L'Humain au cœur et la force du vivant : "Ce n'est ni le monde ni ce que nous y sommes ou y faisons qui nous font peur, mais l'idée que l'on s'en fait, car la vision guide nos pas. Et sur cela, nous avons la main. C'est là toute notre puissance et toute ma pensée ! " (JMS) Aller plus haut, plus loin, est le rêve de tout un chacun, comme des "Icares" de la connaissance. Seuls ou ensemble, nous visons à trouver un monde meilleur, plus dynamique et plus humain, où l'on vit bien, progresse et œuvre mieux. Il nous faut comprendre et le dire pour agir. Si vous êtes désireux d'accomplissement personnel, ce blog est pour vous. Fouillez dans ces plus de 500 articles ! Commentez ! Partagez ! Si ces contenus vous intéressent, le droit de copie, même partiel, est sous Licence Creative Commons : chacun est donc libre de les reproduire, de les citer comme il le souhaite, à l'expresse condition d'en citer chaque fois la source et de n'en faire pas commerce.

La crise du Covid comme rite de passage (15 02)

Les rites de passage ont été identifiés et décrits par l'ethnologue Arnold Van Gennep. Ils se singularisent par le fait qu'ils sont destinés à tous les membres d'une communauté et marquent une étape dans la vie sociale, un changement de statut. Ce peut être à l'occasion de la puberté, du passage à l'état d'adulte, de la ménopause, de la naissance ou de la mort, etc. Ce sont aussi les rites d'adoption, de fiançailles et de mariage, mais aussi de l'usage du passage des portes. 

Ils se distinguent du rite d'initiation par le fait que ce dernier effectue une sélection d'individus dans la population pour les faire accéder à un groupe singulier, restreint, voire minoritaire ou d'élite. Je pense au concours d'entrée à l'ENA, au baccalauréat, aux cérémonies d'installation suite à des élections, etc. C'est aussi, là, la fonction des bizutages, bien souvent confondus avec un "droit d'entrée". Il est vrai que ces rites-là tendent à se déliter, et ce phénomène est aussi à observer.

Il y aurait aussi beaucoup à dire sur ce qui se passe lors de ces célébrations, comme des partage de nourriture, des adoubements, des gestes d'affection, voire des choses de l'ordre du sacrifice, de la transmission, du don et du contre don, etc.

Si le rite de passage cadence la vie sociale, il est aussi un marqueur offrant des repères sociaux aux individus. Il a souvent la fonction de rites d'appartenance, comme en faisant passer l'enfant à l'âge adulte et ainsi appartenir au groupe de ceux qui débattent et décident. De la même manière, autour du service militaire, existaient des célébrations locales, comme la tournée des conscrits, parce que le service militaire était ainsi devenu un rite populaire de passage à l'âge adulte, alors que sa fonction première était bien de constituer une armée disponible et opérante.

Les anciens qui avaient connu "la guerre de quatorze", affirmaient qu'une femme n'avait pas envie d'épouser un garçon qui n'aurait pas effectué son service militaire, car il y aurait alors un doute sur la qualité de sa santé, voire de sa virilité.

Comme nous le voyons là, même si l'acte à bien d'autres finalités pratiques, il est souvent devenu un rite populaire et social. Ce n'est donc pas ce qu'en décident les dirigeants qui fait sens mais ce qu'en vivent les gens dans la jouissance, la contrainte, la douleur et la privation. Cette dissociation est courante lors des faits et phénomènes sociaux.

Je pense, par exemple, à l'usage que faisaient les gens des plaques d'immatriculation des véhicule, comme un indicateur de localisation, d'origine. Voilà pourquoi, lors du changement des plaques à l'occasion de la transformation des fichiers départementaux en un seul fichier national, les gens ont réclamé la réintroduction d'une manière ou d'une autre du numéraux de département.

De la même manière, ce qu'ont prétendu mettre en place les gouvernants territoriaux, à l'occasion de ladite "crise sanitaire", n'a rien à voir avec ce qu'ont vécu les gens dans les populations. Les raisons d'être de confinements et de ports, ou pas, de masques, l'abandon forcés de rituels de salutation, sont distinctes des sens installés dans les relations sociales. Ainsi, la suppression de rituels de salutation, comme la poignée de main ou la bise, ont introduit l'idée que l'autre est une menace. Ce sens a été transformé par les autorités par "évitons d'être une menace pour les autres". Ainsi, la substitution des rituels de salutation a apporté un effondrement rituélique du lien social que nombre d'acteurs ont dénoncé. Rapidement ces acteurs l'ont compensé par un renforcement de solidarités et identités locales ou affinitaires.

Par ailleurs, ce qui constitue le rite de passage est un temps en trois phases. La première est la fin constatée d'un état ou d'une ère. Arrive alors le temps du rite où tout se passe de manière réelle et symbolique. Arrive ensuite le temps d'après, celui où tout a changé. Prenons-en acte et regardons de plus près.

Que s'est il donc passé durant cette période sombre et que s'y est-il dit, vécu, ressenti ? Nous avons constaté que cette période a installé une religion de la soumission à une opinion centrale totalitaire. Elle est une sorte de pensée unique qui refoule l'intelligence, l'analyse et le débat au rang de complotisme. La dénoncer et s'élever contre relèverait de la bêtise et de l'irresponsabilité...

Ainsi, dans le détail, le temps des confinements où nous applaudissions les acteurs de la santé (peut-être parce que les dirigeants ne pouvaient ou ne voulaient accéder à leur demande de moyens et de rémunérations) a installé dans la population le fait que ce rituel pouvait remplacer le paiement de salaires. Dès lors sont apparues des plaisanteries sur la toile invitant à payer amendes et impôts avec des applaudissements. Les auteurs de ces plaisanteries visaient très justement l'état et aucun n'a visé de commerçants ou producteurs. Aucun ne visait les rapports sociaux, mais les rapports au pouvoir et aux potentats grandissants.

Le temps des mensonges et des pressions morales, le temps des obligations vaccinales ou forcées et de confinement successif ont installé du sens dans le lien social. S'agissait-il peut-être de punissions d'enfants irresponsables ? Alors, la confiance dans les dirigeants s'est déconstruite pour un grand nombre d'acteurs. Une autre posture relevait de la soumission volontaire décrite par La Boétie, une sorte de syndrome de Stockholm. La première produisait une "découverte", sorte de "clairvoyance" sur les postures de dirigeants introduisant une autorisation nouvelle : le droit universel de mentir et de discréditer, de jeter des anathèmes disqualifiants. 

C'est bien parce que cette pratique sous-jacente et minoritaire existait quelque peu déjà parmi le commun des mortels que la pratique des dirigeants s'est retrouvée comme une autorisation universelle à le faire. L'état lui-même a déconstruit le lien social, son représentant-garant déclarant même vouloir "emmerder" les insoumis.

Alors, le temps des rébellions et des soulèvements arrive. Car, face à l'injonction paradoxale des gouvernants "Soyez solidaires, soumettez-vous !", a émergé en miroir dans la population une posture de rébellion devant laquelle le moindre achoppement génère un soulèvement. Je renvoie à l'excellent ouvrage du sociologue Michel Maffesoli "L'ère des soulèvements" (Ed. du Cerf). Il y montre que ceux-ci se développent en réaction à ce qu'il nomme un "totalitarisme doux", un totalitarisme insidieux, culpabilisant et infantilisant.

Dans ce moment long et clairement identifié comme exceptionnel que nous sommes encore en train de vivre, se sont construites des réalités nouvelles comme par initiation. Cette "maltraitance" a donné accès à une réalité nouvelle où valeurs, rapports sociaux et hiérarchie des normes ont été bouleversés. Parce que cette période apparait comme "éclairante", elle prend les formes, valeurs et fonctions du rite de passage.

La nouvelle réalité peut ainsi être que les minorités gouvernantes mentent à leur profit, que la république n'est plus, que le totalitarisme de l'exécutif butte sur la constance des consciences ! Mais aussi que le peuple résistant a fait l'expérience de l'auto-gouvernance et de l'auto-organisation. L'expérience des gilets jaunes n'est pas loin... Sans revenir sur le détail de ces événements transformateurs, nous voyons que toute la période vécue comme exceptionnelle et transitoire a fait l'effet d'un grand rite de passage.

Rien ne sera plus comme avant. Le temps d'avant est donc révolu. Les certitudes sont tombées et d'autres réalités sont apparues. Nous avons effectivement changé d'ère. Les bouleversements les plus radicaux sont à venir. La peur a joué un rôle important, opposant les masses, discriminant résistants et soumis. Il y a ici quelque chose du retour des années noires de l'occupation avec ses miliciens et ses résistants, un clivage volontairement instauré par la gouvernance. Des oppositions entre refondateurs résistants et continuateurs soumis vont vite se régler, peut-être avec violence, comme nos parents l'ont vécu au moment de la libération, de 44 à 45.

La raison et la vérité aura changé de camp.

Cet immense rite de passage montre que ce qui se pressentait déjà il y a quelques années, à savoir que nous étions dans une phase de mutation sociétale et non dans une crise (comme le prétendaient les dirigeants au début de ce siècle et dont la spécificité est le retour au temps précédant) est aujourd'hui institué par ce grand et difficile rite de passage. Cependant, le meilleur pour les uns et le pire pour les autres reste à venir...

Jean-Marc SAURET

Le mardi 15 février 2022

Lire aussi  " Sociétés primitives et société moderne "

1 commentaire:

  1. Monsieur Sauret,
    Notre société, dite moderne, s'est débarrassée des rites d'initiation, au profit de l'individualisme à outrance qui atteint sa plénitude dans le chaos des réseaux dit sociaux. La crise sanitaire est un passage rendu obligé par le virus , elle a et aura des conséquences sociales durables sur les plus fragiles d'entre nous, les enfants et les vieux.
    Nous commençons à mesurer les dégâts chez les enfants de 18 mois à 3 ans que nous recevons en PMI ou que nous rencontrons dans les écoles maternelles. Ils présentent des retards de développement et des troubles de la communication, pour de multiples raisons, dont une sur-exposition aux écrans , mais pas seulement.
    L'histoire de notre triste humanité a toujours montré que les plus pauvres et les plus fragiles payent le plus lourd tribu à ces crises.
    Nous devons restés debout et disponibles pour aider ces enfants et leur famille. C'est notre engagement de servir une noble politique de santé publique, en prenant soin des enfants et de leur famille. Aucun actionnaire n'en tirera profit, mais la solidarité reprendra peut-être sens , dans ce monde violent et injuste, le COVID n'ayant fait que souligner un peu plus ces injustices sociales que nous connaissons tous et que nous feignons d'ignorer .
    Merci pour votre écrit, docteur Cleray

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