L'Humain au cœur et la force du vivant : "Ce n'est ni le monde ni ce que nous y sommes ou y faisons qui nous font peur, mais l'idée que l'on s'en fait, car la vision guide nos pas. Et sur cela, nous avons la main. C'est là toute notre puissance et toute ma pensée ! " (JMS) Aller plus haut, plus loin, est le rêve de tout un chacun, comme des "Icares" de la connaissance. Seuls ou ensemble, nous visons à trouver un monde meilleur, plus dynamique et plus humain, où l'on vit bien, progresse et œuvre mieux. Il nous faut comprendre et le dire pour agir. Si vous êtes désireux d'accomplissement personnel, ce blog est pour vous. Fouillez dans ces plus de 500 articles ! Commentez ! Partagez ! Si ces contenus vous intéressent, le droit de copie, même partiel, est sous Licence Creative Commons : chacun est donc libre de les reproduire, de les citer comme il le souhaite, à l'expresse condition d'en citer chaque fois la source et de n'en faire pas commerce.

Talents et compétences

Dans les phases de recrutement que nous avons vécues, comme recruteur (ou comme recruté), il s'est agi, pour les donner à voir ou pour les reconnaître, de parler de compétences. Outre lesdites compétences, il était question, inéluctablement, de savoir faire, voire de savoir être professionnels. Nous avons usé de récits, de paraboles, de mise à l'étalage de résultats, en passant des moyens à l'objectif. Cela nous semblait subtil et  nous considérions la démarche sensible, et intelligente. Nous y avons vu une posture de prise de hauteur pour voir ou donner à voir ce qui est caché, discret, et perçu parfois comme dérisoire, voire secondaire. Et pourtant nous savions que c'était là un essentiel, car nous ne sommes pas recrutés pour exécuter des tâches, mais pour occuper des fonctions, les animer, donc leur donner une âme !
En écoutant le début d'une conférences du célèbre bouddhiste Matthieu Ricard, je l'entendis parler de talents, de développement de compétences et d'autres choses essentielles. Il donnait à cet effet, les exemples suivants :  savoir jongler, savoir jouer d'un instrument de musique, mais aussi savoir être heureux, être bienveillant, être en paix. Je ne me souviens pas avoir jamais recherché de telles particularités chez mes interlocuteurs professionnels, chez ces candidats dont il m'était donné la charge d'évaluer leur capacité à tenir tel poste. Il ne m'a jamais été demandé d'en témoigner non plus. Et pourtant, la bienveillance fait partie des talents nécessaire à un management efficient. J'ai eu l'habitude de répondre à la question sur ce qui est l'essentiel du management : "Aimez les gens et le travail bien fait. Tout le reste ira de soi".
Il me souvient aussi que les objectifs d'une entreprise sont assez différents de ceux que peut professer Matthieu Ricard lors de ses conférences. Ainsi, rendre les gens heureux, donner de la paix aux gens, œuvrer pour un monde meilleur, ne semblent pas inscrits - a priori -, dans les gènes de l’entreprise. Sans que cela paraisse atypique, on peut affirmer que les chemins d'accès à des objectifs aussi distants semblent au moins, “décalés”. Dans l'organisation, nous privilégions la rigueur budgétaire et procédurale. Dans le développement personnel orienté vers une société meilleure, nous parlons plutôt de pleine conscience, de pleine présence, ou d'attention altruiste. La méditation constitue en l’espèce, un chemin. L'un vise essentiellement la production d'objets ou services originaux, quand l'autre vise à ce que nous soyons meilleurs vers l'objectif. Simultanément, quand le premier attend du résultat dans un temps donné, le second déroule une démarche sans jugement aucun. Les pratiques semblent donc bien distinctes.
Pourtant ces deux mondes ne sont pas si éloignés que cela. Que vise le management ? L’efficience de l'organisation. Que savons nous de ce qui la produit ? L'intelligence collective. Ce sont les acteurs qui construisent la cathédrale, et non pas les plans, les budgets ou les méthodes. Ce sont bien les ouvriers, qui sont les “oeuvriers’. C’est la raison pour laquelle le management prend soin d'eux. Et l’on peut affirmer que la meilleure manière d'en prendre soin est de les considérer au mieux.
Paul Watzlawick nous a bien montré combien la considération que nous avons de l'autre l'invite profondément à le devenir. Nombre de ses travaux en ont fait la démonstration. Quelle est donc la meilleure manière de considérer l'autre ? Certainement pas en se mentant, et en lui prêtant des compétences dont il n'a pas fait la démonstration, ou un intérêt qu’il n’a pas montré. Mais simplement en étant bien convaincu qu'il est possible qu'il puisse le faire et qu'il en ait envie.
Comment avons nous fait pour enseigner à notre petite sœur ou frère, à notre enfant ou celui d'autres, à faire du vélo ? Nous avions juste la certitude que dans quelques temps, il roulera de lui même sur sa bicyclette. Nous pourrons invoquer nombre de raisons à notre certitude, que tout le monde y arrive, que c'est un apprentissage simple à la porté de tous, etc. Eh bien c'est certainement cette pensée là qui fait que l'enfant a appris avec vous à rouler seul à bicyclette. Parce que vous saviez qu'à un certain terme, l'enfant saurait le faire tout seul.
Voilà un acte de management simple : accompagner quelqu'un à la réalisation de l'oeuvre parce que l’on a une profonde confiance dans sa capacité à atteindre le résultat. Le phénomène se trouve accentué parce que nous savons profondément aussi, que nous ne pouvons pas le faire à sa place et que personne au monde ne le peut, non plus. Alors il l'a fait...
Dans ces conditions, la compassion, comme “relation d’aide”, n'est-elle pas une qualité essentielle au management ? Si, bien évidemment. Nous savons, depuis les travaux des sociologues constructivistes, que la réalité n'est jamais que ce que nous croyons, qu'elle n'est qu'un objet pour un sujet qui le regarde, comme l'écrivait déjà Arthur Schopenhauer en 1818.
Si j'ai la bienveillance de considérer chacun de mes collaborateurs comme je considère cet enfant qui débute la pratique du vélo, j'aurai alors toutes les chances de voir s'accomplir la cathédrale visée.
Ce ne sont évidemment pas les seules compétences techniques qui sont requises pour construire la cathédrale, il convient d’y ajouter aussi les talents d'humanité comme la bienveillance, la non-rivalité, le "dé-pouvoir".
Il m'est bien souvent arrivé, en formation, de faire la description de la relation à l'autre. Il y a moi et il y a l'autre. Il n'y a pas de relation à l'autre sans un objet de notre attention. La relation est toujours à trois : moi, l'autre et le tiers objet. Si je rencontre quelqu'un et que je m'adresse à lui, ce sera toujours sur un sujet qui n'est ni lui (ou elle) ni moi,... même en amour.
Ainsi la tentation est de vouloir que l'autre considère l'objet comme je l'entend, comme j'attend qu'il le fasse. Lacan nous disait que ce désir d'attraper le désir de l'autre est un désir paranoïaque. Il est impossible. “Son” désir ne nous appartient pas. Il est sa propre liberté de penser, son simple libre arbitre. Voilà qui est bien gênant pour le commerce, certes…
Ce n’est pas plus simple pour la publicité qui tente de vous façonner des représentations qui feraient de nous des addicts à leur produit. C'est très long et très aléatoire... Dans ces conditions, que puis-je développer dans cette relation autour de ce tiers objet ? La réponse apparaît bientôt, dans son évidence : il s’agit bien de développer la qualité de notre relation de manière à ce que, librement, “l’autre” puisse choisir de partager mon regard, ou, du moins, de le prendre en compte.
Nous avons vu précédemment que ce n'est pas ce que dit l'autre, ni comment il le dit, qui compte, mais ce qu'il est pour moi, ce qu'il représente pour moi. Voilà ce qui détermine si je prends ou ne prends pas ce qu'il me dit. Si un spécialiste de la médecine infantile me donne une indication sur la santé de mon enfant, il y a de fortes chances que je l'écoute. S'il s'agit d'un cuisinier de fast-food, sur ce sujet là, je serai moins réceptif... Dont acte. C'est donc bien la relation à l'autre qui fait l'engagement dans la considération du tiers objet.
Soignons notre relation à l'autre, en étant tout en empathie, respect, reconnaissance et considération. C'est la meilleure façon, voire la seule, de faire tomber chez lui les craintes de rivalité, d'affrontement, de manipulation ou de prises de pouvoir. Ensuite parlons lui de ce que nous voulons partager avec lui (de la technique de la bicyclette ou autre), et laissons lui en faire ce qu'il veut, sans pression ni contrainte. Alors, il y a de très grande chances qu'il considère votre objet de la meilleure des façons.
Mettez lui la pression, des contraintes ou des menaces, et vous obtiendrez un menteur, un tricheur ou une bombe à retardement. Il vous aura considéré vous, mais pas l'objet de votre propos,... même si dans un temps court, vous pensez l'avoir contraint. Il y a des boomerangs qui reviennent bien plus fort qu'ils ne sont partis.
Ainsi, ces valeurs, qui nous semblent si éloignées de la vie des organisations, comme la paix, l'empathie, la bienveillance, le bien être, etc., sont tout à fait au cœur de l'efficience des organisations, tout à fait au cœur du management. Et peut être que déjà, votre propre histoire revient à votre mémoire...
Jean-Marc SAURET
le mardi 13 novembre 2018



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Vos contributions enrichissent le débat.