combat contre lui-même et tend à contribuer à sa propre perte. A contrario, celui qui se lève et dit clairement ce qu'il en pense est certainement combattu, mais il fait réagir le plus grand nombre endormi. Ce n'est pas une possibilité, cela devient un devoir civique et moral. 

On peut ainsi affirmer que les plus pauvres et les plus faibles sont ceux qui se couchent et arrêtent de penser et de dire ce qu'ils ont compris. En ce sens, Annah Arendt est ou devient un exemple pour tous. Et elle n'est pas la seule. Ceux qui cèdent aux conflits d'intérêts ne sont pas que de faibles personnes mais aussi des traîtres à la cause des peuples écrasés par les plus puissants. Ceux-ci ne sont ni généreux ni compatissants. Ils conduisent une guerre contre nous et c'est à nous de réagir, de résister comme l'ont fait tant de personnes naguère. Il est inutile de les citer ici, même quelques-unes. Chacun connaît ces héros et pourrait ou devrait se nourrir de leurs parcours comme nous. Certains le font.

Certains, comme Pierre Joseph Proudhon, comme le général de Gaulle, comme Mandrin et bien d'autres, ne sont pas d'un bord ni d'un parti politique. Ils sont d'abord fidèles à eux mêmes et lucides sur au moins une partie du problème. Ils l'ont traité à leur façon, avec leurs moyens et leur sagesse, sans retenue, regardant le réel droit dans les yeux. Je pense alors à Emile Potier, allumeur de réverbères qui éclaira l'humanité de son chant de l'internationale, à tous ces anonymes qui ont traversé la manche dans de frêles esquifs pour répondre à l'appel du 18 juin, à tous ces autres anonymes partis en Russie faire la révolution de 17, à tous ces rédacteurs, porteurs et distributeurs de tracts résistants. Je pense aussi à tous ceux, comme mon oncle, qui se sont évadés et, de retour chez eux, ont construit des réseaux de résistance, etc. Personne n'en parle parce qu'ils sont des exemples "bien trop dangereux". S'il y a des barricades, monte y, et s'il n'y en a pas, bâtis en une ! On dirait un adage de la commune de Paris...

Et nous ?... Que faisons-nous ? A l'école en 73 j'animais dans mon lycée la grève de résistance à la loi d'abrogation des sursis militaires, donnant la parole à ceux qui étaient contre nous... Depuis je suis toujours désobéissant et actif à ma place, comme je peux, dans les interstices opportuns que me présente la vie. J'écris et publie, espérant semer de petites graines de réflexion... et ce sous l'opprobre des suivistes bien pensants.

Nous savons par ailleurs que toute notre pensée et réflexion, s'élabore et se juge autour d'une approche fondamentale, une sorte de conscience primaire. Freud parlait du désir profond et premier. Chaque philosophe et même chaque quidam dit lambda, présente une conviction première autour de laquelle il a construit, du moins le dit-il, toute sa pensée. Michel Maffesoli lui-même, affirme que sa conscience profonde est née de l'observation jungienne : que des mythes profonds traversent l'histoire et se répètent dans un "enracinement dynamique". Pour Annah Arendt, la vie publique s'oppose à la vie privée, personnelle, dans un frottement permanent, etc. 

Pour ma part, je dirai que tout se passe dans notre mental. Avec les grecs anciens je dirai que le beau, le bon et le vrai sont les variables de notre réalité, dans la mesure où c'est ce à quoi nous aspirons. Cet ensemble, d'ailleurs cohérent, dirige notre contemplation et nos agissements. Tout cela reste vrai tant que nous ne nous laissons pas happer moralement par le triste, l'inconséquent et la cupidité. Car c'est bien de là que viennent toutes nos guerres... 

Pourtant, je garde profondément ancré dans ma conscience que notre identité est dépendante de notre environnement, quil en fait même partie intégrante. Mais ceci est une autre histoire. Alors, mesurons l'impérieuse nécessité d'être vrai, direct et sincère, car notre société en dépend. A l'instar d'Hannah Arendt je dirais que personne n'a le droit d'obéir mais le devoir de comprendre. Et c'est déjà assez compliqué comme ça...

Jean-Marc SAURET
Le mardi 25 novembre 2025

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Question de sens (18 11)

Je me souviens avoir enseigné le management en grandes écoles et universités. A l'époque, j'affirmais que la question du sens était au cœur de celle du management. Mais je comprends aujourd'hui que ce n'est pas le seul domaine où cette dimension s'impose comme centrale et incontournable. Donner du sens à sa vie, à soi, à son existence, au monde qui est là, à ce qui nous arrive, est au plus profond de nos nécessités. Et pour cela il importe de rattacher ce sens à ce qui est plus grand que nous, à la transcendance du monde. Faut-il encore concevoir, imaginer ou reconnaître cette transcendance ? Est-elle au cœur de nous même ou extérieure à nous ? Premier point, sur lequel il est bon de s'accorder : la transcendance, et sa définition. Opposée à l’«immanence», ce terme désigne ce qui dépasse “absolument”, et est d'une autre nature qu'un domaine de référence déterminé. Au Moyen Âge, ce terme qualifie “dieu”, et se confond avec l'absolu. Plus prosaïquement, la transcendance peut se définir comme notre dimension intérieure réalisée.

En revenant, nous pouvons affirmer que, fondamentalement, il n'y a de réalité que mon rapport au monde. La "chose" ne préexiste pas à ma relation à ladite chose. L'objet est mon rapport à la chose. Comme l'écrivait Schopenhauer, la réalité est un objet pour un sujet qui la regarde. Si le sujet s'en va, l'objet disparaît. Comme le précise la physique quantique, c'est l'observation qui détermine l'objet.

La vie n'est pas ce qui nous arrive, mais bien tout ce qui démarreà partir de nous, et donc de nos perceptions. Il s'agit bien, ici, d'inventorier ce que nous projetons depuis nos désirs, nos attentes et notre conscience. Ainsi, convient-il d'avoir déjà le courage de nous voir tel que nous sommes… Complément indispensable, il nous faut aussi savoir nous accueillir, nous accepter, nous aimer, tout en favorisant ce nécessaire laisser faire. C’est ce même “lâcher prise” qui va permettre à la vie de se réaliser vraiment.

Le monde occidental néolibéral et matérialiste, tel qu'ilest”, ne connaît et ne reconnaît que ce qui se touche, se mesure et se compte. On peut y associer une ignorance profonde de la puissance de l'esprit et des dimensions symboliques ou imaginaires. Dommage qu'en plus, cette ignorance le rende prétentieux, enfermé dans les croyances et les certitudes d'un monde limité, sinon “fini”...

Ce que je constate du monde n'est que le reflet de ma vision intérieure. Penser créée ! Ce que critiquent les gens c’est nécessairement une part d'eux-mêmes. Ce que l'on condamne donc, s'installe contre soi, en opposition et en résistance à nous-mêmes. De la même façon, ce que l'on souhaite ou “bénit, va arriver et se produire... En fait, tout ce que l'on vit et ressent au cœur de soi se manifeste. Arrêter de "réagir" (cerveau reptilien) pour "répondre" (état de conscience), voici comment passer de la réaction de peur à la réponse lucide. Voilà qui constitue un projet d'être!

Notre imagination est un dieu créateur opérant en nous, à travers nous et pour nous, dans la mesure où l'imagination crée la réalité. Il n'y a aucune distance entre le désir et sa manifestation. Le pouvoir de la réalisation est dans la conscience de la présence. Sois là, juste là, présent et conscient de ce qui se passe, de ce qui est. Imprègne toi de cette présence, et tu sauras ce qu'il va advenir... Pour ce faire, ressens la réalisation achevée. On est, et devient alors, la porte ouverte par où tout afflue dans notre vie. Comme certains l'ont déjà dit : tout est accompli.

La pratique des trois portes consiste à imaginer bien présente la porte du présent ouverte sur le passage des bienfaits, la deuxième fermée : c'est la porte des méfaits ! Quant à la troisième, elle est ouverte en grand ! C'est là que l'on retrouve la porte des désirs réalisés. Eh oui, elle est déjà grande ouverte, et vous l'avez passée dans un état de grâce accompli, sans même y penser. Nous voilà en pleine gratitude, car, à ce moment, tout est réalisé... C'est à partir de là que je décrète la réalité telle que je la conçois. Je suis ce que je suis.

Dans mon village quercynol, nous nous retrouvons à quelques-uns autour d'un verre, plusieurs fois dans l'année pour réfléchir ensemble à ce qui nous occupe ou préoccupe. Nous appelons ce moment "L'atelier des pensées". Un moment, dans l'après midi, durant environ quelques demi-heures, nous traitons librement de ce qui nous dépasse, comme "l'amour", "La peur", "Le bonheur". Ce peut être aussi le "Vivre ensemble", "La mémoire", "Les croyances", "Pourquoi accepter la différence", "bien vivre son rapport aux autres", mais aussi "L'IA", "La démocratie", etc. Il n'y a pas de compte rendu. C'est juste un partage pour ceux qui sont là. Ici, personne n'a raison ou tort. On partage, on réfléchit ensemble, et ce qui nous dépasse est donc bien identifié, sous la forme suivante : “ce que nous sommes encore capables de… produire !”... D'où cette question de “sens”, qui ne me lasse jamais, voire nous laisse pourtant… “interdit” !

Jean-Marc SAURET
Le mardi 18 novembre 2025

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Faut-il combattre ceux qui nous contraignent ? (11 11)

La réalité sociale se répète à l'infini. Les cycles de soumission des plus pauvres et de domination des plus riches est constante. Rien n'efface ni n'arrête la confiscation des pouvoirs par les plus fortunés. Ce sont eux qui phagocytent les moyens. A l'intérieur du processus, on retrouve toujours, et sempiternellement, ceux qui ont de l'influence comme actuellement par les médias qu'ils possèdent. Edward Bernays a tout à fait compris la puissance et l'efficience de la fabrique du consentement. Il en a publié aussi bien la méthode que l'exégèse dans "Propaganda" en 1928. Ce titre est devenu le livre de chevet de nombre de totalitaires, comme Goebbels, par exemple. D'autres en ont tiré des enseignements contre le totalitarisme, comme Noam Chomsky.

Mais l'âme de Bernays était noire et ses conceptions particulièrement matérialistes, cupides et néolibérales. Ses autres œuvres en témoignent. L'intention qui fait le moteur du monde dépend de nos représentations du-dit monde, et de soi dans ce monde. C'est de là que surgissent intérêts, goûts, priorités et objectifs personnels ou collectifs. C'est bien de celà qu’il s'agit ! Quant à changer le monde, personne ne s'en occupe vraiment. C'est justement aussi pour cela que j'écris et publie.

Dans ces conditions, l'alternative est la suivante : faut-il ouvrir le combat pour éviter de se laisser faire,... à moins que l'on admette que tout cela continue ? Nous choisirons le premier terme, et la logique rationnelle nous y invite. Nous ne prendrons toutefois pas de front la situation ! La stratégie et les sagesses anciennes nous proposent plutôt l'art de la "muléta", et donc plutôt l'art de l'esquive que l'affrontement. Dans ce dernier, il y en a toujours au moins un qui meurt. Et comme nous espérons que ce ne soit pas nous, nous avons tendance à y réfléchir à deux fois. J'avoue, en l'espèce, me sentir parfois vraiment partagé.

Que nous disent ces sagesses anciennes ? Le bouddhisme nous invite à considérer le karma. On nomme ainsi cet écho de l'univers qui renvoie les conséquences aux auteurs des actions en cause. Le Zen nous renvoie au wuwei, cet art du non combat qui, loin d'être une absence de réaction, se présente comme le "non agir". Cette option propose de laisser l'univers s'en charger. Il s'agit ici de "suivre le flux naturel des choses (voire l'ordre cosmique originaire) sans le perturber ni tenter de le modifier". C'est ce que décrit le taoïsme, sous la plume de quelques observateurs et exégètes. Dans cette posture, il s'agit aussi de laisser l'univers se charger de la tâche. En effet, comme nous sommes tous (et c'est vrai pour “l'ensemble”) reliés dans un "grand tout", il s'agit de laisser ledit univers agir selon la conscience universelle. C'est aussi ce que l'on croit comprendre de l'enseignement de Joshua, dit Jésus, dans son invitation à tendre l'autre joue.

Je pense également à cette démarche dite "non violente", que j'aime à nommer "en paix", qui a des origines diverses comme dans l'anabaptisme. On peut aussi raccrocher cette notion à tous les christianismes, en référence au sermon sur la montagne.

Le rapprochement avec les enseignements de Joshua, dit Jésus, est rappelé par le pasteur Adin Ballou, adepte du socialisme libertaire. On retrouve cette même association d'idées dans l'œuvre de Léon Tolstoï, développée de façon analogue par Gandhi, Martin Luther King, ou Nelson Mandela. Elle est aussi présente dans la théorisation de Lanza del Vasto, de Marshall Rosenberg et de bien d'autres adeptes aussi prolixes que bienveillants. Les sources patentes sont nombreuses, variées et diverses mais convergentes, jusque dans les actions internationales d'associations comme Mocica. Je pense aussi à toutes ces démarches dites "spirituelles" qui invitent à des pratiques concrètes, lesquelles "modèlent" le cerveau pour favoriser la lucidité, la paix et la compassion. Dont acte.

Toutes ces démarches ont en commun un fait : affirmer et soutenir que la paix est bien plus puissante que la violence quelle qu'elle soit. D'autres affirment avec aisance que l'amour est plus fort que tout ! Nous avons connu le mouvement hippie et celui des beatniks, tous deux adeptes de liberté, de bienveillance et d'amour de l'humanité. Si les forces de l'ordre les ont maltraités, ces mouvements n'ont provoqué aucun conflit et c'est déjà là une belle victoire. Ces mouvements sont à l'origine de bien d'autres expériences comme celle des communautés libres ou libertaires, ou encore autonomes. Ces militants pragmatiques ont réalisé des micros sociétés qui rebâtissent à côté de la société mortifère néolibérale le monde qu'ils espèrent. Et ces petits mondes prospèrent en toute discrétion jusqu'à ce qu'un jour ils soient suffisamment importants pour faire foi et loi.

Je pense aussi à tous ces individus bienveillants sans aucune étiquette politique ou religieuse, qui promeuvent la force de l'amour et de l'intuition à travers leurs travaux habituels. Je pense à Einstein, Carl Jung dont il était un ami, à Nelson Mandela, à Martin Luther King, à Gandhi et à bien d'autres moins célèbres qui, au quotidien, répandent cette force de paix et d'amour juste autour d'eux, sans tambour ni trompettes...

Chacun en connait et en a connu et nous nous sommes trouvé heureux en leur présence. Je repense pour ma part à ce moine ermite, Emmanuel de Floris, à Alberi, mon professeur d'italien, à l'abbé Perri, directeur de notre collège et lycée, à cet anarchiste, ancien combattant au Vietnam, réfugié sur le Larzac, à mon si bienveillant relecteur, Jacques Campargue très investi dans une célèbre communauté d'Emmaüs mais pas seulement, etc. Il en existe bien d'autres encore, et je suis convaincu que chacune et chacun élargira cette trop courte liste.

Ce monde est en marche. C'est bien là que les victoires se préparent dans l'ombre de l'intime et des relations de proximité. A chaque contrainte correspond une réponse bienveillante, car ceux que je combats deviennent des adversaires, sinon des ennemis, alors que ceux que j'accueille et considère deviennent des partenaires. C'est bien ce que Gandhi a choisi face à l'Anglais trop ou très puissant... C'est aussi Antoine de Saint-Exupéry qui écrivit cette formule : “ Si tu diffères de moi,... loin de me léser tu m'enrichis”. Une sorte de centre de l’union humaine qui élève aussi les cœurs comme les esprits…

In fine, nous pouvons dire que l'amour et la paix sont des pragmatismes efficaces. Physiologiquement, ces variables viennent de ce que l'on nomme aussi le "cerveau du cœur". Nous savons que la pratique technique de la "cohérence cardiaque" lui donne la primeur pour équilibrer tous les systèmes de notre corps. Dont acte et merci Saint-Ex. !

Jean-Marc SAURET
Le mardi 11 novembre 2025

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